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eurent-ils transpiré au-dehors, qu'en les rapprochant des circonstances déjà connues, on commença à concevoir d'étranges soupçons.

Jean Debry et Rosentiel étoient précisément ceux qui, la veille, avoient rejetté si hautement l'offre d'une escorte, qui avoient insisté pour que le départ eût lieu pendant la nuit; et eux seuls de la légation avoient été épargnés. L'empressement de Jean Debry à se nommer aux meurtriers; la confiance avec laquelle il s'étoit jetté dans leurs bras, le ménagement avec lequel on l'avoit frappé, sans lui faire presqu'aucun mal tandis qu'on avoit mis en pièces ses collè gues; la précaution qu'il avoit prise d'avance de se plastroner de tant d'habits et de gilets, tout sembloit autoriser des conjectures, à l'appui desquelles venoient encore d'autres

souvenirs.

On se rappeloit qu'avant l'arrivée de Jean Debry à Rastadt, on s'y étoit beaucoup loué de Bonnier et de Roberjeot; que leurs dispositions pacifiques, avoient déplu au directoire français, qui en conséquence leur avoit adjoint Jean Debry comme un surveillant; que depuis ce temps, celui-ci, avec le se

crétaire Rosentiel, possédoient seuls toute la confiance de leur gouvernement, dictoient impérieusement toutes les démarches aux deux autres plénipotentiaires, et les forçoient de signer toutes ces notes provoquantes qui exprimoient des prétentions si insoutenables, et qui ont enfin nécessité la guerre.

On savoit que depuis quelques mois, surtout, Roberjeot et Bonnier ne dissimuloient plus l'indignation qu'ils ressentoient du rôle qu'on leur faisoit jouer, et qu'ils se plaignoient sans cesse de ce qu'on avoit voulu rendre la paix impossible; on savoit notamment qu'environ quinze jours avant leur départ, ils avoient dit à Rosentiel, dans un moment d'humeur, qu'ils n'attendoient que leur retour en France pour dénoncer au corps législatif la politique extravagante du directoire, son éloignement pour toute conciliation, et ces instructions par lesquelles il leur ordonnoit d'exiger toujours quelque chose de plus qu'on ne leur voudroit accorder, afin de forcer la rupture. Ce dernier propos paroissoit à tout le monde avoir été la cause de la mort de ces deux infortunés, et l'on ne trouvoit pas d'autre moyen d'ex

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pliquer pourquoi les assassins s'étoient attachés à eux seuls, etc......

Nous laisserons à nos lecteurs le soin de prononcer entre ces deux versions, et nous continuerons l'examen des suites du 18 fructidor.

CHAPITRE XXIII

Projet extravagant d'un nouveau partage de l'Europe, lequel en cachoit un autre plus profond.

« J'ai vu que leurs honneurs, leur gloire, leur richesse
Ne sont que des filets tendus à leur orgueil;

Que le port n'est pour eux qu'un véritable écueil;
Et que ces lits pompeux, où s'endort leur mollesse,
Ne couvrent qu'un affreux cercueil. »

J. B. Rousseau.

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VERS le mois de frimaire il parut dans les journaux, connus sous le nom d'officiels, un projet de partage de l'Europe pour servir de base aux négociations de Rastadt. On le supposoit venir de Hambourg, mais à son but comme à son style, on reconnoissoit aisément la fabrique d'où il sortoit.

Nous allons en donner un extrait, en y joignant quelques réflexions, pour mettre nos lecteurs en état de prononcer en connoissance de cause sur les intentions ultérieures des propagandistes.

« Autant qu'il sera possible, les états de

l'Europe recevront des frontières marquées

par

la nature. »

(Ces frontières marquées par la nature, exhalent une odeur révolutionnaire, à laquelle il n'est plus possible de se méprendre, quand on a lu le rapport sur la réunion de la Belgique, les observations sur l'Italie, les discours de Merlin et autres ouvrages de même nature.)

Je me souviens qu'Auguste aussi voulut donner à l'empire romain des bornes fixées par la nature.

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« Auguste, dit Tacite, laissa à ses successeurs, comme la portion la plus utile de son héritage, l'avis important de resserrer l'empire dans les bornes que la nature sembloit avoir fixées; savoir : à l'occident la mer Atlantique, le Danube au nord, l'Euphrate à l'orient, et au midi les sables brûlans de l'Afrique.

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Que la nature eut ou non fixé des bornes à un empire quelconque, Tacite a au moins la modestie d'hésiter en les rappelant, lui qui tranche ordinairement les questions; et il faut avouer que celles qu'il fait assigner par Auguste à l'empire romain, sont d'une grande magnificence, et telles que dans l'uni

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