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Ou est sa liberté, lorsqu'enchaîné par des dé crets, par des sermens, par l'intérêt, par la peur, il ose à peine émettre son vou? Ou est sa liberté, enfin, lorsque ses tyrans ne cessent de le morceler, et de priver de leurs droits, tantôt une classe entière de citoyens, tantôt une autre?...

Si la séduction est plus forte que la menace, il nomme un royaliste; si la menace écarte la séduction, il nomme un jacobin."

Dans les deux cas, le directoire fera sur veiller les électeurs par ses commissaires.

Les électeurs rassemblés de dix lieues de rayon ne se connoissent point, ne s'entendent point, et ont fort envie d'achever promptement leur besogne, quand ils ne reçoivent pas d'argent pour l'allonger ou la troubler. Comment s'y prendront-ils ?

Si l'opinion est uniforme dans l'assemblée, ils choisiront ceux d'entr'eux qui, plus hardis, plus intrigans ou plus riches que les autres, se mettront en évidence en faisant valoir sans pudeur des services qu'ils n'ont pas rendus, des talens que personne ne leur reconnoît, des promesses magnifiques qu'ils ne tiendront jamais.

Si les opinions sont partagées, la minorité

se taira, si elle est honnête; et alors les honnêtes gens ne seront point représentés: cabalera, protestera, se retirera même si elle est factieuse, et fera de son côté une nomi nation pour valoir ce que de raison.

Si de ces deux nominations aucune ne convient au parti triomphant (soit qu'on le place au Luxembourg, soit qu'on le suppose au palais Bourbon, toutes les deux seront cassées sans scrupule, sous prétexte d'un défaut de formes, qu'il est toujours facile de prouver quand on fait les formes.

Si l'une des deux est admise (et à coup sur ce ne sera pas celle qui offrira quelqu'énergie dans le systême d'opposition), les députés arrivent à Paris, et viennent prendre leurs places aux conseils. La première de leurs opérations est de choisir un directeur.

Le conseil des cinq-cents fait sa liste décuple. A côté de huit noms obscurs ou ridi cules on est étonné de voir paroître deux noms célèbres, chacun dans son parti.

Mais l'étonnement cesse quand on voit que le conseil des anciens a la main forcée par

cette manœuvre.

Le conseil des anciens, balotté tour-à-tour par l'ambition de mener, et par la crainte

d'être proscrit, ne manquera pas de nommer celui des deux qui pèsera davantage dans là balance des intérêts; savoir: Barthelemi dans les tems de la justice, et Merlin dans ceux de la tyrannie, et n'aura qu'obtempéré aux ordres d'un parti, et suivi l'influence du vainqueur.

Voilà, sans parler des scènes intermédiaires, des démissions forcées, des déportations brusques, des secousses pénibles, des violences impunies, des intrigues scélérates, des marchés scandaleux, de l'immoralité la plus profonde et la moins dissimulée; le produit, en dernière analyse, de ces éléctions tant redoutées des uns et tant desirées par les

autres.

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Voilà la base ét le voile de ce prétendu gouvernement représentatif élevé par ses auteurs au-dessus de tous les gouvernemens, et vanté comme le chef d'œuvre de l'esprit humain.

Sans doute il pourroit donner d'utiles rẻsultats dans un pays de go à 100 lieues carrées, peuplé d'habitans sages et vigoureux. Sans doute il a pu séduire, dans sa théorie, quelques hommes de bonne-foi... Mais c'est une chimère dans un pays aussi étendu que

la France, et au milieu d'un peuple pourri de vices et de lumières.... Ensuite on a pu remarquer que par-tout les brillantes théories sont venues échouer contre l'expérience: et outre qu'il n'est pas permis, sur de simples possibilités de mieux, d'effacer toutes les notions du bien, et de compromettre avec autant de légèreté que de scandale le repos et la vie des générations futures, l'expérience de tout les siècles a démontré les vices et les inconvéniens des élections chez tous les peuples nombreux et corrompus, et l'histoire ancienne et moderne déplore les malheurs de ceux que la force, le hazard, ou de fausses spéculations ont soumis au gouvernement des compagnies, dont l'esprit se perpétue d'âge en âge avec les erreurs ou les forfaits qui accompagnèrent leur naissance.

Les circonstances et les hommes changent, sans apporter aucun changement à la mauvaise manœuvre qui porte le vaisseau sur des écueils. Les partis se succèdent et les calamités avec eux. Les vainqueurs punissent les vaincus par de nouvelles injustices, et se gardent bien de réformer les anciennes.

Ces réparations, qui supposeroient des remords, nuiroient à la compagnie, et il est de

l'intérêt de ses membres de lui sacrifier la nation toute entière, plutôt que d'avouer ses

torts.

Mais ce qui est aussi singulier que fâcheux, c'est que l'infaillibilité dont se piquent les compagnies gouvernantes, n'a lieu que pour le crime ou la sottise. Elle cesse dès qu'il s'agit de révoquer un arrêté juste, ou de rapporter une loi sage, que le hazard ou l'irréflexion leur arrachent quelquefois.

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C'est à ne point démentir leur marche. première, à ne point s'écarter des principes de leur origine, qu'elles font consister leur esprit de corps. La justice, la raison, les lois, la liberté, les peuples mêmes, disparoissent devant cet esprit inflexible qu'elles appellent tantôt principe, tantôt république, tantôt constitution, tantôt salut du peuple, mais toujours d'un nom mystérieux, et qu'elles savent rendre d'autant plus redoutable, qu'il est moins entendu de la multitude.

Ah! un mauvais prince est un volcan qui s'embrase et s'éteint. Mais une compagnie gouvernante, qui se croit exclusivement chargée des droits et des intérêts de la nation, qui s'est familiarisée avec le pouvoir de disposer librement de nos biens et de nos

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