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organisées à Mayence pour soutenir la retraite de Napoléon, comme les corps d'Oudinot et de Victor derrière la Bérésina à la campagne de 1812. A peine l'empereur a-t-il étudié les positions pour couvrir sa retraite, que déjà le canon se fait entendre; les corps russes et prussiens arrivent en toute hâte; on aperçoit la tête des colonnes autrichiennes se déployant sur l'horizon. On arrive haletant à Leipzig, et il faut déjà se défendre 1; les alliés ne laissent aucun relâche; ils semblent avoir emprunté l'activité que Napoléon déployait à d'autres époques; ils débouchent par toutes les routes de Leipzig: au midi, Schwartzenberg lance une de ses divisions vers l'Elster pour couper la retraite vers la France; à la gauche on attend Bennigsen qui n'a pas encore pris part aux combats avec ses réserves asiatiques; en dernière ligne, Blücher et Bernadotte arrivent par le nord; le torrent presse et déborde de tout côté. C'est encore la tactique de Dresde que Napoléon veut suivre; comme il est en forces très-inférieures, il prendra Leipzig pour centre, et ses colonnes déployées de droite et de gauche s'appuieront sur les faubourgs, les portes et les retranchements. Cette manoeuvre, qui a si bien réussi à Dresde, réussira-t-elle encore? A Leipzig les alliés n'ont-ils pas des forces doubles, et leur impétuosité n'a-t-elle pas quelque chose de plus vigoureux ?

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Il règne depuis quelque temps dans l'armée ennemie une audace qui tient à la certitude de la force et de la victoire. C'est Schwartzenberg qui engage la bataille; Napoléon attend et n'attaque plus: fatal apprentissage pour lui que de garder la défensive! Tous les corps des alliés se portent d'abord sur Wachau, avec une impétuosité si vive que les avant-postes sont obligés de plier devant une attaque si formidable. L'empereur lui-même, un moment forcé de refuser bataille, rétrograde, hésite, se reforme. A un signal donné, l'infanterie d'Augereau s'élance sur les Autrichiens; la vieille cavalerie, récemment arrivée d'Espagne, charge à fond, et met les Allemands en déroute; les alliés, étonnés de tant de résistance, hésitent à leur tour; Napoléon met cet instant à profit; c'est à la jeune garde qu'est réservé l'honneur de briser l'ennemi; l'infanterie de Victor, d'Augereau, formée en colonnes serrées, soutient l'attaque; des feux d'artillerie font trembler le sol, la victoire est incertaine; nobles adversaires, ils se disputent et s'arrachent le terrain. Alors on entend au loin un grand tumulte, c'est Blücher qui arrive sur le champ de bataille; si Schwartzenberg a été obligé à la retraite, Blücher a obtenu quelques succès. A la face des Prussiens, Poniatowski fait merveille; Wachau est à nous, les alliés ont fait des pertes immenses; c'est un combat de géants!

Napoléon médite déjà de percer leur centre, et de les refouler sur la pointe des baïonnettes. La cavalerie de Murat, étincelant au loin, sabre et renverse; Latour-Maubourg et Kellermann chargent avec un indicible élan. « Allez, dignes héros, vous versez votre sang pour la patrie! » Quelle perte ne faisons-nous pas! Latour-Maubourg a la cuisse emportée ; le général Maison est tombé grièvement blessé; les alliés profitent d'un moment d'hésitation; ils chargent, et les Cosaques de la garde russe reprennent un parc d'artillerie de vingtquatre pièces de canon. Dénombrer les ennemis est impossible, leurs myriades s'agitent comme les formis du sol et des grues qui fendent les nuages. Ici la furieuse charge des cuirassiers de Latour-Maubourg; plus loin une masse de colonnes autrichiennes s'élance au pas charge et pousse des cris si terribles, que la plaine en a retenti. Bianchi refoule tout devant lui; les Autrichiens viennent au secours des Russes dans ce grand pêle-mêle; Schwartzenberg, qui veut se montrer manœuvrier à la face même de Napoléon, fait tout attaquer de droite et de gauche; la mêlée est sanglante, générale;

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le soir aucun succès décisif. Voilà pour la bataille de Wachau '. Maintenant il faut suivre le combat de la Partha. La Partha coule au nord de Leipzig, et c'est Blücher qui arrive ; il a devant lui Marmont et Ney: les Prussiens temporisent, amusent leurs adversaires, car ils attendent Bernadotte. A Marmont et Ney, Blücher oppose Sacken, York et Langeron; il se fait des prodiges. Le soir les pertes sont telles, que Ney, le brave des braves, est obligé de se replier. A Lindenau, le général Bertrand a pris position; il est resté maître, et c'est immense; car la route de France est libre: Bertrand a eu l'honneur de préparer les voies à son empereur s'il veut regagner le Rhin avec ses légions accablées. Il s'est fait des prodiges parmi ces hommes prodigieux, et Poniatowski a osé de si grandes choses, que sur le champ de bataille il reçoit le bâton de maréchal de France. De toute cette journée il ne ressort aucun résultat; l'armée s'est ouvert un passage, et voilà tout; elle va rétrograder jusqu'à Mayence, et l'on considère cela comme un succès. Sa position est encore formidable, les ailes sont protégées par la Partha et la Pleiss; Leipzig est comme un camp retranché; l'ennemi doit l'enlever de vive force s'il veut couronner sa victoire en nous refoulant sur le Rhin. A chaque moment ses forces s'accroissent: Bernadotte, Colloredo et Bennigsen viennent former une autre ligne autour de nous. Napoléon commence à comprendre tout ce que cette attaque peut avoir de formidable; il est fier, il doit sauver avant tout son armée, peut-être en est-il déjà à sauver son empire. Dans un de ces furieux engagements qui se développent autour de Leipzig, l'armée s'est emparée de M. de Meerfeldt. M. de Meerfeldt est tout à la fois négociateur et général à sa personne se rattachent des souvenirs; plénipotentiaire à Campo-Formio, il avait vu commencer la grande lutte de la maison d'Autriche contre Napoléon maintenant prisonnier, on le traite avec une sorte de déférence; on va le renvoyer sur parole, et l'empereur le voit et le charge d'une négociation intime. Les conditions qu'il a refusées à Prague, aujourd'hui Napoléon les accepte. « Vous voyez comme on m'attaque, dit-il, vous voyez comme je me défends; je veux la paix, qu'on le sache bien; vous craignez jusqu'au sommeil du lion, vous voulez lui arracher les griffes, lui couper la crinière: prenez garde, l'Autriche et la France ont des intérêts communs contre la Russie;

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'Ce récit de la bataille de Leipzig diffère essentiellement des bulletins, mais il est recueilli sur les rapports authentiques des généraux français et alliés.

si vous réduisez l'empire à n'être plus rien, comment arrêterez-vous le débordement des Russes? Voici donc ce que je propose: je renonce à la Pologne, à l'Illyrie, à la confédération du Rhin; est-ce assez d'un seul trait? L'Italie restera indépendante; quant à l'Espagne, à la Hollande et aux villes hanséatiques, je n'y tiens que pour en faire un moyen de négocier la paix maritime avec l'Angleterre. Ces conditions conviennent-elles à mon beau-père? Alors qu'on arrête un armistice; j'offre pour cela d'évacuer sur-le-champ l'Allemagne et de me retirer derrière le Rhin. » M. de Meerfeldt accueillit respectueusement ces paroles de paix, et quitta le camp de Napoléon pour porter ces propositions aux alliés.

A ce moment les forces de l'alliance étaient si démesurément grandies, leurs moyens étaient si considérables, qu'ils ne voulaient plus admettre qu'une seule condition, la France du Rhin; plus de prépondérance au dehors, plus de protectorat, plus de médiation: on donnait les Alpes, le Rhin, les Pyrénées et l'Océan, les limites naturelles; quant à la circonscription de l'Europe, les alliés se la réservaient seuls. Dans la sombre journée du 17 octobre, il se fait comme une suspension d'armes; tout le monde en a besoin, les alliés pour développer leurs forces et organiser leurs réserves, Napoléon pour étudier ses positions et préparer sa retraite sur Hanau ; à tout prix il faut s'assurer des défilés de la Saale et rester maître des hauteurs.

Ces ordres à peine donnés, le canon gronde; la fatale journée du 18 commence! L'empereur vient d'évacuer Wachau, ses ruines silencieuses sont aussitôt occupées par l'armée alliée, qui débouche de tous côtés; ce dragon à mille têtes se montre couvert de feu, avec un ordre parfait. La grande armée autrichienne attaque les Polonais de Poniatowski; les Russes de Barclay de Tolly entourent Murat, Victor et Augereau; les Prussiens, l'armée russe de Bennigsen et les Cosaques de Platoff se précipitent sur Macdonald; quant à la rivière de la Partha, Blücher et Bernadotte se disposent à la franchir, en refoulant Ney et Marmont. Au début de la journée, la bataille devient ainsi générale; on voit briller le courage individuel, Augereau redevient le vieux soldat d'Italie; Marmont, l'épée à la main, charge comme un grenadier. Hélas! comment résister à ces myriades d'hommes soulevés comme les flots par la tempête? La plaine fourmille de ces masses brillantes de baïonnettes; c'est le combat des nations, c'est la bataille des peuples: chacun se fait tuer pour sa patrie; l'Allemagne

veut rester libre et briser le protectorat du superbe empereur; la Hollande, l'Espagne, l'Italie, vont aussi reconquérir leur nationalité primitive. La bataille de Leipzig est comme le grand choc de Fontenay sous les fils de Louis le Débonnaire; elle dissout le grand empire de Charlemagne; elle en éparpille les débris.

Quoi d'étonnant dès lors que les Saxons aient abandonné l'armée de Napoléon pour courir à leur nationalité? Seuls de tous les peuples de la Germanie ils étaient restés dans les rangs français; les sociétés secrètes les dominaient par l'idée de patrie, et un peu d'instinct aurait suffi pour comprendre qu'on voulait en vain les retenir au milieu de la bataille; les Saxons ne cherchaient qu'une occasion pour se jeter dans les rangs de leurs frères : eux aussi désiraient la liberté de l'Allemagne; passer à la patrie n'était pas une désertion *; devant eux ils voyaient des hommes qui parlaient leur langue, des frères aux cheveux blonds, aux yeux bleus, de l'Elbe et de l'Oder; ils n'hésitèrent point à leur serrer la main, comme le soir autour de longs tuyaux de poêles quand retentit le chant patriotique. Toute l'armée saxonne et la cavalerie wurtembergeoise délaissèrent le drapeau français pour aller à celui de l'Allemagne; ces troupes furent accueillies avec enthousiasme dans les rangs des alliés; elles arrivaient tardivement, mais enfin, comme le disait le chant de Koerner: « Hourra! hourra venez à nous, vous tous qui aimez la liberté 1!

Cette fatale désertion des troupes allemandes laisse un large vide au centre de l'armée française; Napoléon s'élance aussitôt vers ce centre; il le fait appuyer par toutes les réserves de la garde. L'enga

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Ni le patriotisme, ni la nationalité dont parle avec tant d'emphase M. Capefigue, ne sauraient excuser l'odieuse et infâme trahison des Saxons. Loin de flétrir cette désertion, l'auteur ne cherche qu'à la rendre moins lâche!... - C'est sa mission, qu'il la poursuive jusqu'au bout.

(F. W.)

Cette défection des Saxons était préparée par des actes et des insinuations nationales des sociétés secrètes de l'Allemagne.

<< Saxons! levez-vous, et courez aux armes pour la grande cause de votre patrie ! vous avez vu comme vos frères allemands ont combattu pour cette cause, et comme Dieu a béni leurs efforts. Votre patrie a été le théâtre de nouveaux exploits, qui ont ajouté à la gloire de l'Allemagne. Jusqu'ici vous n'y avez nullement participé. Le courage qu'a montré votre armée n'a été qu'en faveur de l'oppresseur et de l'oppression.

>> Rappelez-vous les anciens temps, lorsque vous étiez les premiers à prendre part à tous les mouvements de la nation allemande pour la patrie, pour la liberté et la religion. »

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