A force d'art et de vains ornemens, N'est qu'un hôtel éloigné de la ville. DE KÉRIVALANT. ODE A M. LEMAIRE, SUR LA MORT de son fils. MUSE aux tendres accords, soutiens ma voix craintive, Et calme, aux sons touchans de la flûte plaintive, C'en est donc fait ! le ciel prive de la lumière Hélas! ce nourrisson des poëtes antiques Mais cet arbre si beau, jeune espoir de Pomone, Père jadis heureux, de cet arrêt funeste Ah! si comme autrefois, un fils de Mnemosyne Frémiraient encor sous vos doigts. Prêts à pleurer d'un fils la jeunesse ravie, Tromper le ciseau d'Atropos. Mais ces douces erreurs et ces rians mensonges Le Dieu de vérité, sous sa forme mortelle De son nom aux humains a montré la grandeur, Loin de nous les regrets dont sa gloire s'outrage! Et portons, en chantant, quelques fleurs de son âge, LALANNES. LE VEU DU LOUP. FABLE. UN vieux loup, tel qu'on n'en voit guère, Dans certain piége un jour se trouva pris, dit-on, Il fit un vœu : la chose est si facile à faire ! En achevant sa patenôtre. A lever un scrupule on dit Qu'un dévot s'entend mieux qu'un autre. ÉNIGME. JE suis une brune piquante, M. LEFILLEUL. De taille svelte, et d'humeur attachante ; Je suis polie, et j'unis quelquefois, Par les liens les plus étroits, N'annonçait pas une telle alliance. J'assemble, par exemple, et le noir et le blanc, En quelque lieu qu'on me promène, Ce n'est qu'avec la corde au cou que l'on me mène. S....... LOGOGRIPHE LE cœur sera toujours le foyer de la vie, Si je le perds, je suis de glace. V. B. (d'Agen.) CHARADE. SANS mon premier, lecteur, le pauvre genre humain. Mon second au rebours est le nom d'un grand fleuve; Il occupe souvent et les doigts et la main; Il fut aussi le nom d'un pontife romain. Par ses propos mielleux à la brune, à la blonde, V. B. (d'Agen. ) Mots de l'ENIGME, du LOGOGRIPHE et de la CHARADE insérés dans le dernier Numéro. Le mot de l'Enigme est Sabot. Celui du Logogriphe est Cloche, dans lequel on trouve loche, Joch et coche. Celui de la Charade est Cure-dent. LITTÉRATURE ET BEAUX-ARTS. LES BERGERES DE MADIAN, ou la Jeunesse de Moise; poëme en prose, en six chants; par Me DE GENLIS. -Un vol. in-12. Prix, 3 fr. 5o c. ou un vol. in-18, prix, 2 fr. 50 c. A Paris, à la librairie française et étrangère de Galignani, rue Vivienne, no 17. Voici, dieu merci, une grande question littéraire de décidée. Un ouvrage en prose peut-il être un poëme ? Est-il permis d'écrire un poëme autrement qu'en vers? Voilà ce qu'on se demandait depuis long-tems. Les parfisans de la prose citaient en vain un passage assez décisif d'Aristote, et deux phrases un peu équivoques de Denys d'Halicarnasse. Les amis des vers ne se rendaient point, l'exemple même du Télémaque ne les ébranlait pas ils refusaient à cet ouvrage une exception que Voltaire et Laharpe n'avaient pas voulu faire. M. de Châteaubriand, lui-même, s'était ouvertement déclaré pour les vers dans la préface d'Atala, lorsqu'il n'avait aucun intérêt personnel dans la querelle, et il avait laissé la question indécise dans la préface des Martyrs, lorsqu'il y était fortement intéressé. Mme de Genlis est plus hardie; sans rien examiner, sans rien prouver, elle intitule tout simplement ses Bergères de Madian, poëme en prose; et le doute se trouve résolu par le fait. Ce qui existe est possible, dit la philosophie scolastique; et qui peut en effet douter de la possibilité d'un poëme en prose, lorsque Mme de Genlis nous en présente un tou fait? t A parler sérieusement, pourquoi ne voudrions-nous pas tolérer les poëmes en prose? Pourquoi ne pas les permettre aux auteurs qui ne savent pas écrire en vers? C'est rejeter un moyen de varier nos plaisirs, comme le disaient si bien les apologistes du drame. Vous nous direz que c'est rendre la carrière trop facile; vous nous citerez encore ce malicieux Voltaire qui, en fait de poëme, n'aimait même pas la prose d'Ossian, et qui nous a montré un Florentin improvisant une épopée ossianique en prose, avec une rapidité capable de déconcerter tous les Bardes ressuscités par Macpherson. Je vous demanderai d'abord s'il y aurait un si grand mal à rendre faciles les moyens de nous amuser, et je vous dirai, en second lieu, que la carrière de l'épopée en prose n'est pas si facile; qu'elle demande, à la versification près, tout ce qu'on exige d'une épopée en vers : une action grande et intéressante; variée par des épisodes qui s'y rattachent naturellement; des caractères divers et fortement dessinés; une peinture de mœurs brillante et fidèle; des tableaux de la nature pleins d'énergie et de vérité; un style toujours noble et correct, et qui soit empreint tour-à-tour des différentes couleurs que le sujet demande. Je vous dirai plus : on dit en termes de coulisse, qu'il faut à l'Odéon des pièces plus corsées qu'au théatre Français, parce qu'à l'Odéon on ne compte ni sur l'harmonie des vers ni sur le charme du style. Eh bien! comme, dans un poëme en prose, on ne peut pas compter sur le style et sur l'harmonie, autant que dans une épopée en vers, il faut aussi que la fable soit plus corsée, c'est à dire plus compliquée, plus remplie d'évènemens, plus romanesque; d'où il suit qu'elle est plus difficile à imaginer. Ces principes bons ou mauvais, sont du moins ceux 'd'après lesquels j'ai cru devoir examiner les Bergères de Madian, ou la Jeunesse de Moïse, et j'avoue même qu'ils me prévenaient favorablement pour un ouvrage dont l'auteur a fait tant de romans. Je me croyais à peu-près sûr de trouver, sinon un poëme dans toute la rigueur du mot, du moins une nouvelle fort intéressante ; j'ai lu ; et puisqu'il faut le dire, j'ai été cruellement détrompé. Mais qu'on ne me croie pas sur parole, je devais juger la Jeunesse de Moise; c'est au lecteur à me juger à mon tour. L'exorde du poëme m'a d'abord un peu surpris : « Filles brillantes de l'erreur (s'écrie Mme de Genlis), muses séduisantes et trompeuses, ce n'est plus vous que |