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odieux et inadmissible, s'attacha moins à le combattre, qu'à relever ce que le discours' de Rouchon avoit de fâcheux contre le 18 Fructidor... « Rouchon s'écria-t-il, a laissé entendre que le 18 Fructidor étoit une fu neste journée. . »

« Je ne l'ai point laissé entendre, reprit froidement Rouchon, je l'ai dit très-posi tivement. >>

Jourdan (de la Haute-Vienne). jura militairement que le projet de Bailleul étoit également absurde et destructeur de la liberté; mais, ajouta-t il, avec plus d'onction; j'aime et j'estime de tout mon cœur les gouvernans qui l'ont conçu, et j'annonce que, et j'annonce que, sacrifiant à mes affections privées et ma conscience et la patrie, je serai le premier à m'y soumettre dès qu'il sera converti en loi. (1) »

Chénier, qui n'attendoit que cette déclaration pour sortir de son coin obscur, s'é

(1) Si nous n'avons pas rappellé précisement le texte, nous avons dit le sens du discours de Jourdan. Il avoit dès lors promesse du commandement de l'armée du Danube, si complétement battue par le Prince Charles... Il falloit bien se prêter aux vues de ceux qui se prêtoient complaisamment aux siennes.

lance â la tribune, embrasse Jourdan, se retourne du côté de la salle et dit :

« Ce projet est le sauveur de la Républi» que et le rempart de la liberté. »

<< Avec ce projet, je ne crains plus ni les << royalistes, ni les anarchistes, ni les escla» ves, ni les tyrans, je suis rassuré sur mon » sort et sur celui des nations. >>

Je marche dans ma force et dans ma liberté (1).

« Nous avons juré haîne à la royauté et à l'anarchie. Ce projet est l'exécution de notre

serment >>.

Et vous, dignes romains, jurez par cette épée, Qui du sang des tyrans sera bientôt trempée, Jurez tous de périr ou de vaincre avec moi (2). -Une voix :

Oui, nous le jurons tous par ce fer et par toi (3).

Plusieurs voix :

Vous êtes orfévre, M. Josse....

Et Chénier, qui sait bien qu'il est poëte

(1) Vers de Timoléon.

(2) Vers de Voltaire."

(3) Ibid.

national, et non pas orfévre, feignit de ne point entendre cette triviale apostrophe, ou crut qu'elle s'adressoit à Bailleul; il descendit de la tribune content de lui et de ses amis. Audouin et Jean Debry parlèrent dans le même sens.. Soumettons-nous devint bien

tôt le cri général.

<<< Avant de nous soumettre, reprit Lamar que, permettez-moi, chers collégues, de verser des larmes sur le tombeau de la liberté. Vous connoissez tous mon patriotisme et mon désintéressement. J'atteste le ciel et la terre que personne ici n'aime son pays plus que moi. Je voudrois bien le sauver; mais une main plus forte que la mienne nous entraîne dans l'esclavage. Ce projet doit y mettre le sceau. Mais pour éviter de plus grands malheurs, je vous conseille de l'adopter

sous,

« Si vous ne l'adoptez pas, s'écria Cras avant huit jours les échaffauds seront redressés, et deux jours après vos têtés sanglantes rouleront dessus. Je n'en dis pas vantage >>.

da

- C'étoit pardieu bien assez pour effrayer des lâches. Tout le monde se rendit, et le projet passa.

Ainsi finit une des plus ridicules comédies

qne

que

des jongleurs politiques aient jamais osé donner aux peuples à pareil prix.

Ce fait et mille autres que tout le monde sait aujourd'hui par cœur, prouvent que le directoire, après le 18 fructidor, s'empara de tous les pouvoirs de la république.

Donc le 18 fructidor a tué la république de fait.

Il l'a tuée encore dans l'opinion, en désabusant tous les français de la chimère du gouvernement représentatif.

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CHAPITRE X.

Le 18 fructidor a désabusé les français de la chimère du gouvernement représen tatif.

Lorsque le peuple de Rome fut corrompu, ce fut la pluralité dés écus ou des meurtres qui détermina celle des suffrages.

J. J. ROUSSEAU.

Tous les ans le peuple se rassemble pour

choisir des électeurs qui choisissent des députés, qui choisissent un directeur.

Cette marche paroît régulière au premier coup-d'œil, et conforme au vœu général ; mais elle n'est au fonds qu'une déception grossière, un vain fantôme que le 18 fructidor a fait évanouir.

les

Le peuple choisit des électeurs! Mais pour choisir ne faut-il pas être libre? Et, ou est sa liberté lorsqu'il est séduit, tantôt par pro. messes mensongères des uns, tantôt intimidé par les provocations menaçantes des autres?

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