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d'un vivant, ne parlant pas, et toutes fécondant de leurs sueurs pénitentes les sables des dunes où poussent maintenant les fleurs les plus variées, des récoltes magnifiques, et où se nourrit un bétail de choix. Elles n'ont d'autre clôture que leur parole donnée à Dieu. Les unes sont venues là poussées par l'amour de la souffrance, les autres y expient volontairement les égarements de leur vie. Le fondateur est M. l'abbé Cestac, originaire de Bayonne, mort en 1868, à l'âge de soixante-sept ans. Cette œuvre résume toute son existence, et son biographe a été heureusement inspiré dans la division de son livre : l'œuvre préparée, l'œuvre fondée, l'œuvre consommée. La préparation est au milieu d'une famille chrétienne, auprès d'une mère pieuse et d'une sainte sœur, qui sera son auxiliaire, et qu'on appellera la « Mère vénérée. » Elle est au collège de Bayonne, au séminaire d'Aire, à Saint-Sulpice, au séminaire de Larressore, dans le ministère paroissial, où l'abbé Cestac passe comme élève et comme professeur, avec des saillies de caractère qui faisaient présager un saint ou un fléau de l'humanité. C'est à Bayonne qu'il fit ses premiers essais, avec de petites orphelines qu'il recueille et auxquelles il adjoignit bientôt des pénitentes. Les débuts sont misérables, les ressources manquent, les critiques abondent, l'installation est des plus défectueuses; mais le serviteur de Dieu ne fait rien sans la prière, et, au milieu de toutes les difficultés dont sont marquées les œuvres fécondes, il arrive aux résultats que l'on connaît. M. l'abbé Pujol a eu, pour faire connaître l'homme et son œuvre, toute sa correspondance et toutes ses notes, qui nous révèlent des vertus admirables, un oubli de soi complet, un entier abandon à la divine Providence, une simplicité angélique qui lui faisait accepter tous les éloges donnés au Refuge, parce qu'il ne se considérait que comme un instrument. Nous y voyons aussi, dans tous ses détails intimes, le fonctionnement et les constitutions de la communauté. Nous ne saurions vraiment dire ce qui est le plus satisfait dans cet ouvrage, de la piété ou de la curiosité. Nous recommandons particulièrement le chapitre sur les « rapports avec Napoléon III, » qui, on le sait, venait souvent à Biarritz. Comment ne pas admirer la franchise de l'abbé Cestac, et plus encore cette simplicité avec laquelle il s'adresse à la sainte Vierge pour savoir ce qu'il doit dire au souverain et garde le silence lorsque son inspiratrice ne lui souffle rien. Nous aimerions que M. l'abbé Pujol fit disparaître, dans une prochaine édition, certaines expressions qui sont des négligences, ou qui sont du terroir, et qu'il fondit davantage les citations dans son récit.

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22. C'est une vie curieuse à tous égards que celle de M. Eugène Boré, l'avant-dernier supérieur général de la Congrégation de la Mission, qui, toujours pieux laïque, toujours poussé par le désir du salut des âmes, partageant longtemps les travaux des lazaristes,

n'entra dans les ordres qu'à l'âge de quarante ans. Il serait digne de trouver un historien, et nous croyons qu'il l'aura, car ici nous n'avons que des notes, des extraits de sa correspondance, de son journal, le tout réuni à la hâte pour calmer l'impatience des deux familles religieuses que sa mort a privées de leur père. M. Boré n'a pas été seulement un chrétien exemplaire, un religieux accompli; il était aussi un savant remarquable, un linguiste des plus distingués; il a professé au collège de France. Il appartenait à ce groupe d'élite qui s'était réuni sous la direction de Lamennais; il fut un des derniers qui resta en relations avec le « maître. » Leur correspondance est des plus intéressantes, ainsi que le récit des démarches faites auprès du fils rebelle de l'Église. Ici encore, nous trouvons une mère vertueuse présidant à l'éducation de son fils, et celui-ci, au milieu de ses succès, témoignant une piété filiale aussi touchante que de bon augure; nous rencontrons aussi Théodore de Bussières. Puis que d'intérêt dans tous ces voyages à Rome, en Orient où il fonde des écoles, établit des conférences de Saint-Vincent de Paul, seconde les lazaristes dans leurs œuvres ! Et ce qui ajoute à l'intérêt, c'est que tous les fragments de journal et de correspondance, en même temps qu'ils racontent, nous font pénétrer dans l'intérieur de cette âme de choix, nous font connaître ses pensées intimes, où il n'y a rien à cacher, et nous révèlent des vertus que le public n'aurait pu soupçonner.

23. Bernadette vient ici la dernière, quoi qu'elle ne soit pas la moindre, après les grâces signalées qu'elle a reçues; mais elle est arrivée après tous ceux qui précèdent au terme au-delà duquel il est permis de louer les chrétiens. Sa mort ne remonte qu'au 16 avril 1879, alors qu'elle n'avait que trente-cinq ans. Bernadette, n'est-ce pas Notre-Dame de Lourdes? Son nom est, comme sa personne, indissolublement lié aux merveilleus es apparitions; il est répété par les innombrables pèlerins qui viennent du monde entier vénérer dans la grotte de Massabielle Celle qui s'est dite l'Immaculée-Conception. Aussi l'historien de Notre-Dame de Lourdes n'a-t-il eu qu'à reproduire une partie de son ouvrage pour faire connaître le rôle de Bernadette dans les apparitions; il y a ajouté un livre sur la part qu'elle a eue dans son histoire, ses relations, ses communications avec lui pour lui fournir les renseignements qui lui étaient nécessaires. Il rappelle ce fait curieux que c'est un de ses amis protestants, aujourd'hui personnage considérable, dont le nom n'est pas à céler, M. de Freycinet, qui le décida à recourir à Notre-Dame de Lourdes pour obtenir sa guérison, et il rapporte deux traits frappants d'une intervention que nous pouvons qualifier de surnaturelle pour le décider à être l'historien de Lourdes. Un troisième livre est consacré à la vie cachée, à la vie religieuse chez les sœurs de la Charité et de l'Instruction chrétienne de Nevers, au milieu

desquelles Bernadette a vécu depuis 1866, époque de sa vêture. La petite bergère honorée de la visite de la Reine du ciel ne pouvait pas vivre au milieu du monde. Elle avait, dès longtemps, l'attrait de lavie retirée, et la curiosité dont elle était l'objet, même de la part des plus saints personnages, lui a toujours pesé; elle ne redoutait rien tant que de paraître au parloir. Ce n'était point une sainte : elle avait les défauts inhérents à la nature humaine, et elle fit l'admiration de ses compagnes par l'énergie qu'elle mit à les combattre. Pour la rendre plus digne du bonheur que la Vierge lui avait promis, les épreuves ne lui ont pas manqué. Elle eut à supporter d'horribles souffrances, qui la rendaient impropre à accomplir les offices dont elle était chargée. Ses simples et douces vertus ont laissé un parfum exquis, dont sont empreintes les pages charmantes que M. Henri Lasserre lui consacre. Quiconque a lu Notre-Dame de Lourdes voudra les lire, pour renouveler l'ineffable impression qu'il en a reçue, et pressera son historien de donner la vie de M. l'abbé Peyramale qu'il promet pour bientôt.

24. Nous avions terminé cette revue des saints et pieux personnages, lorsque nous est arrivé un ouvrage sur saint Michel. Le glorieux archange eût dû se trouver en tête du cortège, puisqu'il est le premier dans l'ordre du temps, étant vraiment préhistorique. Des circonstances indéperdantes de notre volonté nous ont forcé à lui assigner une autre place, qui lui convient également, puisque c'est une place d'honneur: c'est lui qui fermera la marche. Nous avons là toute son histoire, si l'on peut parler ainsi, depuis sa création et sa lutte victorieuse contre Lucifer, jusqu'à son intervention dans les affaires de ce monde, qui s'est manifestée souvent d'une façon éclatante défenseur de l'Église, ange gardien de l'Eucharistie, protecteur du Souverain-Pontife, de Rome, de la France, des armées chrétiennes, secours des agonisants, consolateur des âmes du purgatoire, se montrant souvent aux regards des humains pour ranimer leur courage. Il apparaît, dans les temps apostoliques, à Colosses; c'est lui qui porte le labarum devant Constantin. Parmi les apparitions qui ont laissé le plus de souvenirs, il faut citer celle du mont Gargan, en Italie, au cinquième siècle, qui donna naissance à un sanctuaire très fréquenté; celle du mont Tombe, au huitième siècle, sur lequel s'élève aujourd'hui la merveille de l'Occident, la splendide abbaye du Mont-SaintMichel, centre d'un pèlerinage dont les foules ont repris le chemin depuis les épreuves auxquelles notre pays est soumis. C'est avec raison que, parmi les nombreux sanctuaires élevés en l'honneur du chef des milices sacrées, l'auteur cite, comme un des plus curieux, celui qui couvre une des masses volcaniques qui donnent un aspect si pittoresque à la ville du Puy. La dernière partie de l'ouvrage de M. l'abbé Soyer s'occupe du culte de saint Michel, qu'on trouve dans

toutes les parties du monde, et qu'ont pratiqué les saints et les ordres religieux. Des ordres de chevalerie, des confréries, des corporations ont été institués sous son patronage, et, aujourd'hui encore, beaucoup d'œuvres s'abritent sous son nom. M. l'abbé Soyer a réuni dans ce volume sans doute tout ce qu'on peut dire de saint Michel : l'Écriture sainte, les Pères, la théologie, l'histoire, l'archéologie ont été mis à contribution. Nous aurions voulu qu'il indiquât avec plus de précision et d'exactitude les sources auxquelles il a puisé et qu'il en établît ou discutât l'autorité. Il eût dû aussi dire plus nettement s'il donnait un ouvrage nouveau, ou seulement une nouvelle édition de celui pour lequel il a reçu les approbations épiscopales publiées dans l'avantpropos. Son livre est d'une lecture facile et intéressante: il ne peut que raviver la confiance de nos compatriotes en celui qu'on appelle : Patronus et princeps imperii Galliarum. VICTOR MORYAT.

POÉSIE

I. 1. Fleurs du Sancy, poésies, par JOSEPH DE COMBEROUSSE. Paris, Ghio, 1879, in-18j. de 183 p. Prix: 3 fr. 2. Mes vers, sommets et gouffres, par ADOLPHE MARTIN. Paris, Ghio, 1879, in-12 de 90 p. Prix: 2 fr. 50. 3. Martura ou un mariage civil, par THEODORE VIBERT. Paris, Ghio, 1879, in-12 de 62 p. Prix: 1 fr. 4. Hardymile, poème, par JULES FRANC. Paris, Ghio, 1879, in-12 de 102 p. Prix: 3 fr. 5. Champs et rues, improvisations poétiques, par JULES NOLLÉE (de Noduwez). Paris, Ghio, 1879, in-12 de 216 p. Prix: 3 fr. 50. 6. Le Sang du Christ, poème, par J.-E. BOQUET. Paris, Palmé, 1879, in-16. 7. La Nouvelle Eve, poème, par J.-E. BOQUET. Paris, Palmé, 1879, in-16 de 156 p. Prix: 2 fr. 8. Pie IX le Grand, par l'abbé HOVINE. Lille, imp. Lefort, 1879, in-8 de 20 p. 9. Nouvelles géorgiques, par J. DuRANDEAU. Deuxième édition. Paris, Jouaust, 1879, in-12. Prix: 3 fr. 50. 10. Les Voix perdues d'un paysan, par TH. GESLAIN. Paris, Rouveyre, 1878, in-12 de 135 p.. avec frontispice à l'eau-forte de Pierdon. Prix : 3 fr. 50.

II.

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11. Les Amanis, par LEON DIERX, Paris, Lemerre, 1879, in-18 j. de 146 p. Prix : 3 fr. 12. Le Livre d'un inconnu. Paris, Lemerre, 1879, in-18 j. de 99 p. Prix : 3 fr.-13. Charlotte Corday, poème, par HENRI WELSCHINGER. Paris, Lemerre, 1879, in-8 de 143 p. Prix: 3 fr. 50. 14. Une gerbe, poésies, par PAMPHILE LE MAY. Québec, Darveau, 1879, in-12 de 232 p. 15. Le Surnaturel dans l'art ou naissance chrétienne, poésies, par LUCIEN DEGRON. Paris, Palmé; Caen, Le Blanc-Hardel, 1879, in-12 de 202 p. Prix: 2 fr. 50. 16. Les Premiers Chants, recueil de poésies destinées au jeune âge, par MARIE JENNA, avec une eau-forte de Monnin. Paris, Reichel, 1879, in-16 de 126 p. Prix: 2 fr. 17. Les Tristesses, par GEORGES RODENBACH. Paris, Lemerre, 1879, in-18 j. de 122 p. Prix: 3 fr.

I

1.-M. Joseph de Comberousse, porteur d'un nom bien connu dans la littérature, vient de réunir différentes pièces composées par lui en 1877 et en 1878, et nous les présente comme un bouquet de Fleurs du Sancy. Ce gracieux titre rappelle la nature sauvage et pittoresque de cette vieille terre d'Auvergne qui, cependant, a inspiré jusqu'ici bien peu de poètes. Le volume contient une quarantaine de pièces d'une longueur d'haleine et d'une valeur inégales; mais presque toutes sont dictées par des sentiments, sinon chrétiens, au moins honnêtes, ce NOVEMBRE 1879.

T. XXVI, 25.

qui est assez rare de nos jours pour que nous nous plaisions à le signaler ici. C'est ainsi que l'auteur doit ses plus belles pages à son amour du pays natal de la petite patrie à l'amitié, aux joies de la famille et surtout à l'amour maternel, amour qui lui a inspiré ses vers les mieux frappés et les plus poétiques. Pourquoi donc, au milieu de son volume plein de pensées et d'accents dignes d'un chrétien, a-t-il placé un dithyrambe en l'honneur de Jean-Jacques Rousseau? Que ne l'a-t-il laissé aux ombrages d'Ermenonville?

2.-M. Adolphe Martin, l'auteur de Mes vers, a lu Baudelaire, Albert Glatigny et autres, et s'efforce de copier ses modèles. Il est quelquefois bon d'imiter, mais pour cela il faut être bien sûr de soi et ne pas prendre les défauts du maître pour lui laisser ses qualités. C'est là cependant ce qu'a fait notre poète. S'il a adopté une allure de style franche et aisée, qui ne messied pas à ses pièces courtes et légères, il a pris en même temps un genre d'esprit que nous sommes loin de recommander aux jeunes poètes. Croit-il, en effet, qu'il suffise de tourner en dérision la religion ou ses ministres, ou même M. L. Veuillot, pour paraître spirituel? Après cela, si c'est pour les lecteurs de la Lanterne qu'écrit M. Martin, c'est son affaire.

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3. Dans sa courte brochure, intitulée Martura (?), M. Th. Vibert raconte l'histoire d'une jeune fille livrée par son tuteur à un libertin. Celui-ci, après l'avoir épousée civilement, se refuse au mariage religieux et l'offense dans sa dignité de femme. Pour se défendre, Martura n'a d'autre ressource que de tuer le misérable. Elle est guillotinée. Le récit est dramatique, quoique écrit dans un style parfois trivial, mais le sujet empêche que ce livre puisse convenir à beaucoup de lecteurs. 4.-M. Jules Franc nous donne une légende gallo-franque assez obscure. Indépendamment des incorrections dans le style et des faiblesses poétiques, on y trouve des pages entièrement incompréhensibles. Hardymile a cru, dans un accès de jalousie, tuer son mari Kernelend, qui la trahissait à la cour de Brunehaut. Elle a épousé ensuite le guerrier Raghinfred; mais Kernelend n'était pas mort et se venge. On se demande ce que viennent faire les druides et les rites gaulois dans un poème mérovingien.

5. M. Jules Nollée (de Noduwez) est un homme du monde et du meilleur monde; aussi je m'étonne qu'il ait choisi pour son volume le titre bien démocratique de Champs et rues. On se représente difficilement l'auteur de certaines pièces de ce recueil, telles que les Petits Crevés, le Cigare, Mon cigare, Epitre sur le tabac, Ladiska, composant dans les champs ou dans les rues. Les fleurs qu'il nous offre ont un parfum trop ambré pour n'être pas nées dans l'atmosphère attiédie des salons. Nous pourrions, toutefois, citer telles pages dans son volume qui sont de beaucoup supérieures à nombre de pastorales

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