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dulgent que sévère et disposé à tempérer la violence de Gassion. Ce fut encore Fouquet qui annonça au cardinal la mort de ce maréchal1.

Lorsque la Fronde éclata, en 1648, Nicolas Fouquet resta dévoué à Mazarin. Le cardinal le chargea, pendant la première guerre civile, d'approvisionner l'armée royale. Mazarin écrivait sur ses carnets, en décembre 1648, au moment où il prenait toutes les mesures pour assiéger Paris : « Envoyer Fouquet en Brie, avec ordre d'y faire de grands magasins de blé pour la subsistance de l'armée. » On voit, en effet, Fouquet, établi à Lagny, lever des contributions de blé et d'avoine sur les paysans de la Brie et de l'Ile-de-France. Il fut aussi chargé par Mazarin de percevoir des taxes sur les riches habitants de Paris, sous prétexte de sauver du feu leurs châteaux et leurs maisons de campagne. On a encore l'arrêt du conseil du roi qui confiait cette périlleuse mission à Nicolas Fouquet, ainsi que le rôle des taxes, rédigé à la suite de l'arrêt. Le Parlement s'émut de ces contributions forcées qui frappaient surtout les magistrats; il défendit de les payer, et enjoignit à Nicolas Fouquet d'apporter au greffe de la cour la commission qui lui ordonnait de

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Voy, la réponse de Mazarin à Nicolas Fouquet en date du 30 septembre 1647.

Carnet XI, fol. 85. Les carnets de Mazarin font partie des manuscrits de la Bib. imp. F. Baluze.

5 Journal d'Olivier d'Ormesson, t. I, p. 680, 681. - Voy. aussi les lettres de Fouquet à Mazarin conservées aux archives des affaires étrangères, FRANCE, t. CXXII.

4 Journal d'Olivier d'Ormesson. Ibidem.

5 Ces pièces se trouvent dans le Choix de Mazarinades, publié par M. Moreau pour la Société d'hist. de France, t. I, p. 208.

les lever, sous peine d'interdiction de son office de maître des requêtes '. La correspondance de Fouquet prouve que ces menaces ne l'intimidèrent point, et qu'il aima mieux obéir au roi qu'au parlement.

Son dévouement fut récompensé lorsque Mazarin eut triomphe de la Fronde parlementaire. Fouquet fut alors appelé à des fonctions analogues à celles d'intendant de l'Ile-de-France. Après l'arrestation des princes, en janvier 1650, il accompagna le roi, qui se rendit en Normandie pour prévenir la révolte que la duchesse de Longueville s'efforçait d'y exciter3. Au retour des voyages de la cour, qui avait parcouru, après la Normandie, la Bourgogne, le Poitou et la Guienne, Nicolas Fouquet acheta, avec l'agrément du cardinal Mazarin, la charge de procureur général au parlement de Paris. Les dates sont fixées par le passage suivant du Journal de Dubuisson-Aubenay : « Ce soir, 10 octobre 1650, M. le duc d'Orléans retourne de Limours à Paris, et M. Fouquet, maître des requêtes, le va prier pour l'agréer en la charge de procureur général, dont M. Méliand lui a fait sa démission, acceptée en cour, moyennant sa charge de maître des requêtes, estimée plus de cinquante mille écus, par le fils dudit sieur Méliand, de longtemps conseiller en parlement, et cent mille écus

1 Journal d'Olivier d'Ormesson, t. I, p. 681.

Ibidem, p. 801.

3 « Les sieurs Fouquet et de la Marguerie tous deux maistres des requestes, vont à la suite de la cour. » Journal de Dubuisson-Aubenay, à la date du 1er février 1650. Voy. sur ce journal, qui fait partie des manuscrits de la bibliothèque Mazarine, mon Introduction en tête du premier volume du Journal d'Olivier d'Ormesson.

de plus en argent, desquels cent mille écus la reine a fait expédier un brevet de réserve, ou sûreté, audit sieur Fouquet, au cas qu'il vînt à mourir dans ladite charge. »

Ce fut le 28 novembre 1650, à la rentrée du parlement, que Nicolas Fouquet porta, pour la première fois, la parole en qualité de procureur général'. Cette position lui donnait une haute influence dans un corps puissant et généralement hostile à Mazarin. Fouquet n'en usa que dans l'intérêt de son protecteur, auquel il se montra aussi fidèle dans la mauvaise fortune que dans les jours de prospérité. Il lui fallut une grande souplesse pour contenir et diriger une assemblée infatuée de ses priviléges, qui se croyait supérieure aux états généraux, et qui joignait à l'administration de la justice le contrôle des affaires politiques et des attributions trèsétendues et très-importantes en matière de police et de finances. Plus de deux cents magistrats siégeaient dans les huit chambres du parlement. Il y avait cinq chambres des enquêtes, composées généralement des jeunes conseillers; deux chambres des requêtes; et, enfin, la grand'chambre, qui était formée des plus anciens conseillers ecclésiastiques et laïques, magistrats d'une expérience consommée et d'une grande autorité judiciaire. C'était là que siégeaient les présidents à mortier. Les

Même journal, à la date du 1er décembre 1650.

« M. de Mesmes a dit que les parlements tenoient un rang au-dessus des états généraux, étant comme médiateurs entre le peuple et le roi. » Journal d'Olivier d'Ormesson, t. I, p. 698. Le Journal de Dubuisson-Aubenay confirme ce fait : « Le président de Mesmes a dit que le parlement ne députe et n'assiste jamais aux états généraux, qui lui sont inférieurs. »

membres du parlement n'étaient pas seulement inamovibles, ils étaient propriétaires de leurs charges. Lorsqu'ils avaient payé au trésor un droit nommé paulette, ils pouvaient les transmettre à leurs fils. Ainsi s'étaient formées les familles parlementaires qui ont été l'honneur de l'ancienne magistrature. Les noms des Molé, des Potier, des Talon, des Lamoignon, des de Harlay, des de Mesmes, réveillent des idées de science, de vertu et de courage civil; mais l'union de ces magistrats pouvait devenir redoutable à la royauté. La vaste circonscription territoriale qu'embrassait le parlement de Paris ajoutait encore à sa puissance. Sa juridiction comprenait l'Ilede-France, la Picardie, l'Orléanais, la Touraine, l'Anjou, le Maine, le Poitou, l'Angoumois, la Champagne, le Bourbonnais, le Berry, le Lyonnais, le Forez, le Beaujolais et l'Auvergne1.

En 1650, le parlement de Paris avait à sa tête le premier président Mathieu Molé, qui est resté le type du magistrat honnête et ferme. Ce n'était pas, comme l'a dit le cardinal de Retz, un homme tout d'une pièce; Mathieu Molé avait beaucoup d'habileté politique et savait parfaitement que les affaires de finance, de police, et, en général, de gouvernement, ne se dirigent pas, comme l'administration de la justice, d'après des maximes absolues. Il usait de tempéraments suivant les

On peut consulter sur le parlement de Paris les Mémoires d'Omer Talon et de Mathieu Molé, le Journal d'Olivier d'Ormesson, le Journal du parlement, l'Histoire du temps, les Treize Parlements de France, par la Roche Flavin, les Éloges des premiers présidents du parlement de Paris, par l'Hermite, les Présidents à mortier du parlement de Paris. par Blanchard. etc.

circonstances, se ménageait entre la cour et le parlement, faisait entendre à la première des vérités hardies et un langage énergique sans rompre avec elle, et résistait aux entraînements factieux des jeunes conseillers, tout en maintenant l'autorité de sa compagnie. Toutefois, si Mathieu Molé n'avait eu que ce manége politique, il eût pu passer pour un homme habile, mais il n'eût jamais mérité la réputation de grand magistrat que lui a confirmée la postérité. C'est à son courage pendant la Fronde qu'il a dû sa gloire. Un de ses adversaires, le cardinal de Retz, l'a caractérisé en ces termes : << Si ce n'était pas une espèce de blasphème de dire qu'il y a quelqu'un dans notre siècle de plus intrépide que le grand Gustave et M. le Prince', je dirais que ç'a été M. Molé, premier président. »

Autour du premier président se groupaient d'autres magistrats éminents par l'esprit et par le caractère : le président Henri de Mesmes était un des principaux. Il appartenait à une famille éminente, et son frère, Claude de Mesmes, comte d'Avaux, avait été un des négociateurs de la paix de Westphalie. Le cardinal de Retz, qui ne pardonnait pas au président de Mesmes de s'être opposé 'à ce qu'il siégeât et eût voix délibérative dans le parlement, l'accuse de lâcheté devant le peuple, et de servilité à l'égard de la cour; il le montre tremblant comme la feuille en présence de l'émeute qui gronde aux portes du parlement. Mais dans des récits plus impartiaux et

Gustave-Adolphe, roi de Suède, et Louis de Bourbon, prince de

Condé.

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