Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

de s'en être rapporté aux ignorans qui l'avaient perdu. Il ajoutait cependant que les mauvais traitemens qu'il en avait reçus avaient mis toutà-fait hors de son cœur les anciens sentimens qu'il avait eus pour lui, et qu'il ne saurait oublier qu'il l'avait sacrifié à des misérables. Néanmoins il désirait, pour le bien de tous, que l'édifice ne fût pas détruit, et ce n'était plus qu'à Paris que l'on pouvait le sauver. Il me demandait à l'autoriser à rester, persuadé que je ferais une chose utile pour le bien du service de l'empereur et de tout le monde.

Je ne me laissai pas prendre au leurre, et répondis au diplomate que non seulement je ne l'autorisais pas à rester, mais que je lui intimais, autant qu'il était en moi, de partir sur-le-champ pour se rendre près de l'impératrice; je le prévins même que dès ce moment j'allais surveiller son départ, et prendre des mesures pour le faire effectuer. Je chargeai en effet des agens d'avoir l'oeil sur le personnage. Il feignit de se rendre à mon injonction, et courut solliciter du préfet de police l'autorisation qu'il n'avait pu obtenir de moi. Le préfet refusa; M. de Talleyrand fut obligé de se mettre en route, et de se faire officieusement arrêter pour rentrer à Paris. C'était bien de la prudence, ou ses plans n'étaient pas encore arrêtés; car enfin à quoi bon solliciter

avec tant de persévérance l'autorisation de rester à Paris? Si ses conventions eussent été faites, il lui suffisait de se cacher quelques heures pour se trouver au milieu des Russes; mais il n'était sûr de rien, il redoutait l'avenir, et voulait, à tout événement, être en mesure de justifier son séjour dans la capitale. Il fit croire aux alliés qu'il avait des moyens de consommer la ruine de l'empereur, et à ses dupes, que les alliés hésitaient, mais qu'il espérait vaincre leurs répugnances, et ramener les Bourbons.

[ocr errors][merged small]

-

Je quitte Paris. M. Pasquier et M. de Chabrol restent chargés de veiller à la sûreté de la capitale. Je suis tenté de revenir sur mes pas. — Toujours M. de Talleyrand.— L'empereur ne pensait pas que ses antécédens lui permissent de se rallier aux Bourbons. Esquisse des actes des diplomates contre les diverses branches de cette maison.

AUSSITÔT que M. de Talleyrand fut sorti de chez moi, je m'occupai de mon départ. Je fis venir le préfet de police, M. Pasquier; après lui avoir donné connaissance de l'ordre que j'avais reçu, je le chargeai de rester à Paris, et lui communiquai tout ce que je pressentais devoir être la suite d'une décision contre laquelle je m'étais vainement élevé. Je ne lui cachai pas que je ne m'abusais point sur la grandeur du mal, qu'on allait tenter de déplacer le pouvoir, qu'indubitablement on s'adresserait à lui pour le faire concou

rir à cette entreprise; je l'engageai à se tenir sur la réserve, et surtout à se rappeler son devoir, qu'un homme d'honneur ne méconnaît jamais. Je lui dis que M. de Chabrol, qui était préfet de la Seine, dans lequel l'empereur avait eu assez de confiance pour le charger de l'administration de Paris à l'approche de l'orage, recevait du ministre de l'intérieur la même mission que luimême recevait de moi; qu'ils pouvaient, en réunissant leurs efforts, empêcher beaucoup de mal et se faire infiniment d'honneur. M. Pasquier connaissait depuis long-temps mes opinions particulières sur l'issue de cette lutte; je l'avais souvent entretenu de tout ce que je craignais, et il y avait beaucoup de choses sur lesquelles j'étais en confiance avec lui. Je me félicitai de pouvoir le laisser à Paris dans la circonstance où nous étions, tant à cause de la considération qu'il s'était acquise par ses talens, qu'à cause de la réputation que lui avait méritée son caractère intègre. Il me répondit de manière à confirmer la haute opinion que j'avais de lui: il me dit qu'il ne doutait pas de l'existence de beaucoup de mauvais projets, mais que pour lui, il ne serait jamais que le magistrat de la tranquillité publique; que tant qu'on lui laisserait de l'autorité, il n'en ferait usage que pour la protéger. Je n'ai pas changé d'opinion sur M. Pasquier, malgré tout ce qui est

arrivé, et je ne fais nul doute qu'il eût comprimé une révolution populaire de tout son pouvoir; mais l'impulsion partit de trop haut, il fut obligé de suivre le torrent, Ma confiance en lui était si forte, que je lui remis un portefeuille dans lequel étaient toutes les lettres que l'empereur m'avait fait l'honneur de m'écrire pendant mon administration, parce que je ne voulais pas les exposer au hasard d'un pillage auquel je pouvais particulièrement être exposé, en cas d'une révolution que je voyais arriver; il s'en chargea à condition qu'il lui serait permis de le brûler, s'il survenait quelque danger pour lui. Le cas survint en effet, et ce précieux dépôt fut détruit. J'avais fait enlever ma correspondance secrète, et livré aux flammes tout ce qui pouvait compromettre les individus qui étaient attachés au ministère. Je m'étais cru obligé d'assurer le repos d'une foule de gens qui m'avaient servi.

Dès les premiers jours de février, il ne restait dans les bureaux aucune pièce qui pût les exposer aux vengeances, ni même les compromettre. Je laissai le secrétaire-général du ministère à Paris, pour contenir le personnel de l'administration, et signifiai à M. Anglès, qui était chargé de l'arrondissement au-delà des Alpes, de me joindre à Blois. M. Réal, qui était à la tête d'un autre arrondissement, reçut la même invi

« ZurückWeiter »