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CHAPITRE XXII.

Congrès de Rastadt.

<< Quand ils avoient plusieurs ennemis sur les bras, ils accordoient une trêve au plus foible, qui se croyoit heureux de l'obtenir comptant pour beaucoup d'avoir différé sa ruine. »

Grandeur et décadence des Romains, chap. VI.

Ce fut sous les auspices de la terreur qu'inspiroient encore nos armes, que s'ouvrit le congrès de Rastadt. Ce fut là que les nombreux plénipotentiaires des princes d'Allemagne, vinrent recevoir humblement les insolentes remontrances et les notes laconiques que le directoire français daignoit leur faire passer par les siens....

Les plans qu'on y discutoit étoient arrêtés d'avance à Paris; l'impulsion générale étoit donnée aux trembleurs;les promesses étoient séduisantes pour les ambitieux, les obstacles prévus, les souverains sans union, et la démocratie prête à dissoudre le corps germanique.... Ecoutons ce qu'en dit M. MalletDupan. ( Mercure Britannique, No. 6.)

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«Qu'à la suite des brigandages de la république française, il soit resté une pensée de paix possible dans aucune téte, un négociateur à Rastadt, un illusion sur l'avenir; il faut chercher l'explication de ce phénomène dans l'effet d'une terreur sans bornes, et des poisons qui circuloient de cour en cour. En exécutant les armes à la main ses scandaleuses usurpations, (prise de Mayence, de Manheim et d'Ehrenbreisten, et l'invasion de la Suisse) le directoire s'en ménageoit de nouvelles par l'anarchie et l'isolement où il se flattoit de précipiter l'Empire.

Fascinoit il la cour de Vienne par une perspective d'aggrandissement? il avertissoit celle de Berlin de ses projets, en les représentant comme destructeurs de la constitution germanique.

« Offroit-il à celle-ci des extensions de territoire en Bavière ? il promettoit sa protection au duc de Deux-Ponts contre ce démem. brement de son héritage. »

« Le cabinet impérial appercevoit-il ces fourberies, et opposoit il de la résistance? c'est à la députation de l'Empire qu'il adressoit les séductions. On gagnoit les princes séculiers par l'attrait des sécularisations ;

on amusoit le margrave de Baden, le duc de Wirtemberg, le landgrave de Hesse d'Armstad, ou plutôt leurs étranges conseillers par des assurances d'indemnités et de donations aux dépens de leurs voisins.».

La fin de cette ridicule comédie fat telle qu'elle devoit être et qu'elle avoit été prévue par tous les publicistes de l'Europe. Après avoir inutilement fatigué l'attention des spectateurs, les acteurs s'ennuyèrent de leur rôle, et se disposoient à prendre congé réciproquement les uns des autres, au milieu de l'oubli général, quand un de ces événemens inattendus, quoique fréquent dans les révolutions, rappela sur eux l'attention publique.

Les trois plénipotentiaires français, Bonnier, Roberjeot et Jean Debry recurent, le 28 avril 1799, ordre du prince Charles de quitter le territoire de l'armée dans l'espace de 24 heures. Cet ordre leur fut remis à 7 heures du soir; ils étoient prêts à 9..... On leur offrit une escorte; Jean Debry la refusa au nom de ses collègues. Ils sortirent à 10 heures avec leurs secrétaires, leurs domestiques et leurs femmes... Leur marche étoit éclairée par des flambeaux. Ils étoient à

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peine à un quart de lieu de la ville, sur les bords de la Murg, lorsqu'ils furent assaillis par une trentaine de brigands qui tuèrent Roberjeot et Bonnier, et donnèrent 50 coups de sabre à Jean Debry, sans lui faire d'autre mal qu'une légère égratignure au poignet.

Cet assassinat fit grand bruit, mais fut diversement interprêté. Le directoire ne manqua pas d'en accuser l'Autriche, puis l'Angleterre, puis le prince Charles, puis enfin le régiment d'hussards de Szeckler ; il fit crier vengeance par ses députés, ses valets et ses échos; il fit éclater sa douleur par la bouche de ses canons; il ne trouva pas une ame qui voulût la partager, tant le cœur des français s'étoit endurci ! Jean Debry publia une histoire lamentable que tout le monde alue, et qu'il seroit superflu d'analyser.

L'Autriche, de son côté, en accusa le directoire, et fit publier une relation de l'évènément, qui ne ressembloit en rien à celle de Jean Debry. En voici un extrait :

Jean Debry erra toute la nuit, et arriva le lendemain 29 à 7 heures du matin à Rastadt. Une foule immense courut au-devant de lui, autant par un sentiment d'humanité

que par une curiosité naturelle à la multitude. Il étoit accablé de fatigues; ses habits étoient ensanglantés, se plaignoit beaucoup et demandoit du repos.

M. le comte Goertz le fit conduire chez lui, et appela son chirurgien pour lui donner ses soins. Jean Debry fit difficulté de se laisser visiter par un homme de l'art, et se défendit long temps, en disant qu'il n'avoit besoin que de sommeil, et qu'il se feroit panser à Strasbourg. Mais sur les pressantes instances du comte Goertz il se rendit enfin quoiqu'avec beaucoup de peine. Quand on en vint à le déshabiller, on le trouva vêtu d'un habit et d'une redingotte dont le drap et la doublure étoient d'une épaisseur extraordinaire; là-dessous il portoit encore deux grosses vestes et deux gilets; de sorte que pas un des quarante ou cinquante coups dont sa redingotte étoit percée, n'avoit pénétré jusqu'à son corps; il avoit pour toutes blessures quelques contusions au dos et aux épaules, et une légère égratignure au poignet, qui paroissoit avoir été faite avec précaution, et plutôt avec un stilet qu'avec un sabre. Du reste, on ne lui trouva point de fièvre. A peine ces détails

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