Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

que le Roi en fait, soit du consentement qu'il y donne, la signature même du Roi et le contre-seing d'un ministre; la simple parole de celui-ci ne peut ni ne doit suffire; les plus graves inconvéniens ne tarderaient pas à naître d'une pratique qui se contenterait du consentement du Roi donné verbalement par un ministre. C'est donc un stricte devoir pour les chambres de suivre avec scrupule des règles et des formes destinées à prévenir de trop funestes écarts.

La chambre des députés, qui ne pouvait ignorer des faits et des principes, a donc commis une première inconstitutionnalité en délibérant sur des amendemens qui ne lui parvenaient pas sous les formes voulues par les articles 16 et 17 de la charte, organisés par l'article 2 du titre 3 du réglement.

Mais une infraction non moins excusable, et, s'il se peut, plus formelle, résulte de ce qu'au mépris de la seconde partie, si précise, de l'article 46, et malgré l'observation de deux membres, consignée au procès-verbal, elle a délibéré sur ces amendemens sans les avoir renvoyés et discutés dans les bureaux. Il se présente ici deux observations; la première porte sur la gravité de cette infraction à la charte. Il est de la plus haute importance que les amendemens passent dans les bureaux comme la loi elle-même. Un amendement peut absolument changer le sens, le fond et la nature du projet de loi; par conséquent il ne doit pas être réfléchi avec moins de maturité. Sans la tutélaire précaution du renvoi, on pourrait dénaturer une loi, et rien ne mettrait en garde une

grande assemblée contre une telle précipitation. Si l'amendement de l'article 22 avait été envoyé dans les bureaux, on aurait certainement senti la nécessité de coordonner la loi toute entière.

L'objet de ma seconde observation est d'appeler toute votre sévérité sur cette infraction faite à la charte par la chambre des députés. A peine deux mois se sont écoulés depuis que le Roi nous à accordé cette charte que nous avons juré d'observer et déjà la chambre des députés a perdu de vue ce bienfait et ses engagemens.

A quoi ne devez-vous pas vous attendre, chambre des pairs, appui du trône, j'oserais presque dire pro vidence de la nation! on viole aujourd'hui la charte pour plaire à un ministre, et demain vous la verrez violer pour le renverser. Craignez de ne pouvoir un jour arrêter ce torrent, si vous souffrez qu'il franchisse ses digues. Dans votre adresse au Roi, vous avez dit, en parlant de la constitution : « Sire, la » est votre force et la nôtre; » l'auriez-vous oublié ? Si ces paroles mémorables sont gravées dans vos cœurs, comme dans celui de tous les Français qui vous ont applaudis, donnez au Roi, par un grand et salutaire exemple, le témoignage de votre profond res-pect pour cette charte , que vous tenez de sa bonté ; repoussez de vos délibérations un acte frappé de nullité par la chambre même des députés.

J'ai prouvé, Messieurs, quele projet de loi, 1o. pé*chait contre le sens et l'esprit de la constitution 2o. qu'il avait été délibéré contre la disposition fox

melle de l'article 46. C'est en conséquence de ces deux inconstitutionnalités si palpaples, que je demande la question préalable sur le projet de loi, comme sur un acte nul par inconstitutionnalité, lequel acte ne saurait conserver encore le nom de projet de loi, et ne peut être conséquemment l'objet de vos délibérations.

Un membre (M. le comte Abrial) prend la parole pour développer une opinion contraire à celle du préopinant. Il pense que le projet de loi doit être adopté; et pour arriver à cette conclusion, il s'attache à prouver trois choses: 1°. que le projet, tel qu'il est soumis à la chambre des pairs, ne présente plus la censure que comme une mesure de prudence, comme une loi de circonstance qui tend à modifier temporairement, et non à détruire pour toujours la liberté

de la presse; 2o. que la constitution permet de faire

cette loi temporaire, si les circonstances le comman. dent; 3°. 3°. que les circonstances exigent en effet que la liberté de la presse reçoive momentanément quelques restrictions.

L'orateur ne prouve nullement la première proposition; il ne prouve pas mieux la seconde, que du reste on n'a presque pas contestée; et il ne cite aucun fait à l'appui de la dernière.

Séance du 30. MM. les pairs se réunissent à une heure; ils entendent la lecture du procès-verbal; et la discussion du projet de loi sur la liberté de la presse, continue,

M. le duc de Lévis énonce son opinion en peu de mots; il propose de substituer un nouveau préambule à celui qui se trouve en tête du projet; du reste il ne voit rien dans la loi proposée qui puisse exciter ses alarmes, et il n'en fait aucune critique.

M. le duc de Praslin ne partage point les sentimens de M. de Lévis : il démontre que la loi est évidemment inconstitutionnelle dans la plupart de ses dispositions, et dans la forme sous laquelle la chambre des députés l'a adoptée; il examine ensuite si la chambre doit suspendre l'exercice de la liberté de la presse.

Si ce projet est contraire à la constitution, dit-il, devez-vous, pouvez-vous ainsi suspendre la constitution, et voter un projet qui la renverserait ?.

Non, sans doute, vous n'irez pas donner un si fatal exemple, vous n'irez pas ébranler et détruire la confiance publique, mettre en doute toutes les garanties données si généreusement par le Gouvernement paternel sous lequel nous avons le bonheur de vivre.

Eh quoi! les partisans de la censure accusent la liberté de la presse d'avoir, par des écrits incendiaires, anéanti, détruit la constitution à peine publiée; et pour obvier à un pareil inconvénient, ils vous proposent de la suspendre!

Qui peut motiver une pareille infraction à cette charte révérée? La crainte chimérique des factions, des partis à peine comprimés, et qu'on vous présente comme prêts à embrâser la France des fureurs de l'anarchie.

Je ne vois, je ne connais qu'un parti, c'est celui du Roi, de Louis-le-désiré ; je vois tous les Français entourant son trône et prêts à le défendre au péril de leur vie, contre quiconque voudrait y porter atteinte.

Les circonstances ne permettent pas encore, dit-on, de faire jouir la France de la liberté de la presse ; sontelles changées depuis le 4 juin, depuis que Sa Majesté vint nous garantir le bienfait de cette liberté ? Quel moment fut au contraire plus favorable pour faire l'essai de cette liberté, tous les cœurs, tous les esprits n'ayant qu'un même but, celui de seconder les vues paternelles et bienfaisantes d'un Gouvernement qu'ils savent apprécier? On vous parle de fermentations; les agitateurs ne sont pas tranquilles; ils travailleront dans l'ombre, dit-on, tant qu'on discutera la liberté de la presse; mais si le projet est rejeté, un effroyable débordement de libelles prêcheront l'anarchie. Malheur à l'homme de bien, anx ministres !

Je ne sais pourquoi ces agitateurs auraient attendu si long-temps; et, lorsque la carrière était libre, pour. quoi n'auraient-ils pas publié ces écrits redoutables? Il me semble au contraire qu'ils n'auraient pas dû attendre que le Gouvernement s'affermissant, devînt de plus en plus inattaquable. Eh quoi ! les ministres, les honnêtes gens pourraient courir tant de dangers s'ils se trouvaient attaqués par quelques insensés ? Les Français sont-ils donc un peuple de brigands, au milieu desquels l'honneur, la probité soient exposés

« ZurückWeiter »