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côtés; mais les temps étaient changés ; Bonaparte, ne gouvernant plus la France, ne devait plus compter sur leur obéissance.

La déclaration des puissances étrangères et la décision du sénat de Paris furent bientôt connues dans Fontainebleau. A la lecture de ces deux écrits, Bonaparte rassemble ses forces et publie une ré ponse; on y lisait : « Le sénat s'est permis de disposer du gouvernement français ; il a oublié qu'il doit à l'empereur le pouvoir dont il abuse; que l'empereur a sauvé une partie de ses membres des orages révolutionnaires, tiré de l'obscurité et protégé l'autre contre la haîne de la nation. Le sénat ne rougit pas de faire des reproches sanglans à son bienfaiteur, oubliant qu'il a pris la part la plus active aux évènemens dout le moment présent est devenu la suite. Il porte la lâcheté jusqu'à oser accuser l'empereur d'avoir changer ses actes en les publiant ; l'Europe entière sait que de pareils artifices ne lui étaient pas nécessaires. Un signe fait par les ministres devenait un ordre absolu pour le sénat. Il faisait toujours plus qu'on ne désirait de lui. » La vérité de ces assertions était connue de tout le monde. La conduite du sénat ne justifiait pas Bonaparte. Ces hommes, dont il proclamait la vénalité à la face de l'univers, ne les avait-il pas choisi pour en faire l'instrument passif de son despotisme? Sa chute, son épouvantable chute était son ouvrage; il avait creusé de ses mains l'abîme dans lequel il allait disparaître.

Bonaparte annonça, le 4 avril, son intention d'abdiquer la couronne. Avant d'exécuter cette résolution, son grand écuyer, Caulincourt, avait été envoyé à Paris. Les souverains réunis dans cette ville refusèrent de le recevoir. Le corps législatif s'était rassemblé; adhérant le 5 avril à l'arrêté du sénat, il déclara la déchéance de Napoléon et des membres de sa famille. Le 7, il écrivait aux membres du gouvernement provisoire : « Le corps législatif a reçu la communication que vous lui avez faite de la Charte constitutionnelle; il y donne une entière adhésion, y trouvant la garantie de tous les droits, et une distribution des pouvoirs propres à mettre désormais la France à l'abri des maux dont elle est accablée depuis long-temps. Le corps législatif se félicite de pouvoir manifester les sentimens renfermés dans son sein. Il exprime sa vive satisfaction en voyant l'auguste maison de Bourbon rappelée au trône, et le titre de Roi des Français déféré à Louis-Stanislas-Xavier, frère de Louis XVI. » Les sentimens du corps législatif étaient ceux de la France entière. Le drame sanglant, dont toutes les scènes attristaient l'Europe depuis vingt-huit ans, marchait vers son dénouement avec rapidité. Le 8, vers cinq heures du soir, la statue de Bonaparte, placée sur la colonne de la place Vendôme, en était enlevée aux cris de vive le Roi! Cette statue, fondue par Launai, sur les dessins de Chaudet, avait onze pieds et demi Tome VI. 19

de hauteur; son poids était d'environ dix mille. Ce bronze a été employé à rétablir la statue de Henri IV sur le Pont-Neuf. Le 9, l'abdication de Bonaparte fut connue. Les articles, du traité convenu entre lui et les puissances alliées circulaient dans Paris. Voici les principaux :

« Napoléon renonce pour lui, ses descendans et les membres de sa famille, à tout droit de souveraineté sur l'empire français, sur le Royaume d'Italie et sur tout autre pays. Napoléon et MarieLouise conserveront leurs titres et leur rang pendant leur vie. L'île d'Elbe, adoptée par l'empereur comme son lieu de résidence, formera pendant sa vie une principauté qu'il possédera en toute souveraineté. Il lui sera en outre accordé un revenu annuel de deux millions inscrits sur le grand-livre de la dette publique de France. Un million sera réversible à l'impératrice. Les duchés de Parme, Plaisance et Guastalla seront donnés en toute souveraineté à l'impératrice Marie-Louise: ils passeront à son fils et à ses descendans. Le prince, son fils, prendra à l'avenir le titre de prince de Parme, de Plaisance et de Guastalla. » Le 12, Monsieur, nommé par le Roi lieutenant-général, de la couronne de France, fit son entrée dans Paris avec un brillant, cortège. Il vint d'abord à l'église métropolitaine présenter à Dieu ses solennelles actions de grâces de son retour dans sa patrie, et prit sur-le-champ les rênes de l'état.

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L'arrivée de Louis XVIII était considérée comme le terme des maux de la France. La voix publique, le désignant sous le nom de Louis le Désiré, annonçait la confiance dont ce prince était investi, et tout ce qu'on attendait de son administration. Instruit des changemens survenus en France, quittant le château d'Hartwel, dans le comté de Buckingham, il débarqua au port de Calais le 24 avril, et se mit sur-le-champ en marche pour Paris, accompagné de madame la duchesse d'Angoulême, du prince de Condé et du duc de Bourbon. Il rentra dans Paris et dans son Palais le 3 mai. On ne saurait peindre l'enthousiasme de cette journée; jamais la joie ne s'était manifestée sur tous les visages avec une plus vive expression; les rubans blancs, les lis, les banderoles blanches offraient partout l'emblême des sentimens dont les cœurs étaient animés; chacun se flattait de voir enfin la discorde s'éloigner de notre patrie gouvernée les enfans de Saint-Louis. Chacun dipar sait «Nos pères leur durent l'affranchissement des communes, nous leur devons un gouvernement libéral et paternel. »

il

Bonaparte débarquait alors à l'île d'Elbe d'où, pour son bonheur et pour celui de la France, n'aurait jamais dû sortir.

XI. Elle est donc terminée cette révolution dont l'ensemble, réunissant des contrastes inouis

jusqu'à nos jours, offrit un inconcevable mélange de toutes les passions, de toutes les grandes vues, de toutes les imprudences, de toutes les iunovations, de tous les genres d'héroïsme, de tous les crimes, de toutes les vertus! Après les tempêtes les plus épouvantables, et du sein des convulsions sans cesse renaissantes, il s'éleva un homme auquel la France accorda une confiance illimitée. Le caractère de cet homme n'offre aucun modèle dans l'histoire. Il aurait obtenu l'admiration de l'univers, employant à l'exercice des vertus pacifiques les talens déployés par lui dans ses guerres insensées. La postérité décidera un jour si Napoléon fut plus coupable par le mal qu'il a commis que par le bien qu'il aurait pu faire, et auquel il songea rarement. Despote de son peuple, de ses armées, esclave de son imagination délirante, il dépassa les limites des choses possibles; embrassant des chimères, il étend ses bras aux extrémités de l'Europe pour ravir ce qu'il ne pouvait conserver; enivré de ses triomphes, nul mortel n'eut recours plus fréquemment à l'imposture. Il s'entoura des hommes pervers qui avaient joué dans la révolution les rôles les plus méprisables; assuré de leurs suffrages achetés aux prix de l'or, maître absolu chaque année de trois cent mille jeunes gens, dépositaire des finances du plus riche empire de l'Europe, que ne devait-on pas en attendre quand le génie du mal l'entraînait dans les champs de bataille!

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