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dépourvue! Un mariage national eût été et plus honorable et plus profitable pour Napoléon; mais il voulait entrer, avec armes et bagages, dans la famille des rois, et cette ivresse de vanité entraîna sa ruine.

Quels respects, quel amour, quels honneurs ne seront pas prodigués à Marie-Louise, lorsqu'elle entrera dans la capitale de l'empire français ! Et, avant trois années, on pourra faire l'application des vers suivants à cette jeune princesse :

Au bonheur des mortels esclaves immolées,
Sur un trône étranger avec pompe exilées,
De la paix des états si nous sommes les nœuds,
Souvent nous payons cher cet honneur dangereux ;
Et, quand sur notre hymen le bien public se fonde,
Nous perdons le repos que nous donnons au monde.
( LEMIERRE.)

On aurait aussi pu mettre cette maxime dans la bouche de sa tante infortunée, de Marie-Antoinette, accourue des mêmes lieux pour recevoir les adorations des Français, lorsque, ayant perdu leur affection, elle descendit si vite du faîte des grandeurs dans les abymes des révolutions, prête à tomber dans la profondeur des cachots, devenant l'exemple à jamais mémorable de la plus cruelle adversité qui ait frappé une reine !

17. Un sénatus-consulte organique sanctionne le décret du 17 mai 1809, ordonnant la réunion à l'empire français de Rome et des états du pape, lesquels formeront deux départements. Il est déclaré que toute souveraineté étrangère est incompatible avec l'exercice de toute autorité spirituelle dans l'intérieur de l'empire. Lors de leur exaltation, les papes prêteront serment de ne jamais rien faire contre les quatre propositions de

l'église gallicane, arrêtées dans l'assemblée du clergé, en 1682. Le pape a le choix du lieu de sa résidence; il conservera deux palais, à Paris et à Rome; sa dotation sera de deux millions en biens ruraux, francs d'impositions.

2 MARS. Les dernières dispositions du Code pénal sont promulguées. Les premières l'ont été le 1er février précédent.

Sur quatre cent quatre-vingt-quatre articles de ce Code, deux cent vingt ont pour objet spécial les délits contre la chose publique, sous les titres suivants : Crimes et délits contre la sûreté de l'état (de l'article 75 à l'article 131), crimes et délits contre l'autorité publique (de l'art. 132 à l'article 294). On comprend dans leur longue énumération la non-révélation des crimes qui compromettent la sûreté de l'état, les associations et réunions illicites, les délits commis par la voie d'écrits, images ou gravures. La majeure partie des dispositions se rapportent à l'intérêt particulier du gouvernement; et si toutes les circonstances dans lesquelles il peut y avoir crime ou délit ne sont pas présentées, il y en a très peu que le chef de l'empire ne puisse rattacher à l'un des cas punissables; il n'a qu'à le vouloir. La domination qu'il exerce sur le pouvoir judiciaire est si positive, qu'il est tout-à-fait improbable que des juges déclarés inamovibles par les constitutions, mais qui peuvent être écartés ou persécutés de beaucoup de manières, osent résister à ses ordres. Il y a trop de prudence dans les hommes de robe pour s'exposer à mécontenter le dispensateur des grâces et des promotions, le rémunérateur universel, le suprême arbitre de toutes les destinées. Quelle sauvegarde offrirait un contrat social dont, de mois

en mois, tant d'articles essentiels ont été violés ou rapportés? Le gouvernement n'a-t-il pas, en outre, des moyens extrajudiciaires dans la juridiction de la police? N'a-t-il pas le sénat conservateur, cette mécanique si bien organisée dont il tourne si commodément la manivelle, et qui lui rend, à l'instant même, les sénatus-consultes qu'il demande? Observons encore que, dans toute législation, le code pénal dépend du code d'instruction criminelle : or ce dernier code est, chez nous, beaucoup trop favorable à l'autorité, souvent nuisible à l'accusé, injuste et même barbare envers lui. En Angleterre, où les lois pénales, faites pour la plupart dans des siècles d'ignorance, de désordres, de guerres civiles, sont excessivement sévères et quelquefois atroces, en Angleterre le respect pour les anciennes institutions, respect qui s'étend jusqu'aux statuts de l'heptarchie saxonne, ne permet ni de les abolir ni de les restreindre. Si les Anglais ont tort, ils se trouvent garantis par leur code moderne d'instruction criminelle, monument admirable de justice et d'humanité, ainsi que par l'institution du double jury; tandis qu'en France, où le jury d'instruction n'existe pas, le jury de jugement n'est à peu près qu'un vain simulacre et un hypocrite hommage aux droits du citoyen. Combien plus justes étaient les dispositions de l'assemblée constituante! (V. 3 juin, 16, 17 septembre 1791.) Les lois normandes, les ordonnances des Tudor, existent encore dans la Grande-Bretagne ; mais celles que réprouvent la justice et l'humanité restent sans application, par l'effet de la procédure. Aussi Montesquieu a-t-il dit : « Les peines immodérées ré« pandent bien la terreur; mais elles ont cet effet qu'on << ne trouve plus personne pour accuser ni pour con<< damner. >>>

De l'autre côté de la Manche, nul arrêt de mort ne reçoit son exécution qu'après la sanction du roi; de ce côté-ci, la loi ne laisse que vingt-quatre heures entre la condamnation et le supplice, comme si le législateur avait appréhendé d'accorder un délai suffisant pour reconnaître et dénoncer l'erreur avant qu'elle soit irréparable. On voit, dans notre Code, un surcroît de précautions et de rigueurs quand il s'agit de délits qui tiennent, si faiblement que ce soit, au gouvernement. La peine de mort peut s'appliquer dans plus de quarante circonstances différentes et relatives à l'autorité publique; tandis qu'elle s'applique à moins d'une douzaine de cas dans les crimes commis entre les particuliers. La confiscation accompagne toujours la peine de mort dans la première espèce; heureusement, l'art. 66 de la Charte (V. 1814) viendra révoquer cette disposition. En fait de délits politiques, un commencement d'exécution équivaut à la consommation de l'attentat. « Il y a complot, suivant l'art. 89 du << Code, dès que la résolution d'agir est concertée entre << deux conspirateurs ou un plus grand nombre, quoi<< qu'il n'y ait pas eu d'attentat. » Cette résolution d'agir, sans qu'il y ait un commencement d'exécution, est punie de mort et de confiscation comme l'attentat!

Lorsque Napoléon émet un Code dans lequel on prévoit les plus légères atteintes aux droits dont il s'est revêtu, il arrive au zénith de sa puissance! Eprouvant, aujourd'hui, que personne n'ose lui résister au dedans, et se persuadant que personne n'osera lui résister au dehors, il force le ressort des lois judiciaires pour l'intérêt de son autorité. Voilà dans quel esprit le Code pénal est rédigé.

Néanmoins, les prôneurs irréfléchis du système criminel en usage dans l'ancien régime devraient con

venir que ce Code atteste l'heureux progrès des lumières, indique un grand adoucissement dans les mœurs. On ne voit pas dans la nouvelle législation, la torture, avec ses affreux préliminaires, plus terribles mille fois que la mort; la mort n'y est que la privation de la vie. On n'y lit pas d'article qui autorise de faire pendre un malheureux pour le vol de cinq sous, de mettre aux galères perpétuelles un paysan coupable d'avoir estropié un lapin qui dévorait sa chétive pitance de légumes. Peut-être, dans six ou sept cents ans, les Français, au lieu de lois draconiennes et teintes de sang, recevront-ils des lois indulgentes comme celles qu'adopta, pour les Toscans, le philanthrope Léopold; des lois équitables et dignes de véritables citoyens, telles que celles dont s'enorgueillissent les Américains de l'Union. « Les Français arrivent tard à tout, <<< dit Voltaire; mais ils arrivent. » Félicitons donc nos archi-arrière-neveux.

3. On publie un décret impérial concernant les détenus dans les prisons d'état, qu'il n'est point convenable ni de faire traduire devant les tribunaux, ni de faire mettre en liberté. Il y aura huit prisons permanentes, dans les châteaux de Saumur, Ham, If, Landskrown, Pierre-Châtel, Fénestrelle, Campiano, Vincennes. La détention sera ordonnée par le conseil privé, sur le rapport du ministre de la police ou de la justice. En outre, le premier a la faculté de mettre en surveillance les individus qui lui paraîtront devoir y être mis. Tout concierge ou gardien qui favoriserait la correspondance d'un détenu mis au secret sera destitué et puni de six mois de prison. Les détenus conserveront la disposition de leurs biens, s'il n'en est autrement ordonné. A cet effet, ils donneront,

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