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CHAPITRE IX.

Négociations à Paris avec le prince de Schwartzemberg

DANS les premières conférences avec le duc de Bassano, le prince de Schwartzemberg se renferma dans les termes précis de sa mission politique. « Les intérêts de l'Autriche et de la France n'avaient jamais offert plus de points de contact sous des rapports importans. Il s'agissait exclusivement de l'intérêt propre des deux pays que tant de liens unissaient étroitement. Il ne devait s'élever aucun nuage à cet égard; toute idée contraire aux intentions les plus pures et les plus amicales de l'empereur François devait être soigneusement écartée; il n'était dirigée que par les vues les plus conformes au bien-être mutuel des deux états, et l'attachement invariable qu'il portait à la personne de l'empereur et à sa maison reposait sur des rapports indissolubles; mais les circonstances étaient graves elles offraient à la fois toutes les chances de repos et tous les élémens de troubles dont les suites étaient incalculables. La position particulière de l'empereur d'Autriche exigeait de sa part la plus sérieuse attention; mais ses devoirs, comme souverain d'un grand empire,

se trouvaient dans l'accord le plus parfait avec les véritables intérêts de la France. Si l'empereur Napoléon en était aussi convaincu qu'il devrait l'être, cette certitude le porterait à voir dans toutes les démarches faites jusqu'à ce moment par la cour de Vienne et dans la suite qu'elle était dans l'intention de leur donner, l'unique désir de procurer les résultats les plus conformes aux vœux réciproques des deux souverains. >>

Le duc de Bassano s'autorisait de déclarations aussi formelles, pour amener l'ambassadeur à reconnaître que les deux puissances restaient dans les termes de l'alliance, pour la paix comme pour la guerre. Pour la paix, l'intervention de l'Autriche était non-seulement agréée, mais la France s'étudierait à entrer dans ses vues par des sacrifices dont l'étendue ou les limites paraîtraient à l'empereur d'Autriche lui-même, fondée sur le désir le plus sincère d'arriver au but commun. Son allié connaissait déjà ses dispositions à cet égard, et leur avait plusieurs fois rendu justice. Elle n'attendait que le moment de les mettre au grand jour dans une négociation qu'elle aurait desiré de voir s'ouvrir avant que les hostilités recommençassent, et pour la quelle elle nommerait un plénipotentiaire aussitôt que ses ennemis, en réponse aux instances de l'Autriche, consentiraient à en nommer de leur côté. Quant à la guerre, le prince de Schwartzemberg ne pouvait décliner

l'alliance, puisqu'en déclarant formellement à l'empereur que le contingent était toujours à ses ordres, il venait de reconnaître qu'elle existait toujours; mais lorsqu'il s'agissait de savoir si, dans le cas où l'obstination des ennemis rendrait sans effet l'intervention de l'Autriche pour la paix, celle-ci mettrait dans la balance un plus grand nombre de troupes, ainsi que ses armemens lui en donnaient le moyen, le prince de Schwartzemberg évitait de s'expliquer, et ne parlait des préparatifs de l'Autriche, que comme des démonstrations destinées à appuyer son intervention pacifique, en imposant aux puissances dont les dispositions ne s'accorderaient pas avec celles que la France ne cessait de manifester. Dans toutes les conférences, le ministre revenait sur ces assurances désirées, sans se dissimuler qu'il ne les obtiendrait pas, et l'ambassadeur éludait de s'expliquer sur ces mêmes assurances qu'il ne voulait pas refuser, mais qu'il avait ordre de ne pas donner.

Des circonstances plus ou moins inattendues par l'un et par l'autre mirent enfin le prince de Schwartzemberg dans la nécessité de s'expliquer.

La correspondance de M. de Narbonne avec le duc de Bassano présentait, sous des formes plus tranchantes, la marche progressive du cabinet de Vienne. La promptitude avec laquelle le nouvel ambassadeur avait surpris les véritables inten

tions de l'Autriche, donnait chaque jour plus d'activité à sa pénétration et en même temps plus de vivacité à ses relations avec M. de Metternich. Aussi ce ministre, forcé de s'expliquer sur ce que ferait le corps auxiliaire du prince de Schwartzemberg, n'avait pas fait difficulté de répondre « L'Autriche veut la paix, elle se prépare à y forcer si on n'accepte pas ce qu'elle croira acceptable. » L'empereur François venait en peu de jours de passer rapidement de son rôle d'allié à celui de médiateur, et du rôle de médiateur à celui de dictateur européen. L'Autriche, qui n'avait pas livré un combat, qui n'avait rien risqué, qui n'avait rien perdu, prenait déjà un ton de supériorité vis-à-vis de la France, comme si c'était elle qui venait d'en triompher. Son ministre répétait toujours à la vérité, que toute sa partialité serait pour la France dans les negociations; mais en même temps il ne pouvait s'empêcher de convenir que toutes les passions étaient hostiles pour la France, que son gouvernement pouvait à peine lutter contre l'opinion. L'Autriche veut attendre l'événement, disait M. de Narbonne, et la victoire la décidera. « Vous vous trompez, répondit M. de Metternich, nous parlerions le lendemain d'une victoire d'un ton plus prononcé. Les autres parties du plan de la médiation autrichienne se développèrent successivement: Une attitude prononcée pour une paix continentale,

dans le cas d'un refus de l'Angleterre ; opinion prononcée pour l'établissement d'une puissance intermédiaire respectable. Il était clair que cette puissance serait la Prusse, qui attendait aussi le résultat des négociations du prince de Schwartzemberg. Cette idée ancienne et vraiment européenne revient, dans la situation actuelle de l'Europe, comme une accusation contre ceux qui la réclamaient alors comme une haute nécessité. « La situation des choses, disait M. de Metternich, ne permet plus à l'Autriche de ne prendre part aux événemens que comme auxiliaire; deux partis : ou se neutraliser derrière la frontière, ou prendre part à la guerre. Ce parti même ne préjuge rien sur les bases de l'alliance, puisque l'empereur Napoléon lui-même a reconnu que les stipulations de secours limités du traité d'alliance ne peuvent s'appliquer aux circonstances actuelles. » Cela était vrai, mais l'empereur Napoléon n'était pas convenu que la retraite du contingent autrichien, son auxiliaire, serait suivie de la marche d'une armée autrichienne contre lui, s'il n'acceptait pas ce que l'Autriche croirait devoir être accepté. Pour adoucir apparemment ce que ce dernier principe avait évidemment de trop rigoureux contre l'alliance, M. de Metternich déclarait encore que le poids de la puissance autrichienne serait mis dans la balance en faveur de la France, si les alliés avaient des prétentions trop exagérées.

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