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CHAPITRE VII.

SUITES DE LA BATAILLE DE WURTCHEN.

Dès la pointe du jour, l'armée quitte ses bivouacs et se met à la poursuite de l'ennemi, qui a marché toute la nuit.

Le duc de Reggio reste avec le douzième corps pour la garde du champ de bataille. Il se portera ensuite dans la direction de Berlin, que l'empereur ne perd jamais de vue, et tiendra en échec l'armée de Bulow qui est de ce côté.

Le duc de Bellune, avec le deuxième corps et la cavalerie du général Sébastiani, sont au moment de rejoindre l'armée, et vont y remplacer le corps du duc de Reggio.

Tous les blessés qui peuvent se traîner sont déjà sur la route de Dresde, où les ressources d'une grande ville leur promettent de prompts secours. Mais dix mille hommes, amis ou ennemis, sont encore étendus dans la plaine. Le zèle et les efforts de notre respectable Larrey et de ses

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services d'ambulance peuvent à peine suffire aux premiers pansemens! et la réunion des moyens de transport nécessaires présente des difficultés presque insurmontables. Cette plaine est dévastée; la route est épuisée; on ne trouve plus nulle part ni chevaux ni charrettes; tous les villages sont brûlés ou saccagés; les habitans dispersés... Mais l'humanité a des ressources qui ne sont qu'à elle: c'est ici qu'il faut la voir briller de tout son éclat : le tableau touchant qu'elle nous offre est unique, je crois, dans l'histoire des guerres.

Cette population de villageois, errante et sans asile, que le malheur devrait aigrir, que le désespoir pourrait animer, n'écoute plus que la voix de la pitié; dans leur résignation sublime, ils trouvent tout simple de se rendre utiles à des êtres que la guerre à fait plus malheureux encore qu'ils ne le sont eux-mêmes, et ils accourent sur le champ de bataille. Hommes, femmes, jeunes filles, enfans, vieillards, tous s'empressent. Chaque famille a sa brouette, et bientôt chaque blessé a sa famille. Les plus forts s'attèlent, les plus faibles poussent; tous environnent le blessé et le soutiennent; de temps en temps on s'arrête pour lui donner quelque repos, pour lui remettre ses bandages; et, si l'on passe près d'une source, pour lui aller chercher l'eau que dans sa fièvre il veut boire. La route est

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bientôt couverte de ces nouveaux équipages d'ambulance, et nos blessés roulent ainsi vers Dresde au milieu du cortége consolateur qui s'est dévoué pour les conduire....... Jamais ces longues files de brouettes, et les groupes touchans qui les entourent, ne sortiront de ma mémoire! Puisse mon récit en transmettre d'âge en âge le souvenir à la reconnaissance de la France. Bons Saxons, quelque grands que soient vos malheurs, vous faites encore plus de bien qu'on ne vous fait de mal, et ce triomphe est sacré1!

Mais, hâtons-nous de revenir aux événemens militaires; leur marche ne s'est pas ralentie. La journée qui 'succède à la bataille n'est encore qu'une suite de combats.

Le général russe Miloradowitch a repris son commandement à l'arrière-garde ; et tandis que l'armée des alliés se retire vers Lobau et Lowemberg, où le quartier-général des souverains est déjà arrivé, Miloradowitch emploie toute son habileté à ralentir notre poursuite. Le terrain lui est favorable. Dans ce pays entrecoupé, ce n'est que défilés à traverser, hauteurs à franchir, et nous trouvons l'ennemi établi partout où il peut nous disputer la route avec quelque avan

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Les Saxons évaluent à vingt mille les blessés de toutes les nations qui sont rapportés à Dresde.

tage. On n'avance que de position en position. A chaque pas il faut attendre, sous le canon de l'ennemi, que nos ailes, en se déployant, aient réussi à le déposter; et, jusqu'au dernier moment de sa retraite, ses boulets pleuvent sur la grande route, et l'enfilent dans tous ses contours à mesure que nous y pénétrons.

Cependant l'empereur, dès le point du jour, s'est porté de sa personne à l'avant-garde ; il en presse les mouvemens; il y reste toute la journée; il ne veut point donner de relâche à l'ennemi, et c'est en sa présence que nous occupons successivement les hauteurs de Weissenberg, de de Rothkretsham, de Schoepp et de Reichembach '.

L'engagement le plus sérieux de la journée a lieu dans cette dernière position.

L'empereur, arrivant sur le plateau de Schoepp, trouve les Russes fortement établis de l'autre côté, sur les hauteurs de Reichembach. On s'arrête, et tandis que les manœuvres d'attaque se

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Napoléon se trouvait à l'avant-garde..... Il dut rendre grâce à sa belle étoile. Plusieurs boulets vinrent s'enterrer auprès de lui. L'un de ces boulets coucha par terre à dix pas en avant, plusieurs hommes de l'infanterie légère saxonne. (Le major saxon d'Odeleben, témoin oculaire ; tom. I, pag. 99. )

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préparent, on se canonne. A gauche, le général Reynier s'avance avec l'infanterie saxonne du septième corps. Il est chargé de l'attaque de Reichembach. A droite, au fond du vallon, on voit les lanciers rouges de la garde qui déploient leurs riches couleurs. Les lanciers ennemis descendent à leur rencontre; ils sont en force, et d'abord l'avantage semble rester au nombre. Mais les cuirassiers de Latour-Maubourg se présentent, et bientôt les lances reculent devant les hommes de fer. Les alliés finissent par nous abandonner le passage de Reichembach. Cependant la victoire nous fait acheter maintenant ses moindres faveurs; le général de cavalerie Bruyères vient d'être emporté par un boulet. L'armée ressent vivement cette perte, et chacun répète avec douleur : C'est encore un ancien de l'armée d'Italie!

Nous retrouvons l'ennemi posté sur les hauteurs en arrière de Reichembach. L'empereur, qui est sans cesse sur les pas de l'avant-garde, arrive et fait encore déployer les troupes pour attaquer. Les boulets sifflent de nouveau, et bientôt après l'ennemi se met en retraite. Napoléon ne peut cacher un mouvement d'humeur en voyant cette arrière-garde lui échapper toujours. « Comment! dit-il, après une telle bou>> cherie aucun résultat! point de prisonniers !

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