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22 le duc de Bellune poussa une reconnoissance de deux mille chevaux vers Saint-Aubin, où la cavalerie française dirigea le feu d'une batterie sur la cavalerie russe du général Wasiltchikoff; mais la reconnoissance se replia, voyant qu'on ne lui cédoit pas le terrein. Lè 23 le lieutenant-général prince de Tcherbatoff attaqua la ville de Ligny, et la prit de vive force, laissant au pied des retranchemens trois cents hommes tués ou blessés. La brigade française qui s'y étoit vaillamment défendue se jeta dans Saint-Dizier; elle y fut attaquée le lendemain, et repoussée sur Vitry. Le prince Tcherbatoff marcha ensuite vers Brienne pour opérer de nouveau sa jonction avec le corps de Sacken. Le lieutenant-général Lauskoi tint la position de Saint-Dizier avec une avant-garde de huit cents chevaux, pour observer la route de Châlons; il pouvoit se rallier au corps prussien du général York, qui s'avançoit par Saint-Mihiel.

Au milieu de ces mouvemens précurseurs d'actions plus décisives, Napoléon arrive à Châlons-sur-Marne le 26, à onze heures du soir. Voyant le lendemain le désordre, l'horrible confusion qui régnoit dans l'armée; apercevant le misérable état des nouvelles levées mises en

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route dans le plus affreux dénûment, il se frappa, dit-on, la tête, en s'écriant : tout est perdu! Mais se rassurant bientôt à l'aspect martial des vieilles troupes que rien ne pouvoit décourager, au souvenir de la valeur, de la haute intelligence de ses généraux, il part, traverse Vitry-sur-Marne le 27, se porte rapidement sur Saint-Dizier, et fait attaquer immédiatement le lieutenant-général Lanskoï par le corps du maréchal duc de Bellure. Les Russes plient devant la cavaleric française dans deux combats successifs; l'un dans le faubourg même de Saint-Dizier, d'où ils sont chassés avec perte; le général Duhesme culbute si vivement leur arrière-garde, qu'ils n'ont pas même le temps de faire sauter le pont, et se jettent dans les mauvais chemins de SaintDizier à Montierender. A huit heures du matin Napoléon paroît à Saint-Dizier au milieu des chants de triomphe. Toute son armée, forte de soixante mille combattans, manoeuvroit dans cette direction, et par-là il espéroit forcer les alliés à évacuer Bar-sur- Aube, Chaumont et même la Lorraine, en leur inspirant des craintes pour leurs derrières et pour leurs magasins. Arrivé à Saint-Dizier, il balança s'il pousseroit jusqu'à Nancy et

au-delà: il pouvoit en effet, en se rendant maître des Vosges, couper à l'ennemi ses communications avec le Rhin, avec l'Allemagne, et peut-être même l'anéantir au milieu de la France. Ce plan hardi, qui, deux mois après, devoit causer sa ruine, entroit déjà dans ses combinaisons gigantesquès; mais la marche de Blucher, dont il eut alors quelques indices, et l'appréhension de laisser sa capitale à découvert, lui firent prendre la résolution de se porter rapidement sur l'Aube, afin d'entamer l'ennemi par son arrière-garde.

Le dégel retarda la marche des colonnes, et embarrassa les convois; l'armée étoit impatiente, inquiète ; elle eût été découragée sans le succès de Saint-Dizier, qui vint relever la confiance du soldat. L'esprit que manifestoient les habitans des campagnes faisoit espérer d'ailleurs une guerre nationale, et un système de défense analogue yenoit d'être organisé à la hâte sur la ligne d'opération. Dès que l'ennemi se montroit, les cloches sonnoient, et, se répétant de village en village, faisoient connoître la force de l'ennemi au moyen d'un signal convenu. Selon le rapport des paysans, partout où les ennemis se montroient en force ils crioient: Mort à Napoléon! Vive la Régence!

Le 28 l'armée se mit en mouvement, de Saint-Dizier par la forêt de Montierender, route de traverse que les pluies et le dégel avoient défoncée, route presqu'impraticable, même en été. Il fallut des peines incroyables pour y faire passer l'artillerie, et cette première marche fatigua tellement l'armée, qu'elle n'arriva que très-avant dans la nuit à Montierender.

Elle se mit en mouvement le 29 sur Brienne par Longeville; les rapports firent connoître que les alliés étoient passés en force par la route de Doulevant à Paris, en longeant la rive droite de l'Aube; qu'ils s'étoient avancés jusqu'à Brienne, et s'en étoient emparés. Napoléon se montra plus impatient encore de joindre l'ennemi pour le combattre.

Cependant le corps russe du lieutenantgénéral Lanskoï, repoussé de Saint-Dizier, s'étoit replié et rallié à l'armée de Silésie près de Doulevant par Joinville. Le feld-maréchal Blucher venoit de concentrer à Brienne le corps de Sacken, et une partie de celui de Langeron, commandée par le général Alsufieff; il avoit même poussé des corps de cavalerie jusques vers Arcis et vers Troyes, occupé par l'infanterie de la vieille garde. A la première

nouvelle des mouvemens de Napoléon, le généralissime prince de Schwartzenberg avoit réuni près de Joinville le cinquième corps d'armée, sous les ordres du général comte de Wrede, au corps russe du général comte Wittgenstein, pour soutenir le général York qui se trouvoit menacé par la marche des Français sur Saint-Dizier. Le prince royal de Wurtemberg étoit placé avec le quatrième corps entre Bar-sur-Aube et Brienne, et le général Giulay près de Bar-sur-Aube. De Chaumont en Bassigny la grande armée alliée s'étoit mise en mouvement sur la même ville. Le corps du général Kleist devoit passer la Marne près de Saint-Mihiel, le 2 février, pour communiquer avec le général York, chargé de manoeuvrer sur Châlons: tels étoient les mouvemens des différens corps des coalisés. Cependant le feld-maréchal Blucher, instruit par ses éclaireurs de l'apparition des Français à Vassy et à Montierender, et ne pouvant toutefois deviner les véritables intentions de Napoléon, se hâta de concentrer près de Brienne ses forces disponibles; il donna l'éveil au prince royal de Wurtemberg, qui s'étoit ménagé la position de Maisons, et formoit ainsi l'aile droite de l'armée de Silésie.

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