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de l'ennemi. Les Mamlouks, supérieurs en nombre, chargèrent avec la plus grande impétuosité les Français sur toutes les faces et les enveloppèrent. Ne pouvant rompre les carrés, ils se jettèrent avec fureur sur le petit peloton de droite, commandé par le capitaine Valette, et le culbutèrent, Valette ayant ordonné à ses soldats de ne tirer qu'à bout portant, ce qui n'arrêta que trop tard l'impulsion des Mamlouks. Le feu du grand carré ne leur permit pas de profiter de cet avantage. Mourad reconnut la faute qu'il avait faite de diviser ses troupes pour tourner les Français. Il réunit tous ses cavaliers, démasqua son artillerie, et revint à la charge sur un seul front. On les attendit avec le plus grand sang-froid, et, lorsqu'ils furent arrivés à dix pas de la ligne, les grenadiers les reçurent par une fusillade meurtrière et croisèrent leurs baïonnettes. Les plus intrépides de ces cavaliers, ne pouvant se résoudre à fuir, vinrent mourir dans les rangs, après avoir jeté leurs masses et haches d'armes, leurs fusils et leurs pistolets à la tête des Français. Plusieurs d'entre eux, ayant eu leurs chevaux tués, se glissèrent, le ventre contre terre, sous les baïonnettes, pour couper les jambes des soldats. En vain Mourad tenta de nouvelles charges; il ne put rompre le carré; mais ces attaques réitérées coûtaient beaucoup de monde aux Français l'artillerie des Mamlouks causait de grands ravages dans les rangs serrés de leurs adversaires. Desaix jugea dangereux d'opérer sa retraite sur ses barques. Il eût fallu d'ailleurs abandonner un grand nombre de blessés. Dans

cette situation critique, ce général vit qu'il fallait combattre jusqu'au dernier homme. Il demanda conseil au général Friant qui était à ses côtés. Celui-ci, lui montrant la batterie ennemie, répondit: « C'est-là qu'il faut aller, nous y trouverons la victoire ou la mort.-C'est aussi mon intention, répliqua Desaix; mais nos malheureux blessés ?...Si je suis blessé, s'écria Friant, qu'on me laisse sur le champ de bataille ! » Desaix le serra dans ses bras, ordonna de marcher en avant, et fit battre le pas de charge. Ce mouvement fut brillant et rapide comme l'éclair. Les Arabes et les fellâh épouvantés se dispersèrent. Le général Friant qui commandait l'attaque, entra dans les retranchemens, et fit pointer l'artillerie sur les Mamlouks. Mourad-Bey, après avoir eu 3 de ses beys tués, 2 de blessés, et avoir perdu beaucoup de monde, s'enfonça dans le désért, et gagna le lac Gharaq, dans le Fayoum. Les Arabes l'abandonnèrent.

L'ennemi perdit dans cette journée un grand nombre d'Arabes et de fellâh et 400 cavaliers d'élite. Aucun Mamlouk ne fut trouvé vivant sur le champ de bataille; ils avaient combattu jusqu'au dernier soupir. Ce succès coûta cher aux Français; ils perdirent 340 hommes et eurent 150 blessés. Le chef de brigade Conroux, Rapp, aide-decamp de Desaix, les capitaine Valette, Sacro et Geoffroy se couvrirent de gloire; le maréchal-deslogis Rousseau et le sergent Jérôme rendirent des services importans en pointant l'artillerie. En un mot, cette poignée d'hommes, assaillie par une armée six fois plus nombreuse, fit des prodiges,

et la victoire de Sédiman fut un des faits d'armes les plus glorieux de l'armée d'Orient pendant son séjour en Égypte. Le surlendemain de la bataille, le général Desaix fit partir les malades et les blessés pour le camp, sous la conduite du capitaine Rapp et du commissaire des guerres d'Aure : plusieurs Mamlouks de Mourad-Bey blessés étaient dans le convoi.

Dès que le général en chef eut reçu la nouvelle de cette bataille, il en publia une relation et l'adressa à tous les généraux pour la faire connaître à leurs troupes Il témoignait sa satisfaction du courage et de la valeur qu'avaient montrés les citoyens Gizard, Petitjean, Chatelain, Claude Tissot, Claude Desmoules et Julien Marchand, simples soldats de l'intrépide 21. demi-brigade. II ordonna que l'ordre du jour et la relation de la bataille seraient envoyés en France, et publiés dans les communes où ils étaient nés '.

Le 17 vendémiaire, Desaix se rendit avec sa flottille à El-Lahoun, à l'endroit où le canal Joseph perce la chaîne libyque pour entrer dans le Fayoum et y répandre les eaux du Nil par une multitude de petits canaux. Ce point est pour ainsi dire la porte de cette province. On y voit une énorme pyramide en brique, que l'on croit avoir été construite par le roi Asychis. Desaix y plusieurs barques de Mamlouks chargées de vivres. Il entra ensuite dans le Fayoum. Excepté du côté d'El-Lahoun, cette contrée est partout ceinte

'Ordre du jour du 28 vendémiaire an VII.

trouva

par des montagnes, et forme un bassin entièrement séparé de celui du Nil. Là, dit-on, se trouvait autrefois le lac Moeris, dont plusieurs savans ont cru reconnaître les vestiges dans le BerketQeroun, vaste lac situé dans la partie septentrionale du Fayoum. Cette province occupe l'emplacement de l'ancien nome arsinoïte; sa capitale est Medineh-Fayoum, située non loin des ruines d'Ar

sinoë.

L'inondation des campagnes ne permettant pas de poursuivre Mourad-Bey, Desaix résolut d'attendre dans le Fayoum la retraite des eaux. Pendant ce temps-là, il organisait la province, parcourait le pays pour lever des impositions et des chevaux; il éprouva beaucoup d'obstacles, car Mourad avait défendu avec menaces aux habitans de payer les Français et de se soumettre à leur

autorité.

Tandis que Desaix se reposait avec sa division dans le Fayoum, Mourad-Bey soufflait la révolte parmi les pacifiques habitans de cette province. Il répandait le bruit qu'Alexandrie était tombée au pouvoir des Anglais, et qu'il fallait exterminer tous les Français. Il avait envoyé 150 Mamlouks et des Arabes pour soulever les villages. Desaix partit de Medineh-Fayoum, le 16 brumaire, pour réprimer l'insurrection. Il laissa dans cette ville. une garnison de 350 hommes, la plupart atteints d'ophtalmie. Tous les villages rentrèrent dans l'obéissance, excepté celui de Cheruneh, dont les habitans, excités par le kachef Ali et ses Mamlouks, attaquèrent l'avant-garde de Desaix. L'en

nemi perdit 15 hommes; le village fut pris, livré au pillage et brûlé.

Pendant l'excursion de ce général, Mourad-Bey avait envoyé environ 1000 Mamlouks sur Medineh-Fayoum; ils traînaient avec eux des Arabes et des fellâh. Ils s'y présentèrent le 18, au nombre de plusieurs milliers. La place était commandée par le chef de bataillon Eppler; Robin, nommé général de brigade depuis la bataille de Sédiman, s'y trouvait malade de l'ophtalmie. La ville, ouverte de tous côtés, fut envahie par cette multitude. Les Français se réunirent et se retranchèrent à la hâte dans la maison de l'hôpital, où

il

y avait 150 malades. Dès que l'ennemi fut à portée, tandis qu'une réserve le fusillait par les fenêtres, deux colonnes commandées par les chefs de bataillon Eppler et Sacro, se jetèrent sur lui à la baïonnette, le culbutèrent, le frappèrent d'épouvante, en firent un carnage affreux, et le poursuivirent jusqu'à une lieue de la ville.

Desaix, instruit pendant sa tournée des dangers qui menaçaient Medineh-Fayoum, s'était mis en marche pour venir au secours de cette ville. Il y arriva le 20 brumaire et apprit la victoire aussi glorieuse qu'inespérée de la brave garnison. Il en profita pour quitter le Fayoum et faire de nouvelles courses dans la province de Beny-Soueyf et le territoire de Minieh, et y disputer la levée des contributions à Mourad-Bey qui y faisait de son côté des incursions pour les percevoir. La ville de Beny-Souçyf devint la principale place d'armes des Français dans la Moyenne - Égypte.

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