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Quel est donc ce gouvernement, disoiton par-tout et jusques dans les faubourgs, qui le premier ose avouer et protéger ouvertement les brigands et les assassins? Qu'avons-nous besoin de directeurs, de députés, d'administrateurs et de généraux, payés à grands frais, si loin de servir à nous défendre contre les dangers de la nature et de la société, c'est d'eux principalement que nous avons à nous garer? Il est temps d'ouvrir les yeux et de nous servir de nos bras; il est tems de ressaisir le glaive égaré dans des mains inhabiles ou scélérates; et si nous devons mourir à la peine, ne mourons pas au moins comme de vils animaux enchaînés dans la tuerie des bouchers. »

Ces plaintes et ces menaces, répétées de bouche en bouche, commençoient à produire plus d'effets ou un tout autre effet que celui sur lequel on avoit compté.

Pour l'atténuer, on publia le 3 pluviòse un arrêté du directoire, « qui ordonnoit au ministre de la justice de poursuivre sans délai les auteurs, provocateurs et complices du délit commis chez Garchi, et d'instruire, de cinq en cinq jours le directoire des progrès de la procédure.

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La contradiction qui se trouvoit entre cet arrêté du 3 pluviôse et le message du 29 nivôse, n'échappa à personne. Comment se faisoit-il que l'assassinat commis chez Garchi, qui n'étoit, quatre jours auparavant qu'un évènement ordinaire et une punition infligée aux royalistes par les républicains fût devenu tout à-coup un attentat horrible qui avoit ses auteurs, ses complices et ses provocateurs, et contre lequel on ne pouvoit prendre trop de précaution, ni armer trop de bras vengeurs?

Pourquoi cette différence dans la nature et les caractères du même fait?

C'est que les points de vue avoient changé dans l'intervalle ; c'est que le directoire, qui n'avoit pas hésité à lâcher des bêtes féroces sur le peuple, hésita devant les vains murmures du peuple.

Ah! si malgré leurs troupes et leurs canons, les tyrans n'en craignent pas moins les bruits populaires, combien nous sommes méprisables de nous en tenir à de vains bruits, de rester prosternés devant cette puissance usurpatrice, et de ne pas briser d'un seul coup ce ridicule ouvrage de nos mains !....

Suis-je donc l'apôtre de la révolte? Non. Je ne suis que l'avocat d'un peuple opprimé.

« Romains qui m'écoutez, disoit en plein sénat un envoyé de la Dalmatie, prenezvous-en à vous-mêmes, si nous sommes révoltés; pour pattre vos troupeaux, vous envoyez des loups.

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Voilà le manifeste de toutes les nations opprimées; voilà ma justification, si j'en avois besoin.

L'arrêté qui ordonnoit la poursuite des assassins étouffa les murmures, que le message avoit excités, mais resta sans effet quant à la poursuite. Le directoire avoit trop besoin des gens de guerre pour en offenser

aucun.

L'insolence des soldats croissoit donc avec leurs privilèges, et leurs privilèges avec le besoin qu'on avoit de leurs services. Au milieu des plaisirs et de l'insouciance de cette ville immense, leur orgueil se nourrissoit de leur importance, et ils savoient bien que les femmes, les filles, les bourgeois, le sénat, les directeurs mêmes étoient à leur discrétion.

Et si pulseris dissimules; nec

Audeas excussos pretori ostendere dentes:

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Mais si le directoire n'osoit pas punir les soldats, il destituoit, il changeoit, il incarcéroit même les généraux qui lui portoient ombrage.

Buonaparte, celui de tous qu'ils craiguoient le plus, parce qu'ils en avoient reçu plus de services, fut contraint par eux de se sauver en Egypte avec une partie de son armée...... Jourdan, Joubert, Brune Championnet et Massena furent tour à tour victimes de cette timide politique.

Il y eut un moment où, révoltés de n'être de entre les mains de quatre avocats que vils instrumens de correction, les généraux se réunirent, conspirèrent, prirent une attitude mutine. Mais les quatre avocats eurent peu de peine à déjouer ce misérable complot, en flattant les uns, en intimidant les autres, et en jettant la défiance dans le cœur de tous.

De cette politique nouvelle dans la conduite du directoire avec l'armée, il en rẻsulta pour lui une grande différence dans son sort final. Au lieu d'être égorgé par les soldats comme il le craignoit, il les livra sans armes et sans généraux à l'ennemi ; il commença par faire piller la Suisse, le Pa

latinat et l'Italie, et puis il livra les pillards au prince Charles et au feld-maréchal Suwarof..... Que lui importoit la vie de 100 mille soldats , pourvu qu'il sauvât la sienne...? et en cela le succès justifia trop bien ses combinaisons. Mais en sauvant leur tête, les directeurs ne purent sauver leur place.... L'indignation publique étoit à son comble; elle éclata le 29 prairial, comme nous le verrons ci-après :

Une crainte généralement répandue, et qui nous paroît trop fondée, c'est la débandade de nos troupes après la paix. Les brigandages qui suivirent la mort de Charles 6, sont l'histoire anticipée de ceux qui suivront la révolution. « Le soldat mal payé, dit Duclos, ne vivoit que de larcing, et regardoit comme un gain légitime tout ce qu'il emportoit par violence. Sous les noms de tondeurs, de retondeurs et d'écorcheurs, il couroient et ravageoient les provinces ; le paysan abandonnoit le labourage, le marchand le négoce, et nul n'osoit voyager; on n'entendoit parler que de vols, d'incendies et d'assassinats. » (Histoire de Louis XI.)

Mais des malheurs plus éminens éloigne

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