Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

les marbres qu'il possédait '. Un colonel avait mission de le surveiller.

La fête du 15 août fit trêve aux douleurs qu'inspirait le sinistre de l'hôtel Schwartzenberg, et trancha les incertitudes où l'on était sur les destinées futures de la

Hollande. Une députation des États de ce royaume étant venue lui présenter ses hommages, Napoléon, toujours habile quand il s'agissait de justifier ses actes, lui parla de la manière suivante :

« Messieurs les députés du Corps LÉGISLATIF, DES ARMÉES DE TERRE ET DE MER DE LA HOLLANDE, ET MESSIEURS LES DÉPUTÉS DE MA BONNE VILLE D'AMSTERDAM, "

» Vous avez été depuis trente ans le jouet de bien des vicissitudes. Vous perdites votre liberté lorsqu'un des grands officiers de votre république, favorisé par l'Angleterre, fit intervenir les baïonnettes prussiennes aux délibérations de vos conseils : les constitutions politiques que vous teniez de vos pères furent déchirées, et le furent pour toujours. Lors de la première coalition, vous en fites partie. Par suite, les armées françaises conquirent votre pays, fatalité attachée à l'alliance de l'Angleterre. Depuis la conquête, vous fùtes gouvernés par une administration particulière, mais votre république fit partie de l'Empire. Vos places fortes et les principales positions de votre pays restèrent occupées par mes troupes. Votre administration changea au gré des opinions qui se succédèrent en France. Lorsque la Providence me fit monter sur le premier trône du monde, je dus, en fixant à jamais les destinées de la France, régler le sort de tous les peuples qui faisaient

1 Londres, Miller, 1812; très-grand in-4o de 142 planches, aux frais du prince.

partie de l'Empire, faire éprouver à tous les bienfaits de la stabilité et de l'ordre, et faire disparaître chez tous les maux de l'anarchie. Je terminai les incertitudes de l'Italie en plaçant sur ma tête la couronne de fer; je supprimai le gouvernement qui régissait le Piémont. Je traçai dans mon acte de médiation les constitutions de la Suisse, et conciliai les circonstances locales de ce pays, les souvenirs de son histoire, avec la sûreté et les droits de la couronne impériale. Je vous donnai un prince de mon sang pour vous gouverner : c'était un lien naturel qui devait concilier les intérêts de votre administration et les droits de l'Empire. Mes espérances ont été trompées. J'ai, dans cette circonstance, usé de plus de longanimité que ne le comportaient mon caractère et mes droits. Enfin, je viens de mettre un terme à la douloureuse incertitude où vous vous trouviez, et de faire cesser une agonie qui achevait d'anéantir vos forces et vos ressources je viens d'ouvrir à votre industrie le continent. Le jour viendra où vous porterez mes aigles sur les mers qui ont illustré vos ancêtres. Vous vous y montrerez alors dignes d'eux et de moi. D'ici là, tous les changements qui surviendront sur la face de l'Europe auront pour cause première le système tyrannique, aveugle et destructif de la prospérité qui a porté le gouvernement anglais à mettre le commerce hors de la loi commune en le plaçant sous le régime arbitraire des licences.

» Messieurs les députés du Corps législatif, des armées de terre et de mer de la Hollande, et messieurs les députés de ma bonne ville d'Amsterdam, dites à mes sujets de Hollande que je suis satisfait des sentiments qu'ils me montrent, que je ne doute pas de leur fidélité; que je compte que leurs efforts se réuniront aux

efforts de tous mes autres sujets, pour reconquérir les droits maritimes que cinq coalitions successives fomentées par l'Angleterre ont fait perdre au continent. Ditesleur qu'ils peuvent compter, dans toutes les circonstances, sur ma spéciale protection. »

Voici dans quels termes Napoléon annonça au sénat conservateur la résolution qu'il croyait devoir prendre :

[ocr errors][merged small]

» J'ordonne à mon ministre des relations extérieures de vous faire connaître les différentes circonstances qui nécessitent la réunion de la Hollande à l'Empire. Les arrêts publiés par le conseil britannique en 1806 et 1807 ont déchiré le droit public de l'Europe. Un nouvel ordre de choses régit l'univers. De nouvelles garanties m'étant devenues nécessaires, la réunion des embouchures de l'Escaut, de la Meuse, du Rhin, de l'Ems, du Weser, de l'Elbe à l'Empire, l'établissement d'une navigation intérieure avec la Baltique, m'ont paru être les premières et les plus importantes. J'ai fait dresser le plan d'un canal qui sera exécuté avant cinq ans, et qui joindra la Baltique à la Seine. Des indemnités seront données aux princes qui pourront se trouver froissés par cette grande mesure, que commande la nécessité et qui appuie sur la Baltique la droite des frontières de mon empire. Avant de prendre ces déterminations, j'ai fait pressentir l'Angleterre; elle a su que le seul moyen de maintenir l'indépendance de la Hollande était de rapporter ses arrêts du conseil de 1806 et 1807 ou de revenir enfin à des sentiments pacifiques; mais cette puissance a été sourde à la voix de ses intérêts comme au cri de l'Europe. J'espérais pouvoir établir un cartel d'échange des prisonniers entre la France et l'Angle

TOME

2

terre, et, par suite, profiter du séjour des deux commissaires à Paris et à Londres pour arriver à un rapprochement entre les deux nations: mes espérances ont été déçues. Je n'ai reconnu, dans la manière de négocier du gouvernement anglais, qu'astuce et que mauvaise foi. La réunion du Valais est une conséquence prévue des immenses travaux que je fais faire depuis dix ans dans cette partie. Lors de mon acte de médiation, je séparai le Valais de la confédération helvétique, prévoyant dès lors une mesure si utile à la France et à l'Italic. — Tant que la guerre durera avec l'Angleterre, le peuple français ne doit pas poser les armes. Mes finances sont dans l'état le plus prospère. Je puis fournir à toutes les dépenses que nécessite cet immense empire sans demander à mes peuples de nouveaux sacrifices. "

Le jeune roi de Hollande occupait alors, avec son frère, un pavillon du château de Saint-Cloud. Dès que l'Empereur eut appris l'abdication de Louis, il avait envoyé à Haarlem un de ses aides de camp, chargé de l'amener près de lui; et l'enfant, qui aimait beaucoup l'Empereur, et s'ennuyait de l'étiquette à laquelle on l'assujettissait, s'était hâté d'obéir. Toujours si profondément affectueux pour les fils d'Hortense, Napoléon, cette fois, sembla redoubler de tendresse : « Venez, mon fils, dit-il au jeune prince, je serai votre père; vous n'y perdrez rien. La conduite de votre père afflige mon cœur; sa maladie seule peut l'expliquer. Quand vous serez grand, vous payerez sa dette et la vôtre. Dans quelque position que vous placent ma politique et l'intérêt de mon empire, n'oubliez jamais que vos premiers devoirs sont envers moi, vos seconds envers la France; tous vos autres devoirs, même ceux envers les peuples que je pourrais vous confier, ne viennent qu'après. »

Élevés par leur mère dans cette obéissance absolue, les deux jeunes princes apprirent dès le berceau à ne voir l'Empire que sous l'image de l'Empereur, à bien comprendre la nature d'obligations qu'imposait sa gloire ; et, tout en demeurant respectueusement attachés au comte de Saint-Leu, à n'accepter nulle autre direction que celle du chef dynastique de la famille.

La Suède alors, comme la Hollande, venait s'abriter sous l'égide impériale de Napoléon. En juin 1810, un colonel, Moërner, auquel Bernadotte avait rendu des services pendant la campagne de 1807, se fait annoncer chez lui, rue d'Anjou-Saint-Honoré, et, dans un entretien confidentiel, l'initie au projet qu'ont plusieurs Suédois de le proposer pour remplacer leur prince royal, qui venait de mourir frappé d'une attaque d'apoplexie. Bernadotte reçoit cette ouverture sans y attacher la moindre importance; mais quelques jours après, le baron de Wrède, ministre plénipotentiaire de Suède, vient confirmer ce qu'a dit le colonel Moërner et lui demander une réponse. Le lendemain, Bernadotte se rend à Saint-Cloud, près de l'Empereur, qui lui dit : « Je sais tout; je vous laisse maître d'accepter ou de refuser; je ferai envers vous ce que vous voudrez. J'avais cependant d'autres vues : j'avais chargé Alquier de proposer une régence et d'attendre les événements. Le fils du dernier roi aurait pu être rappelé plus tard; mais en Suède on ne veut plus de cette famille. J'aime mieux vous voir là que tout autre. Je vous appuierai de mon consentement; faites vos démarches '. » Si l'Empereur avait nourri d'autres idées, rien ne l'eût empêché de les produire et d'écarter Bernadotte; car son alliance avec Joseph Bo

1 Paroles rapportées par le général Gourgaud: Examen critique de l'ouvrage du comte Ph. de Ségur.

« ZurückWeiter »