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LIVRE QUATORZIÈME.

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Projet de déclaration royale proposé par le sénat à Louis XVIII. - Son
refus. Il se rend à Saint-Ouen. Députation du sénat. Discours de
M. de Talleyrand. - Déclaration de Saint-Ouen. - Entrée de Louis XVIII
Son cortége. Il se rend à la cathédrale. Son entrée aux
Il nomme son ministère. — M. d'Ambray. - L'abbé de Mon-
L'abbé Louis. M. Beugnot. Le général Dupont.
M. de Blacas. Mémoire de Fouché
Création de la maison militaire du roi.-Charte de 1814.

à Paris. Tuileries. tesquiou.

M. Ferrand.

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à Louis XVIII.

M. de Talleyrand. ·

- Opposition de M. de Villèle. — Traité de Paris. - Départ des alliés. Formation de la chambre des pairs. Ouverture des chambres le 4 juin 1814. Discours du roi. - Discours du chancelier d'Ambray et de M. Ferrand. Adresse de la chambre des pairs et du corps législatif. — Ordonnance sur l'observation du dimanche. Projet de loi sur presse. Discours de l'abbé de Montesquiou. Rapport de M. Raynouard. - Adoption de la loi par le corps législatif et la chambre des pairs. — Mesures financières présentées au roi par l'abbé Louis. Loi de restitution des rentes et des biens non vendus. Exposé des motifs de M. Ferrand. Rapport de M. Bédoch. Discours de M. Lainé et du maréchal Macdonald.. Adoption de la loi. Le général Excelmans et le maréchal Le duc et la duchesse

Soult.

Le duc d'Orléans au Palais-Royal. d'Angoulême en Vendée. - Le duc de Berry. prince de Condé.

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Le duc de Bourbon.

Situation de Louis XVIII.
Congrès de Vienne.

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Le comte d'Artois. - Le Retour de la France aux BourDépart de M. de Talleyrand pour

I

Cependant l'empereur Alexandre était revenu rapporter à Paris l'impression qu'il avait reçue de la fermeté de Louis XVIII et ses refus. Le sénat tremblait, hésitait, recu

lait; M. de Talleyrand se maintenait en perdant chaque jour du terrain dans ce double rôle d'intermédiaire confidentiel entre les exigences des uns et l'obstination des autres, trompant à la fois les deux. Des plans adoucis et amendés de constitution se succédaient vainement dans les comités du Luxembourg et dans les salons de ce ministre. Le diplomate conserva le ton de la plaisanterie avec les puritains du sénat pour les préparer aux sacrifices par le doute jeté d'avance dans leur conseil : « Vous allez, leur disait-il, « avoir affaire à un roi qui est un homme supérieur : atten« dez-vous à le voir discuter votre constitution: préparez« vous à l'honneur d'entrer en controverse avec lui. »

Les sénateurs soumirent enfin à M. de Talleyrand un projet de déclaration royale dans lequel ils faisaient promettre à ce prince de conserver le sénat, aux lumières duquel il reconnaîtrait devoir son retour dans son royaume. M. de Talleyrand alla le présenter au roi à Compiègne, ne doutant pas qu'il ne fût accepté. Mais ce prince, aussi inflexible aux insinuations du négociateur qu'il l'avait été aux sommations d'Alexandre, répondit fièrement à M. de Talleyrand« Si j'acceptais une constitution de mon peuple, « dans la séance où je jurerais de l'observer, vous seriez «assis et je serais debout! » Cette attitude seule de celui qui prête un serment devant celui qui l'impose paraissait au roi la réfutation la plus énergique du rôle subalterne que les prétentions du sénat voulaient assigner à la couronne. Il méditait un autre rôle pour la royauté : il voulait confondre la majesté d'un descendant de Louis XIV et la prudence d'un politique du xix siècle venant pacifier une révolution sans la reconnaître, dans une sagesse émanant du trône, non par suggestion, mais par inspiration. Mais la crainte de l'empereur Alexandre et le désir d'user la résistance de ce prince par la temporisation l'empêchérent encore d'entrer immédiatement dans sa capitale. Il voulait s'en rapprocher pas à pas, afin d'accroître le désir

du peuple par l'impatience. Les royalistes qui venaient d'heure en heure lui rapporter les sentiments de ce peuple faisaient espérer au roi qu'un mouvement irrésistible d'opinion éclaterait malgré l'empereur de Russie et malgré le sénat à son approche, et qu'une acclamation renverserait ces barrières factices qu'on voulait élever entre la nation et lui. Il se rendit au château isolé de Saint-Ouen, ancienne demeure de M. Necker, dans la plaine de Saint-Denis, aux portes de Paris, comme s'il eût voulu, par le choix de ce lieu des conférences, rappeler à la nation le souvenir d'un ministre populaire qu'il avait lui-même soutenu jadis dans la convocation des états généraux du royaume. La nécessité de préparer son entrée royale à Paris fut le prétexte de ce séjour inexpliqué sous les murs de sa capitale. Le véritable motif fut une dernière négociation avec Alexandre et avec les résistances d'opinion qui lui contestaient le suprême pouvoir.

Mais ce rapprochement même était une menace à laquelle le sénat, à la fois pressé et retenu par M. de Talleyrand, ne résista pas. A peine le roi était-il établi à Saint-Ouen que l'élan général emporta vers cette résidence tous les royalistes ou tous ceux qui feignaient de l'être. Le peuple lui-même inondait les champs et les routes qui conduisent à cette demeure. Paris débordait d'impatience, d'émotion et de curiosité vers Saint-Ouen. Le sénat se hâta d'y envoyer une députation, et confia à M. de Talleyrand lui-même la parole en son nom. Cette parole, qui n'avait plus d'autre mission que de sauver les apparences, s'étudia à être aussi flexible et aussi agréable au roi que réservée et digne pour

le sénat, Mais on y sentait déjà la résistance qui se lasse et les prétentions qui capitulent avec la force en se réfugiant dans le sentiment.

:

«Sire, disait M. de Talleyrand au nom de la députation « du sénat, tous les cœurs sentent que ce bienfait ne pouvait être dû qu'à vous-même aussi tous les cœurs se précipitent sur votre passage. Il est des joies que l'on ne << peut feindre celle dont vous entendez les transports est « une joie vraiment nationale.

:

« Le sénat, profondément ému de ce touchant spectacle, << heureux de confondre ses sentiments avec ceux du peuple, vient, comme lui, déposer au pied du trône les témoignages de son respect et de son amour.

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"

"

Sire, des fléaux sans nombre ont désolé le royaume de « vos pères. Votre gloire s'est réfugiée dans nos camps; les << armées ont sauvé l'honneur français en remontant sur « le trône, vous succédez à vingt années de ruines et de << malheurs.

་་

« Cet héritage pourrait effrayer une vertu commune; la réparation d'un si grand désordre veut le dévouement « d'un grand courage; il faut des prodiges pour guérir les « blessures de la patrie; mais nous sommes vos enfants, et « les prodiges sont réservés à vos soins paternels.

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« Plus les circonstances sont difficiles, plus l'autorité royale doit être puissante et révérée. En parlant à l'imagination par tout l'éclat des anciens souvenirs, elle saura

« se concilier tous les vœux de la raison moderne en lui « empruntant les plus sages théories politiques.

« Une charte constitutionnelle réunira tous les intérêts « à celui du trône, et fortifiera la volonté première du con« cours de toutes les volontés.

<< Vous savez mieux que nous, sire, que de telles institutions, si bien éprouvées chez un peuple voisin, donnent << des appuis et non des barrières aux monarques amis des lois et pères des peuples.

« Oui, sire, la nation et le sénat, pleins de confiance << dans les hautes lumières et dans les sentiments magna« nimes de Votre Majesté, désirent avec elle que la France « soit libre pour que le roi soit puissant.

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Le roi affectant une majesté silencieuse, comme un esprit dont la résolution ne délibère plus, se borna à répondre par un de ces vagues remerciments qui laissent tout espérer et tout craindre. Il ne fit aucune allusion aux termes ambigus et politiques dans lesquels M. de Talleyrand avait enveloppé les prétentions expirantes du sénat, Ce silence y répondait assez par son dédain, et comme s'il eût voulu les braver ou les défier davantage, il fit publier quelques heures après la fameuse déclaration de Saint-Ouen, cet ultimatum de la royauté à la révolution. Cette déclaration rappelait en tout celle de Louis XVI lorsque ce prince voulut éluder tardivement les états généraux en les devançant par des concessions au siècle. Mais Louis XVI parlait seul et sans force la veille d'une révolution qui ne voulait plus attendre. Louis XVIII parlait au milieu d'un million de baïonnettes européennes, maîtresses du sol asservi de la patrie, au cœur d'un peuple fatigué de vingt-cinq ans de luttes et sur les ruines d'un empire qui demandait à la royauté non la liberté, mais la vie. L'empereur Alexandre, qui avait eu communication le matin de ce projet de déclaration, avait exigé en termes impérieux la modification de quelques articles.

"

Cette déclaration s'exprimait ainsi :

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Louis, par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes verront, salut:

Rappelé par l'amour de notre peuple au trône de nos pères, éclairé par les malheurs de la nation que nous sommes appelé à gouverner, notre première pensée est « d'invoquer cette confiance mutuelle si nécessaire à notre « repos, à notre bonheur.

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Après avoir lu attentivement le plan de constitution

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