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CHAPITRE II I.

Petit commentaire sur un grand rapport, ou réponse au citoyen Bailleul.

IX

Numquid qui multa loquitur, non et audiet? Tibi soli tacebunt omnes, et cum cæteros irriseris à nullo confutaberis?

JOB, ch. 11 vers. 2 et 3.

Six mois après l'événement, dont nous venons de rendre compte, c'est-à-dire, le 26 ventôse, le citoyen Bailleul monta à la tribune et dit :

« On ne cherche point à prouver la lumière, on observe ses accidens, on démontre ses propriétés; c'est ainsi que nous remonterons aux premiers mobiles de la conjuration, que nous suivrons sa marche, ses développemens, et que nous apprécierons ses effets >>...

-On ne cherche point à prouver la lumière: sans doute; mais il faut la voir d'abord et puis la montrer si l'on peut. Puisque le

citoyen Bailleul aime les maximes, en voici une que nous l'invitons à retenir : On peut commencer et finir même un rapport par une sottise brillante; mais en dépouillant celle-ci de son éclat, que restera-t-il au rapporteur?

« Beaucoup de tentatives ont été faites pour rétablir le trône; rien n'a découragé les royalistes, a dit un agent du prétendu roi. Ce témoignage devoit être le texte de toutes nos pensées, la mesure de toutes nos observations >>..

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Vrai ou faux, ce témoignage est et fut constamment la mesure de toutes vos craintes, et le texte de toutes vos déclamations. En cela, rien que de simple. C'est l'agitation des remords, c'est le cri de la conscience, ce sont les roseaux qui, au défaut de voix humaines, crient : Le roi Midas a des oreilles d'âne. Vous avez chassé les propriétaires de leur maison; vous craignez à chaque instant de les rencontrer. Le vent qui murmure vous semble une plainte de leur part; une plainte est une tentative, et une tentative une conspiration...

« On concevra mal les événemens de la révolution, quels qu'ils soient, tant qu'on n'aura pas fait la part des royalistes. Plus qu

moins, ils ne sont étrangers à aucun. Auteurs, sans réserve, de tous les maux de l'intérieur, ils le sont encore de la guerre extérieure. (Page 3).

-Ainsi voilà les royalistes accusés de la guerre extérieure! Ce sont eux qui ont chassé de leurs capitales, les souverains de Naples, 'de Rome, de Toscane, de Sardaigne et de Hollande. Ce sont eux qui ont assassiné Duphot, Roberjot et Bonnier. Ce sont eux qui se sont opposés au traité de CampoFormio, et ont traversé les négociations de Rastadt. Ce sont eux qui ont reveillé la haîne et réuni les forces des rois en annonçant publiquement et prouvant par des faits, qu'en tr'eux et la république il n'y auroit jamais d'alliance ni de compatibilité... Ce sont les royalistes qui ont pillé la Suisse, la Hollande et l'Italie, et révolté toutes les nations par un brigandage inoui, par des proclamations insolentes, et sur tout par la plus insigne mauvaise foi. Assurément Rewbell, Merlin, Lareveillère et Rapinat, doivent quelques remerciemens à Bailleul pour le soin de rejetter leurs crimes sur le compte des royalistes. Ce n'est pas tout les royalistes sont encore les auteurs de tous les maux de l'inté

rieur, et remarquez bien l'attention scrupuleuse avec la quelle leur accusateur dit : les auteurs sans réserve.

Ils sont par conséquent les auteurs cou pables des journées du 5 octobre, du 2 septembre, du 31 mai et du 13 vendémiaire.

Ils ont établi, cela est clair, les comités les tribunaux et les armées révolutionnaires.

Ils ont fait la loi des suspects, celle du maximum, celles des réquisitions, des conscriptions et des proscriptions, etc............

Ils ont désorganisé les armées, vendu les magasins, destitué les généraux, pillé les caisses, perdu les batailles, etc....

Ils ont enfin fait le 18 fructidor contr'euxmêmes; car il sera incessamment démontré que le 18 fructidor a tué la république. Or, qui peut tuer la république, sinon les royalistes ?

Citoyen Bailleul, je cráins que cette dernière conséquence ne vous casse le nez.

« Le royalisme n'osa se montrer sous ses couleurs depuis le 10 août jusqu'au 9 thermidor. Le 9 thermidor sauva la république d'un gouvernement atroce, auquel on ne substitua rien. Alors il exista une vaste anar

chie, un cahos d'idées, de prétentions et d'intrigues. Le royalisme ne s'oublia pas »

-Si le citoyen Bailleuil n'étoit pas un être aussi dégradé sous tous les rapports, nous pourrions prendre plaisir à rappeller par combien de bassesses, par quelles misérables petites intrigues il parvint à être lui-même un des agens les plus actifs de ce gouvernement post thermidorien, qu'il appelle aujourd'hui une vaste anarchie; mais de plus importantes remarques appellent notre attention.

Madame de Stael a déjà remarqué, en parlant de Condorcet, qu'il étoit homme à sacrifier jusqu'à son opinion au succès de son parti.

Elle auroit pu étendre cette remarque à tous les chefs de parti.

Et, quoique nous ne fassions pas à Bailleul l'honneur de le comprendre dans ce nombre, il ne faut pas oublier qu'il n'est ici qu'un simple trucheman, et que c'est la pensée du directoire qu'il nous transmet.

Cela posé, je dis, 1o. que les chefs véritables de la révolution, quels qu'ils soient, se sont toujours mis à l'écart lors des crises; 2°. que. les auteurs apparens de ces crises en ont toujours été les premières victimes.

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