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Ils y construisirent une redoute pour mettre ce point à l'abri d'un coup de main.

Dans les premiers jours de brumaire (fin d'octobre), la croisière anglaise avait été renforcée de quelques bâtimens légers. Le 3, à 2 heures aprèsmidi, 18 on 20 chaloupes, soutenues par quelques avisos, se présentèrent devant le fort d'Abouqyr. Il s'engagea de part et d'autre une canonnade qui se termina avec le jour. Le 4, à la même heure, l'ennemi recommença la même manoeuvre, et perdit une chaloupe qui fut coulée bas. Le 5, à 10 heures du matin, 150 Arabes des villages d'Edkoû et Atfeïneh, voisins de la côte, se présentèrent à pied et à cheval derrière Abouqyr, et placèrent sur un monticule de sable un turban rouge, signal dont ils paraissaient être convenus avec les Anglais; mais un détachement de la 4. ayant marché sur eux, ils se dispersèrent après avoir eu 7 hommes tués. Le 6, à 9 heures du matin, le nombre des chaloupes ennemies fut porté jusqu'à 30. La canonnade s'engagea, et une heure après elles s'approchèrent si près que la fusillade devint très-vive. L'ennemi n'osa pas arriver jusqu'à terre; il fila sur la droite et débarqua une soixantaine d'hommes sur la digue. Quelques soldats qui étaient cachés derrière marchèrent à eux battant la charge; les Anglais se rembarquèrent avec précipitation; il y en eut plusieurs de tués. La flottille, ayant eu plusieurs chaloupes coulées bas, prit le large. Le 7, à 3 heures après-midi, considérablement diminuée, elle s'approcha encore du fort et de la plage, et fut reçue comme

les jours précédens. Les 8, 9 et 10, les Anglais mouillèrent à 4 lieues au large, occupés à se radouber. Ces chaloupes portaient 7 à 800 hommes. Martinet commandant la légion nautique, se comporta dans ces affaires avec beaucoup de distinction.

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Au premier avis de ces mouvemens, le général en chef expédia Murat à Rahmanieh avec une partie de la 75°. pour se rendre de là à Rosette, à Abouqyr ou à Alexandrie. Il fit disposer des båtimens pour envoyer d'autres troupes et s'y transporter lui-même si les nouvelles qu'il recevrait le lui faisaient juger nécessaire. Elles furent rassurantes; les renforts devinrent inutiles.

Il était évident que les Anglais n'avaient tenté ce débarquement que par suite de quelque projet concerté avec Mourad-Bey, des Arabes ou des habitans; mais puisque ces alliés ne s'étaient pas montrés en force, il fallait laisser les Anglais débarquer et tomber sur eux. C'était du moins ce qu'écrivait le général en chef à Marmont, en ajoutant : « Vous nous auriez envoyé quelque colonel anglais prisonnier qui nous aurait donné des nouvelles du continent' >>.

Les exemples de sévérité faits sur plusieurs villages, entre autres sur celui de Berket-Gitás, mirent enfin à la raison les habitans et les Arabes. Grâce à l'activité des troupes et notamment de la 4. d'infanterie légère, les eaux du Nil arrivèrent le 14 brumaire à Alexandrie en si grande

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abondance, qu'on estimait la provision suffisante pour deux ans. On profita de leur présence dans le canal pour approvisionner de blés la place, et pour transporter à Gizeh les équipages d'artillerie '.

Le cheyk El-Messiri, à qui Bonaparte avait déjà témoigné sa satisfaction de ce qu'il avait révélé à Kléber une intrigue des Anglais pour se faire livrer Alexandrie, était retourné dans cette ville après avoir assisté au grand divan extraordinaire convoqué au Kaire; le général en chef lui écrivit : « J'ai vu avec plaisir votre arrivée à Alexandrie, cela contribuera à y maintenir la tranquillité et le bon ordre. Il serait essentiel que vous et les notables de cette ville prissiez des moyens pour détruire les Arabes, ou les forcer à vivre d'une manière plus conforme à la vertu. Je vous prie aussi de faire veiller les malintentionnés qui débarquent à deux ou trois lieues d'Alexandrie, se glissent dans la ville, et y répandent de faux bruits qui ne tendent qu'à troubler la tranquillité. Sous peu, je ferai travailler au canal d'Alexandrie, et j'espère qu'avant six mois l'eau y viendra en tout temps. Quant à la mer, persuadez-vous bien qu'elle ne sera pas longtemps à la disposition de nos ennemis. Alexandrie réacquerra son ancienne splendeur, et deviendra le centre du commerce de tout l'Orient; mais vous savez qu'il faut quelque temps. Dieu même n'a pas fait le monde en un seul jour ».

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'Lettre de Bonaparte au Directoire, du 26 brumaire. Lettre du 3 frimaire.

Rendre le canal d'Alexandrie propre en tout temps à y conduire l'eau du Nil et à la navigation, était un des grands travaux que, dans les premiers mois de sa conquête, au témoignage de l'ingénieur Lepère, Bonaparte avait projeté '.

Ignorant toujours la situation dans laquelle la France se trouvait vis-à-vis de la Porte, et ne recevant aucune réponse de Constantinople, Bonaparte apprit qu'une flottille turque était avec la croisière anglaise devant Alexandrie et résolut de leur envoyer à l'une et à l'autre des parlementaires pour avoir des nouvelles et entamer quelque négociation.

Bracewich, chancelier interprète de France, habillé en musulman, et le Turc Ibrahim-Aga devaient s'embarquer avec pavillon turc sur le canot de la caravelle qui était dans le port, et aborder l'amiral turc. Un officier de terre, sur un canot portant pavillon tricolore, devait se rendre à bord de l'amiral anglais. Il fallait que ce canot fût commandé par un officier intelligent qui pût tout observer sans se mêler de rien.

Le parlementaire turc était chargé de prendre tous les renseignemens possibles sur la situation de la France avec la Porte, et sur celles de l'ambassadeur français à Constantinople et de l'ambassadeur ottoman à Paris; de faire connaître à l'officier commandant la flottille turque le désir qu'avait le général en chef qu'il envoyât au Kaire

'Le pacha d'Égypte, Mehemet-Aly, a réalisé ce projet. Le canal a été fait; 300,000 Egyptiens y ont travaillé; 40,000 y sont

morts.

un officier distingué pour conférer avec lui d'objets importans; que si les Anglais ne le laissaient pas entrer à Alexandrie ni à Rosette, il pouvait envoyer une frégate à Damiette; que le général en chef en profiterait pour écrire à Constantinople des choses également avantageuses aux deux puissances.

La mission du parlementaire français était de porter à l'amiral anglais une lettre du général commandant à Alexandrie, dans laquelle il lui dirait qu'il s'était empressé d'envoyer au Kaire la lettre qu'il en avait reçue le 19 octobre; que la caravelle qui était dans le port était à la disposition du pacha d'Égypte et suivrait ses ordres ; que ce pacha ayant jugé devoir, avant de les donner, envoyer un de ses officiers à bord de l'amiral turc, lui, commandant d'Alexandrie, avait autorisé la sortie du parlementaire sur le canot de la caravelle.

Il était ordonné à ce commandant d'avoir soin qu'aucun individu de ce bâtiment ne s'embarquât sur le canot, excepté les matelots rameurs; de prescrire à l'officier de terre parlementaire de se conduire à bord de l'amiral anglais avec la plus grande honnêteté, de lui remettre, comme par hasard, quelques journaux d'Égypte, de chercher à tirer toutes les nouvelles possibles du continent, de lui offrir de la part du général en chef tous les rafraîchissemens dont il pourrait avoir besoin '.

Il paraît que Marmont, dans ce moment, commandait temporairement à Alexandrie; il choisit

'Lettres de Bonaparte à Bracewich et au général commandant à Alexandrie, du 9 brumaire an VII.

TOME II. -GUERRE D'Égypte.

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