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C'est elle enfin qui, pendant dix siècles, a soutenu dans ce pays l'équilibre des pouvoirs, exclu toute puissance rivale, réglé la mesure de l'autorité, et garanti les droits resu pectifs des peuples et des souverains.

Comparez l'ancienne Pologne avec la France. Comparez la France avec elle-même.

CHAPITRE XII I.

Le 18 Fructidor a r'ouvert les boucheries

d'hommes.

Hérite-t-on de ceux qu'on assassine?

CRÉBILLON. RHADAMIS.

Que pourroit faire de plus que les cinq directeurs, le tyran le plus farouche et le plus sanguinaire?

Robespierre régnoit par la terreur. Ils ont régné par la terreur.

Robespierre mutiloit la convention; ils ont mutilé le corps législatif.

Robespierre avoit créé des tribunaux révolutionnaires ; ils ont créé des commissions militaires.

Robespierre faisoit guillotiner les émigrés. Ceux-ci les font fusiller.

Ainsi s'est r'ouverte sans obstacle et sous

une autre forme , l'effroyable boucherie

L

d'hommes que la mort de Robespierre s'embloit avoir irrévocablement fermée.

Ainsi, ce que la politique avoit de mieux constaté, le raisonnement de plus énergique, l'humanité de plus touchant, tout céda à l'influence d'un seul homme, dont la volonté fût plus forte que celle de la nation, et dont les arrêts devinrent les oracles de tous les tribunaux.

Mais cet homme si redoutable et si puissant avoit-il vaincu comme César, ou gouverné comme Richelieu? Lui reconnoissoit-on le génie de Mahomet, ou la force d'Hercule? Disposoit-il des trésors des deux mondes, ou des armées de la république ?

Non, monsieur, c'étoit un misérable avocat sans talent, sans naissance et sans fortune. Il eut pour génie la politesse; pour talens la finesse; et pour excuse ses succès.

Il fut par calcul et par caractère le singé d'Octave, le rival de Tibère, et l'épouvan tail de la France.

Il savoit, comme tout le monde, que pour gouverner un peuple dans son repos, il suffit de s'en faire aimer. Mais, mieux que per sonné, il n'ignoroit pas que pour le contenir

dans les tems d'orage, il suffit de s'en faire craindre. Oderint dùm metuant.

Merlin n'étoit ni républicain, ni royaliste; c'étoit un usurpateur qui trompoit les répu blicains, haissoit les royalistes et faisoit fusiller les émigrés dans l'impuissance de se reconciler avec eux.

Tout ce qu'il est possible de dire en faveur des émigrés, est dit, ou à-peu-près. Ce ne sont pas les lumières; c'est l'humanité, c'est la justice, c'est la force réelle qui manquent à leurs assassins. La foiblesse est toujours cruelle.

A l'éloquent plaidoyer de M. de Lalli Tollendal, plaidoyer qui a présenté la question sous les deux grands rapports de justice et de politique, nous ajouterons ces deux sententieuses pensées de l'auteur des considé rations sur la France.

« L'émigration fut une erreur, et non pas un crime; le plus grand nombre des émigrés croyoit obeir à l'honneur »

« Les émigrés, dont on fait si grande peur aux Français, ne sont rien par le nombre, rien par la force, et avant dix ans, ne seront la haine...

rien par

Mais ne nous dissimulons pas les dif

ficultés qui s'opposent à leur retour actuel

et simultané...

Les gens à hauts projets, pour qui les choses vont aussi vite que la pensée, qui ne connoissent point d'obstacles à leurs desirs, qui confondent leurs théories de sallons avec l'expérience des siècles, qui composent ét décomposent l'univers au gré de leur extravagante imagination, se moquent de notre hésitation, et n'en mettent aucune à dire : changeons d'hypothèse, et les difficultés s'évanouiront.

Moi qui ne veux point changer d'hypo

thèse , parce que je n'aime pas à mégarer dans le labyrinthe des systêmes, moi qui abandonne volontiers la sphère brillante des possibles pour me renfermer dans celle plus bornée des faits, je dis : la cause des émigrés est celle de la justice, mais le temps de la justice n'est pas encore venu.

Sans parler de craintes générales qu'ins pire, n'importe sur quel fondement, le retour d'une classe nombreuse d'hommes irrités et qu'on suppose d'autant plus implacables, qu'ils ont été plus long-tems et plus affreusement vexés; sans parler d'avantage de l'ébranlement presque radical que ce retour

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