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ou des colonies anglaises, ou des pays occupés par les troupes anglaises, ou allant en Angleterre ou dans les colonies anglaises, ou dans des pays occupés par des troupes anglaises, sera de bonne prise, comme contrevenant au présent décret.

Pour assurer l'exécution de cette mesure, ou encourager la délation, un décret du 114 janvier 1808 promit au dénonciateur, à titre de gratification, le tiers du produit de la vente de tout bâtiment saisi en vertu de celui du 17 décembre 1807.

La Grande-Bretagne fit un premier pas pour mettre un terme à cet état contre nature. Elle y fut engagée par la révocation de l'embargo américain, remplacé par le bill de non intercourse' qui interdit tout commerce avec la Grande-Bretagne aussi bien qu'avec la France. Un ordre du 26 avril 1809, révoquant, en faveur de l'Amérique, les ordres de 1807, permit aux Américains de faire le commerce avec tous les ports qui n'étaient pas étroitement bloqués. Ce blocus fut restreint aux ports appartenant au soi-disant royaume de Hollande, à tous les ports de France, à ceux des colonies et dépendances de ces deux puissances, à ceux de la partie septentrionale de l'Italie, depuis Pesaro et Orbitello; de manière que les ports de l'Espagne non occupés par les Français, ceux de la Russie, du Danemark et de toute la mer Baltique, restaient accessibles aux Américains. Par cet ordre, la clause de celui du 11 novembre 1807 qui assujettissait les bâtiments neutres à une station forcée en Angleterre et au payement des impôts, fut complétement abolie.

Comme ce blocus ruinait absolument le commerce des Français et mettait fin à toutes leurs communica

'Ces détails seront expliqués au chap. XL.

tions avec les États-Unis d'Amérique, Napoléon fit déelarer, le 5 août 1810, au ministre des États-Unis d'Amérique, à Paris, que ses décrets de Berlin et de Milan cesseraient d'avoir force au 23 novembre suivant, si le gouvernement britannique révoquait les arrêtés de blocus continental et les ordres qui assujettissaient les neutres à une station forcée en Angleterre; mais, le même jour, il publia un autre décret qui est connu sous le nom de décret ou tarif de Trianon. Avec lui commença une nouvelle époque du système colonial. Jusqu'alors, Napoléon s'était efforcé de ruiner le commerce des Anglais, sans distinction entre celui qui avait pour objet les denrées coloniales et celui qui s'étendait sur les productions du sol de l'Angleterre et de ses manufactures. S'étant enfin convaincu que tous ses efforts seraient infructueux pour remplacer par des productions indigènes celles des colonies, il s'avisa d'établir une législation entièrement différente pour ces deux espèces de productions; de permettre l'introduc tion des unes, en les chargeant d'impositions exorbitantes, et profitant ainsi, à l'avantage de són trésor, de l'habitude que le peuple s'était faite de quelques-unes. de ces denrées; de détruire par contre et de ruiner de fond en comble l'industrie anglaise, en tant qu' 'elle s'étendait sur des productions de son propre sol.

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Le décret de Trianon du 5 août, et celui du 12 sep tembre 1810, daté de Saint-Cloud, qui le complète, établissent comme principe que toutes les productions coloniales, venant par mer, doivent être regardées comme provenant du commerce anglais. En conséquence, leur introduction n'est pas absolument prohibée, mais assujettie à un impôt de cinquante pour cent de leur valeur. Dans le nombre de ces denrées coloniales étaient le coton, le sucre, le thé, le café, l'indigo, le cacao, la cochenille, le poivre, la can

nelle; les clous de girofle, la muscade, le bois de teinture, l'ivoire, l'écaille de tortue, la nacre de pèrle, la potasse américaine, le goudron, le poisson desséché, le riz de Virginie, le cachou, la vanille, le quinquina, la rhubarbe et autres médicaments; le quassia, là gomme, le bois de Cayenne, de gayac, d'aloès, etc. On excepta cependant, par un décret du 1" novembre 1808, de cette imposition, les denrées coloniales venues de l'Ile de France, de Batavia, et d'autres colonies françaises.

Voilà pour les denrées coloniales; les marchandises anglaises furent autrement traitées. Un décret du 19 octobre 1810, rendu à Fontainebleau, et qui porte le cachet du délire, renferme textuellement les dispositions suivantes :

1° Toutes les marchandises quelconques provenant de fabriques anglaises et qui sont prohibées, existant aujourd'hui en France, soit dans les entrepôts réels, soit dans les magasins de nos douanes, à quelque titre que ce soit, seront brûlées publiquement.

2o A l'avenir toutes marchandises de fabriques anglaises prohibées provenant, soit de nos douanes, soit des saisies qui seraient faites, seront brûlées.

3° Toutes les marchandises anglaises prohibées, qui se trouveront en Hollande, dans le grand-duché de Berg, dans les villes hanséatiques, et généralement de puis le Mein jusqu'à la mer, seront saisies et brûlées.

4° Toutes les marchandises anglaises qui se trouveront dans notre royaume d'Italie, à quelque titre que ce soit, seront saisies et brûlées.

5° Toutes les marchandises anglaises qui se trouveront dans nos provinces illyriennes, seront saisies et brûlées.

6° Toutes les marchandises anglaises qui se trouveront dans le royaume de Naples, seront saisies et brûlées.

7° Toutes les marchandises anglaises qui se trouveront dans les provinces des Espagnes occupées par nos troupes, seront saisies et brûlées.

8° Toutes les marchandises anglaises qui se trouveront dans les villes et à portée des lieux occupés par nos troupes, seront saisies et brûlées.

Les princes de la Confédération du Rhin s'empressèrent à l'envi d'exécuter ces décrets; l'un enrichissait leurs finances, l'autre leur fournissait un moyen de faire preuve de zèle envers le maître qu'ils avaient eu l'imprudence de se donner. Depuis Carlsruhe jusqu'à Munich, depuis Cassel jusqu'à Dresde et Hambourg, la force armée visita les magasins et alluma des feux de joie qui dévorèrent la propriété des négociants, tout en ouvrant toutefois aux fabricants anglais la consolante expectative de remplacer un jour toutes ces marchandises détruites. Nous nous abstiendrons de citer les nombreuses ordonnances par lesquelles certains gouvernements allèrent même audevant des vœux du protecteur. Quant à la ville de Francfort, comme l'accomplissement de ses ordres éprouvait quelque lenteur, il y envoya des troupes pour l'exécuter.

Tandis que les bûchers de l'inquisition commerciale brûlaient en Allemagne, Napoléon se servit du tarif de Trianon pour remplir ses coffres et alimenter les manufactures de France, le tout aux dépens des consommateurs de denrées coloniales. Il imagina le système des licences', en vertu desquelles il accordait

En disant que NAPOLÉON imagina le système des licences dans l'étendue qui leur fut donnée en France, nous ne prétendons pas lui attribuer la première idée des licences qui est due aux Anglais. En novembre 1808, la disette de vivres obligea l'Angleterre à déroger à son fameux acte de navigation : elle accorda, pour une année, à des navires étrangers, les français exceptés, la licence d'importer des grains. Au

à des spéculateurs la permission d'introduire en France une certaine quantité de denrées coloniales déterminées, à condition d'exporter la valeur en marchandises fabriquées en France. Ces dernières n'étaient pas moins précisément déterminées, et Napoléon favorisa certaines branches d'industrie en mettant leurs produits dans cette catégorie; il favorisa surtout les soieries, en statuant que dans la règle elles formeraient le tiers de chaque cargaison. Celui qui obtenait la licence, la payait à un taux fixé '; il payait les droits de sortie ordinaires des marchandises qu'il exportait, et les droits d'entrée, au taux du tarif de Trianon, de celles qu'il importait. Il avait peu d'espoir de gagner sur les premières; l'introduction en Angleterre des marchandises françaises que Napoléon permettait d'exporter, éprouvait dè grandes difficultés en Angleterre. Quelques-uns de ces objets y étaient soumis à des droits d'entrée si considérables, qu'ils ne pouvaient soutenir la concurrence avec les

bout de la première année, on changea la nature des licences, en imposant à ceux qui en obtinrent encore, l'obligation d'exporter des marchandises anglaises ou des denrées coloniales. Les conditions sous les quelles les licences furent accordées varièrent ensuite; mais leur objet était toujours une exportation réelle et avantageuse aux manufactures anglaises, tandis que, dans le système français, tout était fictif et imaginaire, excepté les droits qui revenaient à NAPOLÉON. Au reste l'Angleterre ne se fit point faute de délivrer des licences; dans une des premières années le nombre s'en élevait à seize mille, et à huit mille en 4814. Le ministère eut à subir des remontrances à cet égard dans la séance du parlement du 28 février 1812.

Les licences devinrent l'objet d'un trafic scandaleux; et le reproche en est monté jusqu'à Napoléon, sans qu'il en ait été jamais justifié. A Hambourg, le ministre de France, M. de BOURRIENNE, opérait sur la plus grande échelle. Il racontait, sans avoir toutefois consigné ce fait dans ses Mémoires, qu'en une seule matinée, dans la maison de somptueuses délices qu'il occupait dans le Holstein, huit cent mille francs étaient tombés sur son bureau, en échange seulement de quelques signatures apposées au bas de licences.

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