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inattendu doit entraîner dans les transactions et les propriétés, je ne veux pour l'empêcher à présent, que l'intérêt des acquereurs de leurs biens, et la coalition qui en est résultée.

Cet intérêt ne tient pas seulement à la fortune, il tient à la vie des usurpateurs ; car il y en a peu qui indépendamment de la difficulté de s'arracher aux jouissances avec lesquelles ils sont déja très-familiarisés, ne soient en même tems convaincus d'avoir merité la mort, par le fait même et par la forme de leurs acquisitions ; ils croient, sur la parole des directeurs, que la même force qui leur ravira leurs biens sans scrupule, les privera tous de la vie sans exception.

C'est une erreur, mais cette erreur existe, et la dissiper ne sera pas l'affaire d'un jour ; jusqu'ici méme on n'a rien fait pour cela, quoiqu'on ait beaucoup agi dans cette intention. Mais en général les royalistes sont plus confians dans leur cause, qu'habiles à la défendre; ils écrivent et parlent avec esprit, et se conduisent toujours comme des sots. Ce n'est ni avec des épigrammes, ni avec des phrases dorées qu'on fait ou qu'on défait les révolutions.

Le premier effet de la crainte qu'ïnspire le retour des émigrés, est et doit être de réunir, de rallier, de serrer les uns contre les autres, les acquéreurs de leurs biens qui veulent les conserver.

Et leurs efforts seront heureux tant qu'ils auront des complices dans le gouvernement, c'est-à-dire, tant qu'il y aura des gouvernans assez lâches pour assassiner, et assez déhontés pour dépouiller leurs victimes.

d'

II

Il manquoit à l'infamie de leur conduite 'y joindre l'hypocrisie, et de prendre un ton d'humanité avec ceux qu'ils traitoient avec tant de barbarie... Le trait est curieux.

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Emigrés, écoutéz (disoit le rédacteur, 12 février 1798 ), vous avez fui votre patrie, vous ne pouvez plus y rentrer La loi qui vous proscrit, n'est point un acte de vengeance, mais un acte de justice irrévocable».

« Vous n'avez plus de patrie; sachez vous en créer une ».

«Emigrés, entendez la voix qui vous appelle aux bords du fleuve St.-Laurent. Le Canada réclame son affranchissement; soyezen les libérateurs. Précipitez-vous sur ce sol, où des terres fertiles sont ouvertes à la culture, où des mines de fer vous offriront le

double instrument du labourage et de la va

leur, où de vastes forêts peuvent devenir les chantiers d'une marine respectable. Allez vous y former un asyle honorable, et peutêtre nous forcerez-vous un jour à désirer votre bonheur, et à vous seconder dans un projet si généreux ».

On ne sait quel sentiment domine en lisant ces lignes; du mépris ou de l'horreur. Mais il convenoit au directoire français d'arracher aux émigrés la seule ressource qui leur restoit dans la protection des anglais, sous prétexte de leur offrir une vàine indem nité. De tels moyens conviennent à ceux qui, selon l'expression de M. Mallet-Dupan, ne savent que passer du mensonge à l'audace; et des injustices hardies envers les foibles, aux temporisations hypocrites envers les forts.

Mais tels ne furent pas ceux employés par 'Aratus, lorsqu'avec les bannis il fit rentrer la paix dans Sicione; ce ne furent pas ceux de Timoléon à Syracuse, d'Auguste à Rome, de Charles II en Angleterre, de Louis XIV en France, etc... Tous ces princes trouvèrent dans la vraie politique, dans la justice, et surtout dans leur générosité personnelle le

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moyen de concilier les divers intérêts, et d'indemniser les émigrés, sans révolter les acquéreurs de leurs biens.

Mais, que parlai-je de Louis XIV, de Charles II et d'Auguste? l'histoire, à l'école de laquelle se formoient ces princes; l'histoire, qui les instruisit à rendre leurs peuples heureux, en étendant leurs vues dans l'avenir par la comparaison du passé; l'histoire est une leçon perdue pour nos Wandales, qui ne lisent rien, qui ne veulent rien comparer, qui ne songent qu'à vivre dans le présent, et s'embarrassent aussi peu du passé que de

l'avenir.

Le tems n'est pas éloigné cependant, où ce juge inexorable les condamnera aussi impitoyablement qu'ils auront gouverné. Alors il sera prouvé pour tout le monde, comme il l'est aujourd'hui pour nous, que les émigrés Français n'ont point perdu leur seconde qualité par la première, que les femmes, les enfans, les vieillards et les prètres, qui n'ont fui leur pays que pour se soustraire aux poignards, n'ont jamais perdu le droit d'y rentrer, malgré les prétendues loix qui leur en ont ravi le pouvoir.

Alors chacun dira hautement, que tel

directeur n'étoit si cruel envers les émigrés, que parce qu'il craignoit de perdre avec leurs dépouilles la force du sabre qui les lui garantissoit.

Que tel député ne s'étoit emparé de leurs biens qu'après les avoir effrayés par ses dénonciations.

Que tel ministre accueilloit toute dénonciation qui lui promettoit une rançon.

Que tel miserable enfin, qui se vante encore aujourd'hui de sa vertu, recevoit ces rançons d'une main, et livroit de l'autre au bourreau les infortunés dont elle étoit le prix.

Alors chacun s'étonnera comment de l'infamie de ces négociateurs, de la cupidité de ces inquisiteurs, des brigandages de ces députés, des violences de ces directeurs, pouvoit se composer un gouvernement quelconque.

On ne croira guères alors, ni au délire de notre législation, ni à la perversité de nos représentans, ni à la tenue des scélerats, ni à la patience de la nation!

O patience, vertu des sots! combien nous avons besoin de tes secours, et combien nous sommes dociles à tes inspirations!

Ils ne se contentent pas de méconnoître et de fouler aux pieds toutes les loix positives. CHAPITRE

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