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nouveau forfait, s'ils se trompaient encore une fois, si par crainte du radicalisme français, l'empereur laissait passer les injustices du militarisme berlinois, si par répulsion pour l'autocratique Russie, les radicaux parisiens laissaient amoindrir, désorganiser, la seule puissance qui ait jamais arrêté le bras de l'envahisseur germain, et mis une borne aux malheurs de leur patrie.

Est-il supposable que de si cruelles erreurs soient commises encore une fois, après avoir reçu des leçons si sanglantes, si précipitées, si mémorables, si coûteuses?

Nous ne voulons point nous faire l'apologiste des combinaisons politiques qui ont amené la destruction du royaume de Pologne, mais quelle est la raison puissante qui a rendu cette absorption définitive? c'est que toutes les nations avoisinant ce pays condamné à mort ont été conviées à partager ses dépouilles.

Si Frédéric II a montré un véritable génie de combinaisons, de tactique, c'est en appelant trois princes à prendre part à la conquête. Les traditions de cet habile souverain sont actuellement oubliées à Berlin, puisque M. de Bismarck emploie précisément la méthode inverse pour s'agrandir. S'il se rappelle encore les leçons de l'astucieux

monarque, qui trompa si bien Voltaire, ce n'est que lorsqu'il s'épuise en combinaisons pour chercher des ennemis à la France. Alors il est d'une générosité, d'une prodigalité sans rivales. Il offre le Nord à la Belgique, le Sud-Est à l'Italie, le Sud à l'Espagne. Il dispose de la province de Constantine et du Tonkin, il offre peutêtre Madagascar à l'Angleterre. Il se contente pour lui de ce qui reste de la Lorraine en y ajoutant la Champagne, dont les vins manquent évidemment aux caves germaines.

Il ne néglige aucun artifice pour épouvanter les souverains, pour en faire des complices, pour allumer la jalousie des peuples, pour exalter les vertus de l'ingratitude.

Il excite les Bulgares à oublier les vainqueurs de Plewna, comme les Italiens à se tourner contre les vainqueurs de Magenta. Il soulève chez les tribus slaves des passions antislaves, comme chez les tribus latines des passions antilatines.

Faut-il donc s'étonner qu'un jour vienne où les voisins de l'empire qu'il a fondé, comprenant le sort qui les menace, s'entendent pour rayer de la carte du monde, ou pour réduire à l'impuissance l'auteur d'alarmes sans cesse renouvelées d'intrigues et d'armements qui perturbent le monde civilisé, qui arrêtent les projets pacifiques?

N'est-ce pas à l'homme qui croit que la diplomatie consiste à mentir, que les patriotes allemands doivent s'en prendre exclusivement, s'ils se trouvent entre l'enclume et le marteau, visà-vis de la Russie et de la France.

Comment M. de Bismarck peut-il persuader à l'empereur Alexandre III qu'il est de bonne foi, dans les assurances pacifiques qu'il lui prodigue, quand on l'entend protester publiquement de son amour pour la nation française? Ne détruit-il pas lui-même l'effet des protestations, d'amitié qu'il prodigue à notre empereur? Quel est le Russe qui ne se rend pas compte de la profonde hypocrisie du chancelier en le voyant se livrer à des démonstrations si singulières? Quel est le Français qui ne devine l'existence de quelque piège en lisant dans les journaux les plus favorables à l'Allemagne, le récit de tous ces « baisers Lamourette? >>

CHAPITRE III

La défense DU TRAVAIL

La conséquence la plus directe, la plus palpable, la plus ruineuse de la politique du plus fort inaugurée par l'Allemagne, est l'étonnante augmentation du budget militaire. Depuis qu'il est admis en principe que les nations civilisées ne peuvent se faire la guerre qu'en se jetant les unes sur les autres comme les tribus sauvages le faisaient autrefois, l'art de la destruction a pris des développements inouïs. Les dépenses que nécessite l'entretien des armées ont atteint un chiffre tellement formidable, que l'on ne peut admettre la continuation indéfinie d'un pareil

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