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à Bamberg, reçut les dernières propositions du roi de Prusse avec une lettre où se trouvaient exposés de nouveau les griefs que nous avons fait connaître. La proclamation qui fut publiée dans cette ville, le 6, devint le signal de la guerre : il n'y eut pas de manifeste de la part de la France, et l'on prit toutes les mesures pour que celui de la Prusse ne fût point répandu. On n'a su l'existence de ce manifeste que par une espèce de réfutation qui en parut quelques mois après à Paris. Dans la proclamation du 6 octobre, Napoléon dit à ses troupes que déjà les dispositions avaient été faites en France pour leur retour, et que la capitale avait préparé des fêtes triomphales pour les recevoir, lorsque la Prusse avait annoncé par ses armements qu'elle voulait la guerre. « La même faction, y est-il dit, le même esprit de destruction qui amena, il y a quatorze ans, les Prussiens dans les plaines de la Champagne, à la faveur de nos divisions, animent et dirigent les conseils de nos ennemis. Si ce n'est plus Paris qu'ils veulent brûler et ruiner de fond en comble, ce sont les capitales de nos alliés, au milieu desquelles ils prétendent planter leurs drapeaux; c'est la Saxe qu'ils ont forcée, par un traité honteux, de renoncer à son indépendance, et dont ils veulent faire une de leurs provinces; ce sont enfin vos lauriers qu'ils veulent arracher de vos fronts. Retirerons-nous nos troupes l'Allemagne? Les insensés! Qu'ils sachent donc qu'il serait mille fois plus facile de ravager la capitale que de ternir l'honneur des enfants de la grande nation et de ses alliés..... Soldats, il n'est aucun de vous qui veuille retourner en France par un autre chemin que celui de l'honneur; ce n'est que sous des ares de triomphe que nous devons y rentrer. »

de

En même temps que Napoléon enflammait par cette harangue le courage de ses soldats, il cherchait à se

concilier l'opinion publique; à cet effet, il adressa un message au Sénat et lui fit donner communication de deux rapports de M. de Talleyrand, destinés à expliquer les causes de la rupture. Ces pièces étaient de la

teneur suivante :

Message de l'Empereur au Sénat.

«< Sénateurs, nous avons quitté notre capitale pour nous rendre au milieu de notre armée d'Allemagne dès l'instant que nous avons su avec certitude qu'elle était menacée sur ses flancs par des mouvements inopinés. A peine arrivé sur les frontières de nos États, nous avons eu lieu de reconnaître combien notre présence y était nécessaire, et de nous applaudir des mesures défensives que nous avions prises avant de quitter le centre de notre Empire. Déjà les armées prussiennes, portées au grand complet de guerre, s'étaient ébranlées de toutes parts; elles avaient dépassé leurs frontières, la Saxe était envahie, et le sage prince qui la gouverne était forcé d'agir contre sa volonté, contre l'intérêt de ses peuples. Les armées prussiennes étaient arrivées devant les cantonnements de nos troupes; des provocations de toute espèce, et même des voies de fait, avaient signalé l'esprit de haine qui animait nos ennemis, et la modération de nos soldats, qui, tranquilles à l'aspect de tous ces mouvements, étonnés seulement de ne recevoir aucun ordre, se reposaient dans la double confiance que donnent le courage et le bon droit. Notre premier devoir a été de passer le Rhin nous-même, de former nos camps, et de faire entendre le cri de guerre : il a retenti au cœur de tous nos guerriers. Des marches combinées et rapides les ont portés en un clin d'œil au lieu que nous leur avions indiqué. Tous nos camps

à

sont formés; nous allons marcher contre les armées prussiennes, et repousser la force par la force. Toutefois, nous devons le dire, notre cœur est péniblement affecté de cette prépondérance constante qu'obtient en Europe le génie du mal, occupé sans cesse à traverser les desseins que nous formons pour la tranquillité de l'Europe, le repos et le bonheur de la génération présente; assiégeant tous les Cabinets par tous les genres de séductions, et égarant ceux qu'il n'a pu corrompre, les aveuglant sur leurs véritables intérêts, et les lançant au milieu des partis sans autres guides que les passions qu'il a su leur inspirer. Le Cabinet de Berlin lui-même n'a point choisi avec délibération le parti qu'il prend; il y a été jeté avec art et avec une malicieuse adresse. Le Roi s'est trouvé tout à coup cent lieues de sa capitale, aux frontières de la Confédération du Rhin, au milieu de son armée, et vis-àvis des troupes françaises, dispersées dans leurs cantonnements, et qui croyaient devoir compter sur les liens qui unissaient les deux États, et sur les protestations prodiguées en toutes circonstances par la Cour de Berlin. Dans une guerre aussi juste, où nous ne prenons les armes que pour nous défendre, que nous n'avons provoquée par aucun acte, par aucune prétention, et dont il nous serait impossible d'assigner la véritable cause, nous comptons entièrement sur l'appui des lois et sur celui de nos peuples, que les circonstances appellent à nous donner de nouvelles preuves de leur amour, de leur dévouement et de leur courage. De notre côté aucun sacrifice personnel ne nous sera pénible, aucun danger ne nous arrêtera toutes les fois qu'il s'agira d'assurer les droits, l'honneur et la prospérité de nos peuples.

<< Donné en notre quartier impérial de Bamberg, le 7 octobre 1806. Signé NAPOLÉON. »

Premier rapport adressé à l'Empereur par le ministre des Relations Extérieures.

<< Sire, Votre Majesté, à la première nouvelle qu'elle reçut des armements de la Prusse, fut longtemps sans y croire forcée d'y croire, elle se plut à les attribuer à un malentendu; elle espéra que ce malentendu serait promptement éclairci, et qu'aussitôt ces armements cesseraient.

« Les espérances de Votre Majesté avaient leur source dans son amour constant pour la paix elles ont été trompées. La Prusse n'en est plus à méditer la guerre; elle la fait. Par quels motifs ? Je l'ignore, et je ne lui en connais aucun.

« Si la Prusse eût eu quelque sujet de plainte, quelque grief, quelque raison d'armer, se serait-elle obstinée à les taire? Le ministre de Votre Majesté à Berlin n'en aurait-il pas été instruit? M. de Knobelsdorf n'aurait-il pas été chargé de les faire connaître? Tout au contraire, M. de Knobelsdorf n'a apporté à Votre Majesté qu'une lettre du Roi fort amicale, et il a reçu des assurances également amicales de la bouche même de Votre Majesté. Le ministre de Votre Majesté à Berlin voyait les préparatifs se poursuivre, l'arrogance s'accroître, les provocations s'accumuler à mesure que Votre Majesté montrait plus de modération et d'impassibilité. Mais s'il demandait quels pouvaient être les griefs de la Prusse, on n'en articulait aucun; on ne lui donnait aucune explication de sorte que sa présence était devenue inutile à Berlin; de sorte qu'il n'y était plus que le témoin de procédés et de mesures contraires à la dignité de la France.

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Votre Majesté ne lui a rien demandé. De quel déni de justice avait-elle à se plaindre? Tout ce qu'elle eût

demandé de juste, Votre Majesté était disposée à le lui accorder; mais elle n'a fait aucune demande, parce qu'elle n'en avait point à faire.

«En supposant que des bruits absurdes, accueillis avec une inconcevable crédulité, eussent inspiré au Cabinet prussien de vaines alarmes, Votre Majesté, qui avait tout fait pour les prévenir, avait aussi tout fait pour les dissiper.

«De quels dangers la Prusse voulait-elle se garantir? La France, loin de la menacer, ne lui avait jamais donné que les preuves les plus signalées de son amitié. A quels sacrifices voulait-elle se soustraire? <<< Est-ce l'existence de la Confédération du Rhin? sont-ce les arrangements qui ont eu lieu dans le midi de l'Allemagne qui ont porté la Prusse à prendre les armes? On ne peut pas même le supposer. La Cour de Berlin a déclaré qu'elle n'avait rien à objecter contre ces arrangements; elle a reconnu la Confédération; elle s'est occupée à réunir avec elle, dans une confédération semblable, les États qui l'avoisinent.

« Votre Majesté a déclaré, il est vrai, que les villes hanséatiques devaient rester indépendantes et isolées de toute confédération; elle a déclaré encore que les autres États du nord de l'Allemagne devaient être libres de ne consulter que leur politique et leurs convenances; mais ces déclarations, fondées et sur la justice et sur l'intérêt général de l'Europe, n'ont pu fournir à la Prusse un motif de guerre, ni même un prétexte qu'elle puisse avouer.

« La guerre de la part de la Prusse est donc sans aucun motif réel.

<< Cependant les armées prussiennes ont dépassé leurs limites; elles ont envahi la Saxe; elles menacent le territoire de la Confédération du Rhin, de l'inviolabilité duquel Votre Majesté est garante. Les troupes

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