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une fois encore dans le Portugal, et se couvrir de ses impénétrables retranchements; de Torres-Vedras, il peut s'élancer à l'improviste. C'est de cette campagne, où manœuvrent si habilement le maréchal Soult et lord Wellington, qu'est venue l'estime que se portent réciproquement ces deux remarquables chefs militaires : tous deux s'étu dient; ils se retrouveront sur d'autres champs de bataille; leur taille n'est pas tellement inégale qu'ils ne puissent se mesurer l'un et l'autre : c'est le maréchal Soult qui ramène pour la troisième fois Joseph à Madrid; ce pauvre sire peut signer encore: Moi le roi, dans le Buen-Retiro.

Les malheurs de la campagne de Russie donnent une issue fâcheuse à ses efforts. Napoléon a besoin de rappeler les cadres des meilleurs régiments au delà des Pyrénées; dès lors il faut renoncer à l'offensive; l'armée d'Espagne se désorganise ; les guérillas grandissent et se multiplient sur toutes les routes; la démocratie se lève en Espagne, car la résistance vient du peuple : l'oppression est grande. Savez-vous quels sont les hommes qui forment ces fameuses guérillas dans la Catalogne? un curé de village, comme Mérino; un gardeur de chèvres, comme El Pastor 2; un meunier, un garçon de ferme, un

Au mois de janvier 1813, voici quelle était la composition des armées françaises en Espagne. Le maréchal Soult commandait à soixante et dix-neuf bataillons répartis en sept divisions, comptant un effectif de 48,000 baïonnettes; quarante-trois escadrons ne réunissant pas plus de 6,300 cavaliers. L'effectif de l'armée d'Aragon, aux ordres du maréchal Suchet, consistait en cinq divisions actives d'infanterie, formant 17,000 cambattants; en 2,500 cavaliers; en 1,500 artilleurs et sapeurs; en 14,000 hommes occupant Barcelone, Figuières, Girone, etc.

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toréador. Ils se lèvent spontanément; déjà en 1812 les guérillas ont 40,000 hommes de troupes réglées sous les armes, prêts à se porter sur tous les points, sorte d'Arabes du désert, Cosaques des sierras, redoutables pour les armées qui combattaient au nom de Joseph; ils empêchent la levée de l'impôt, pendent les autorités et soulèvent les villages; et quelle que soit la rigueur des généraux français, des administrateurs, l'obéissance échappe partout : c'est la guerre à mort.

A Palenzia, l'exigence des Français va si loin que tout retardataire des contributions doit recevoir cinquante coups de bâton d'heure en heure, et en présence de l'auditeur au conseil d'État de S. M. I. et R. 1. Est-ce avec cela qu'on croit administrer la Catalogne? Et pourtant on l'a confiée à un professeur de philosophie, à un philanthrope émérite. On s'imagine quelle réaction sanglante devait naître dans le cœur d'une population demi-sauvage comme celle de Catalogne, et si fatalement opprimée. Ainsi la guerre au couteau s'explique.

Ce fut en Angleterre surtout qu'éclata la joie la plus vive de nos

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1 Voici en original cette curieuse ordonnance, qui constate l'aménité de l'occupation française :

« Vecinos de Palenzia, ya sabeis que no se puede retardar mas el pago de la contribucion en generos, y metalico, correspondiente à los cinco ùltimos meses de 1812; asi mismo sabeis quantas gracias yà la ciudad conseguido en este particular.

» Os queda a saber que no pagando en los terminos fixados, estais expuestos a rigor que me caracteriza en la execution de las ordenes del gobierno. Quien merecera la aplicacion de este rigor principarà por pagar quaranta-cinco pecetas à los quince soldados que yo pondré à discretion en su casa. Estos soldados le detendrán en su casa para recibir de ora cinquanta palos en mi presencia. Cada dia nuevas quarantacinco pecetas, y nuevas distribuciones de palos.

» Del vecino que no se encontrara en su casa esta sera, saqueada.

» El auditor del consejo de S. M. I. y R., encargado de la contribucion de Palenzia y juridiccion. » 10 janvier 1813. »

désastres en Russie; ennemie invétérée de la suprématie de Napoléon, la Grande-Bretagne l'avait combattu avec un acharnement indicible au moyen de tous les sacrifices si largement imposés par le grand système de Pitt; elle touchait enfin à son triomphe, car l'orgueilleux empereur recevait un échec irréparable; l'ombre du fils de Chatam devait se consoler sous les vastes voûtes de Westminster; Castlereagh et Liverpool, ses élèves, s'étaient faits les héritiers de sa forte pensée; l'Angleterre voyait enfin le continent échapper à la puissance de Napoléon; elle votait des subsides immenses, mais ces subsides habilement distribués lui créaient des amis en substituant à l'influence de la France sur l'Europe la toute-puissance de l'Angleterre; son crédit politique grandissait à ce point que les cabinets de Vienne, de Berlin, de Saint-Pétersbourg attendaient avec une vive sollicitude les inspirations de lord Castlereagh, cette tête si ferme, si absolue; le succès préparait le vote unanime du parlement; l'Angleterre en masse était entrée dans le système des hostilités implacables contre Napoléon. Dans cette année, l'opposition presque entière disparaît des communes; il y a plus qu'une idée, la chute du chef qui préside aux destinées de la France.

L'esprit littéraire même poussait le peuple britannique à une grande levée de boucliers. Si l'on examine à cette époque le mouvement de la littérature anglaise, elle commence à se personnifier en deux hommes: Walter Scott empreint toutes ses œuvres d'un haut sentiment d'aristocratie; il s'est fait le barde des vieilles choses, des traditions de châtellenies, de l'épopée de la patrie. Walter Scott a été un des grands instruments des restaurations européennes ; il a préparé les esprits à ne plus mépriser les siècles écoulés, les générations au sépulcre, les vieux créneaux de nos pères, et les dynasties tombées. Walter Scott, en parlant des Stuarts, sanctifie le caractère de Charles I" au milieu des puritains, à la face de Cromwell, aux jours des grandes révolutions; il poétise Charles II, il entraîne tous les cœurs vers Édouard en Écosse, le noble descendant d'une dynastie proscrite; il est le barde des choses du passé, et lorsqu'il parlait des Stuarts, plus d'un regard attentif ne devait-il pas se porter sur les Bourbons?

Byron donne à son âme ardente une mission qui a bien aussi son retentissement politique : Childe-Harold a visité le Portugal et l'Espagne; lorsque son navire a quitté l'Océan et les tempêtes, lorsqu'il a adressé ses adieux mélancoliques à la terre d'Albion, il débarque

à Lisbonne; son premier salut est pour ce palais de Mafra aux mille tours, où les Portugais placent leurs dynasties nationales. Lord Byron traverse Cintra, là où fut signée la convention avec Junot, et il attaque le général Dalrymple, dont la main funeste a signé la capitulation du corps d'armée français. A travers ces campagnes embaumées d'orangers, de citronniers, Byron rêve la délivrance de l'Espagne ; il traverse en pèlerin la Sierra-Morena, où des boulets empilés attestent l'héroïque défense de la Péninsule. Childe-Harold est à Séville, où les jeunes toréadors ont suspendu la guitare aux saules du Guadalquivir; tout y respire la guerre, et lord Byron salue ces femmes aux noirs cheveux, qui font retentir les amphithéâtres du cri de: Mort aux Français ! A Cadix, son séjour de prédilection, Childe-Harold assiste aux délibérations de la junte, et de mâles accents de liberté retentissent à ses oreilles. Il quitte l'Espagne pour visiter la Grèce, l'Albanie, et c'est au pied du mont Olympe qu'il jette aux Espagnols ces souhaits de victoire contre l'oppression d'un conquérant.

La publication du premier chant de Childe-Harold fit une vive et profonde impression en Angleterre; ce fut comme un poétique pamphlet. Walter Scott avait récité de nobles pensées sur les dynasties tombées; Byron, lui, chante les peuples, et ses vers jettent des imprécations au chef des guerriers de France, dont l'aigrette rouge signale la dévastation et le ravage. La grande popularité des deux poëtes servit la cause des restaurations en Angleterre ; leurs chants émurent ceux qui rêvaient l'indépendance des nations, comme ceux qui voulaient la restauration des trônes; tout dut concourir au même but de renversement contre la dictature de Bonaparte. De là cette spontanéité pour le vote des subsides au parlement, dans la chambre des lords comme dans la chambre des communes l'opposition a presque disparu. «Enfin, disait-on, voilà des succès: en Espagne, où lord Wellington décore d'un noble laurier le drapeau britannique, où les guérillas se lèvent en masse, où partout elles pressent les aigles de Napoléon; en Russie, un peuple aussi brave a poursuivi à travers les neiges les débris de l'armée française, comme le noir chasseur de la Mort des ballades du Rhin; le succès est partout complet; il ne faut plus désormais se montrer avare de subsides, on en stipulera pour tout le monde. » Sir Charles Stewart doit passer par la Suède pour faire accéder activement Bernadotte à la cause commune; lord Walpole est désigné pour une mission confidentielle à Vienne; et tandis

que sir Charles Stewart se dirigera de Stockholm vers Berlin, lord Cathcart doit offrir à la Russie les moyens de poursuivre la guerre avec acharnement. Il faut détruire ce colosse qui pèse sur tous, briser cette maille d'acier dont le système continental a enveloppé l'Europe.

Pour arriver à ce but, le plan de l'Angleterre est simple; cet empire français, quelle que soit la main puissante qui a voulu lui imprimer l'unité, forme une réunion confuse de peuples hostiles par leur histoire, leurs mœurs, les habitudes, la religion et les souvenirs; rien ne sera plus aisé que de le dissoudre; on doit renoncer à toutes ces idées d'insurrection vendéenne ou bretonne des époques antérieures : saisir l'empire au cœur, c'est folie; il faut donc l'attaquer par les extrémités, préparer la gangrène aux doigts, à la tête, aux pieds: avec cela la vie ne sera pas longue. A l'extrémité nord sont les villes hanséatiques Hambourg, Lubeck, gémissent sous l'occupation; les départements réunis sont prêts à succomber sous le système continental, il faut leur rendre l'indépendance et la liberté commerciale; avec cela on remuera les peuples. Au-dessous de ces villes est la Hollande, soumise aux mêmes infirmités par le système continental, pleine d'inquiétude, d'esprit de révolte depuis sa réunion à la France; que faut-il donc à ce pays? Lui rendre sa liberté commerciale comme aux villes hanséatiques, il faut abolir les douanes françaises, la conscription, les droits réunis. Pour la Hollande il existe une race chérie qui l'a gouvernée paisiblement ; c'est la famille des princes d'Orange, des stathouders, dont l'histoire se lie par un échange de services à l'indépendance des Pays-Bas. Le parti orangiste est puissant, il ne s'agit que de le mettre en action à Utrecht, à Amsterdam; les princes de cette famille sont unis à l'Angleterre par mille liens différents : Vive la liberté! vive Orange! ce cri doit plaire aux Pays-Bas, et l'Angleterre sera la première à seconder l'insurrection 1. En Belgique, on sait les mécontentements qu'éprouvent les catholiques à l'occasion des persécutions que l'empereur des Français fait subir à leurs évêques; on s'appuiera sur cette irritation des esprits. Dans ces contrées, la plupart des révolutions ne se sont-elles pas opérées par des idées religieuses? La Belgique est un pays fabricant et productif; la Hollande est au contraire un pays d'exportation et de consommation; on pourra lier la Belgique à la Hollande par un commun intérêt, en former un seul royaume comme une barrière à la France.

'La révolution des Pays-Bas se fit à ces cris de: Oranje Boven!

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