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un peuple clairvoyant, toutes ces subtilités ne seront pas mises à nu?... Cela ne peut manquer d'avoir lieu dans la discussion qui va s'ouvrir, et de nuire beaucoup au projet luimême. Avant de faire des lois pour un peuple, il faut s'occuper de le rendre moral, et ne lui présenter aucun sujet de peur ou de reproches. La loi tire sa force du respect qu'elle inspire: si elle est dépourvue de cette sauve-garde, il ne lui reste que la force physique; et cette force, c'est le peuple lui-même qui l'est.

D. De quand date la déclaration de guerre à la loi d'élection?

R. Du Congrès d'Aix-la-Chapelle. L'aristocratie française n'est ici que l'interprète de l'aristocratie européenne.

D. Pourquoi?

R. Parce que la loi d'élection n'est qu'une loi de pouvoir, une question de contrat social: elle ôte le pouvoir à l'aristocratie: celle-ci le redemande à cette loi, comme elle redemande sa supériorité à la loi du recrutement, qui n'est elle-même qu'une loi d'égalité; or, l'aristocratie, par sa nature, veut toujours le pouvoir et jamais l'égalité : cela est dans son

essence.

D. C'est donc le contrat social qui est remis en question?

R. D'un bout à l'autre du monde, tel est aujourd'hui le fond de la question, et ce que l'on finit par y trouver, de quelque côté qu'on la présente. Les anciennes institutions s'en vont, l'art était de les laisser aller doucement. Semblables aux voyageurs dont le repos rétabli les forces, les jouissans des anciennes prééminences, après de longs désastres et un long silence, ont repris courage, et renouvellent le combat. L'opposition n'a pas dû manquer: c'est le choc de ces vents opposés qui trouble l'Europe, et qui cause tout le fracas qui retentit autour de nous. De là sont sortis les partis, et c'est d'eux que nous avons à parler main

tenant.

CHAPITRE V.

Des Partis.

D. Y a-t-il des partis en France?

R. Hélas, oui!.... Cette superbe famille des Français que le ciel a dotée de tant d'avantages, que la nature favorise de tousses dons, eh bien,

la discorde a pénétré au milieu d'elle: c'est aujourd'hui la déplorable famille des frères ennemis, Etéocle et Polynice.

D. D'où proviennent ordinairement les partis?

R. De la faiblesse des Gouvernemens et
des suites des grandes crises politiques.
D. Quel est le but ordinaire des partis?
R. Le pouvoir.

D. Que se disputent les partis en France?
R. Le pouvoir.

D. Y avait-il des partis en France avant 1814?

R. Non, parce qu'il n'y avait dans l'Etat qu'un système et qu'une direction uniforme.

D. Y a-t-il done eu une double direction depuis 1814?

R. Sans doute. Celle de la révolution, et celle de la contre-révolution : elles ont été remises en présence. Il faut même aller plus loin, et dire que la direction était double même dans le sens de la contre-révolution. Le Gouvernement ne voulait pas et n'a jamais voulu celle-ci ouvertement et intégralement. Il sentait tous les inconvéniens d'une pareille tentative : y aurait une extrême injustice à lui ensup

il

poser la pensée. Seulement il tendait à un mélange incompatible, par lui-même, de la révo lution et de la contre-révolution, c'est-à-dire de l'ancien et du nouveau régime. Au contraire, tout le parti de la contre-révolution la voulait dans sa pureté et intégrité, comme il la rêvait à Coblentz, à Bruxelles, à Londres, et dans le faubourg St.-Germain. Voilà ce qu'il faut bien distinguer: ce parti se sépare du Gouvernement, toutes les fois que celui-ci se sépare toutà-fait lui-même de la contre-révolution, parce que c'est la seule chose que ce parti conçoive:c'est ce qui a eu lieu depuis le 5 septembre, lorsque le Gouvernement s'étant fatigué des exigeances de ce parti, et craignant les suites de ses excès, prit la résolution de s'en détacher: celui-ci se déclara en hostilités ouvertes avec ce Gouver nement, proclama le ministère du Roi uné réunion de conspirateurs contre le trône, et entassa sur le Gouvernement formé alors de MM. de Richelieu, Decazes, Lainé et Corvetto, toutes les inculpations dont il cherche dans ce moment à entacher M. le duc Decazes tout seul. L'esprit de ce parti n'est pas susceptible de modifications, et il usera toujours des

mêmes moyens à l'égard de tout ce qu'il trou vera dans son chemin.

D. Qui a pris l'initiative dans cette triste querelle ?

R. Les écrivains soi-disant royalistes. Dès 1814, ils se mirent à fouiller dans le passé, à insulter, à dénoncer, à propager les idées les plus opposées à celles du temps, souvent les plus imprudentes par les questions qu'elles soulevaient. Ces écrits n'ont jamais supporté le frein de la censure. Celle-ci n'a porté que sur leurs adversaires. Depuis deux ans seulement, la Minerve et le Constitutionnel, et je prends ceux-ci pour tous ceux du même parti,

ont joui de la plénitude de la liberté : à moins d'imiter le loup de la fable, on ne peut pas leur imputer le mal fait avant qu'ils ne fussent nés, et quoiqu'ils n'aient pas toujours été des agneaux, cependant on ne peut, sans manquer à toute justice, les assimiler au Conservateur, au Drapeau blanc, et aux autres écrits du parti opposé. Ce sont les hommes de ce parti qui les premiers se sont dit un parti, qui ont rappelé ce mot funeste, et qui ont élevé des drapeaux. L'initiative du mal leur appartient, et

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