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le roi d'Angleterre a jugé à propos de faire des premières démarches de la France, exigeait de sa part une exposition complète de ce qu'elle a voulu, de ce qu'elle a fait, et de la réponse du gouvernement anglais.

En même tems elle me charge d'annoncer qu'elle trouvera toujours une satisfaction réelle et chère à son cœur, de faire connaître au sénat et à son peuple, par des communications franches, entières et jamais douteuses, tout ce qui tiendra aux grands intérêts de sa prospérité et de sa gloire, toutes les fois que cette communication sera compatible avec les principes de la politique et avec les règles de la prudence.

Après ce rapport, un membre a dit qu'il convenait de faire que adresse à S. M, 1. pour la remercier du nouveau témoignage de confiance que le sénat venait de recevoir, par la communication de ce rapport si remarquable et si important, et que suivant l'usage du sénat dans les matières politiques, cet objet devait être renvoyé à une commission spéciale.

Le sénat a nommé au scrutin cinq commissaires pour lui faire un rapport à ce sujet dans une prochaine séance. Ce sont MM. Barthelemy, Cacault, Hédouville,le maréchal Perignon, et M. François (de Neufchâteau) président du sénat.

CORPS LÉGISLATIF.

Présidence de M. Fontanes.

Séance du 15 Pluviose.

M. le président annonce que des orateurs du gouvernement doivent se rendre aujourd'hui à la séance pour porter la parole au nom de sa Majesté. On introduit MM. les con seillers d'état Ségur, Dessoles et Begouen. Le premier de ces orateurs monte à la tribune.

M. L. P. Ségur, orateur. Messieurs, sa Majesté a voulu que vous fussiez instruits par une communication officielle, de faits récens qui intéressent notre situation politique.

Sa Majesté, depuis qu'elle a été élevée à la dignité impériale, a pensé que cette situation nouvelle et les circonstances qui l'y avaient placée, pouvaieut naturellement lui faire concevoir des espérances de paix.

L'ennemi désabusé du vain espoir qu'il avait fondé sur nos divisions et sur les chances d'un pouvoir électif, se trouvait dans une position qui devait le disposer à écouter des conseils plus modérés. L'empereur a fait ce que le général Bonaparte avait fait avant le passage de la Drave, ce qu'avait fait le premier Consul avant que d'être forcé de combattre à Marengo, Il a écrit à S. M. Britannique la lettre dont nous allons vous donner la lecture.

(L'orateur donne lecture de cette lettre.-Voyez l'article sénat.)

Le ca

Cette lettre, Messieurs, convenait à la dignité d'une puissance qui connaît sa force et ne veut pas en abuser. ractère et les actions de l'empereur ne permettaient pas d'y soupçonner de la faiblesse.

A cette léttre, le ministère britannique a fait une réponse, non pas telle qu'il la devait à des ouvertures aussi franches et aussi pacifiques, mais dont les termes du moins, si on les compare à ceux dont il se servit en l'an 8, dans d'autres circonstances, ne blessaient pas les convenances et permettaient d'espérer des communications plus utiles.

(L'orateur donne lecture de la réponse du ministre Britannique. Voyez l'article sénat.)

La lettre et la réponse seraient restées dans le secret du gouvernement, comme tous les actes préliminaires, dont le but est de conduire à des négociations effectives, si le message du roi d'Angleterre à son parlement n'en eût appelé la publicité. Ce message, Messieurs, qui annonce de la part de la France des communications pacifiques, n'est plein que d'aigreur, d'accusations et de reproches. On y feint une pitié insultante pour une nation généreuse qu'on a subitement attaquée au sein de la paix, dont on a saisi, pillé, détruit les vaisseaux navigans sur la foi des traités, et on s'étonne qu'elle ne s'abaisse pas à des explications vis-à-vis d'un ennemi qui la traite en brigand, et qu'à des hostilités elle ait répondu par une déclaration de guerre. On y annonce des liaisons, une correspondance, des rapports confidentiels avec des puissances du Continent.

On s'y efforce d'établir l'idée d'une coalition qui n'existe point, et qu'il serait impossible de réaliser. La France est trop grande pour s'abaisser à discuter des injures.

Elle doit à un allié cruellement outragé, non pas une vaine pitié, mais le plus constant et le plus fidèle appui. La France n'a point d'ennemi sur le Continent, elle n'a avec aucune puissance continentale aucune discussion qui puisse s'attacher à sa querelle avec le ministère britannique.

L'Autriche, la Prusse, l'Allemagne toute entière yeulent la paix et la veulent avec la France. Depuis peu de jours en core, l'empereur a reçu de leurs dispositions amicales les assurances les plus positives.

L'empereur Alexandre eût empêché la guerre si l'Angleterre eût voulu accepter sa médiation; il l'eût peut-être étouffée depuis, si ses ministres à Paris et à Londres eussent suivi les intentions qu'il avait alors. L'intervention de la Russie, très❤ utile pour prévenir des hostilités, ne peut l'être également lorsqu'il est question de les terminer. L'Angleterre n'a rien à re douter de cette puissance, et ne se croit point intéressée à garder de ménagement avec elle; toute l'Europe le sait; les événemens de l'an 9 l'ont démontré, le gouvernement britannique

GGG

l'a prouvé. Si l'Angleterre aujourd'hui veut tirer parti de quelques communications confidentielles, ce n'est certainc ment pas pour montrer des dispositions plus pacifiques; son but est de faire croire à une apparente coalition, mais elle n'a pour elle aucune chance de succès; ces espérances sont illusoires, car à Petersbourg aussi bien qu'à Vienne, aussi bien qu'à Berlin on regarde comme des attentats aux droits, des gens comme une injure à tous les souverains, l'attaque des frégates espagnoles en pleine paix, l'assassinat en pleine paix de 300 victimes inuocentes immolées par les canons de l'Angleterre ou ensevelies dans les flots, la prise en pleine paix d'un régiment espagnol, l'arrestation dans la Mediterranée de 80 bâtimens de toutes les nations, et cette violation perpétuelle de la liberté des mers, le domaine commun de tous les peuples.

Ces correspondances, ces rapports confidentiels ne sont donc que des chimères, des prétextes vains pour échapper aux négociations de la paix. C'est toujours ce système perfide qui cherche à semer des guerres sur le Continent, pour éterniser le monopole d'un seul peuple et opprimer le commerce de tous. C'est ce même esprit qui, pour autoriser la violation du traité d'Amiens, créait dans nos ports des armemens imaginaires, effrayait la nation anglaise de projets destruc

teurs.

Si la voix de l'humanité n'est pas entendue, ils seront bien coupables ceux qui exposeront leur patrie à des dangers, dont celui qu'ils accusent d'en être l'artisan, aura tenté con stamment de la défendre. Les politiques éclairés de tous les pays, la nation anglaise elle-même tardivement désabusée, ont blámé l'aveugle opiniâtreté du gouvernement anglais, lorsqu'en l'an 8 il perdit l'occasion favorable qu'on lui présentait pour faire une paix honorable. Peut-être la grandeur actuelle de la France est-elle une conséquence de cette faute politique, L'avenir fera connaître les effets d'un aveuglement si obstiné, Nous n'avons rien à redouter, et peut-être dans dix ans notre position pour traiter, sera-t-elle plus avantageuse encore. En guerre comme en politique il est des occasious qu'on ne retrouvera plus et qui laissent pendant des siècles le regret de les avoir laissé échapper. Si telle doit être la destinée de l'Angle terre, il ne restera à la bravoure française qu'à déployer toute son énergie, et à triompher enfin de cet esprit ennemi de la liberté des mers et de la tranquillité des nations.

Le corps législatif donne aux orateurs du conseil d'état acte de la communication qu'il vient de lui faire au nom de S. M., et arrête qu'il va se former en comité général pour délibérer sur cette communication.

MM. les conseillers d'état quittent l'assemblée, qui se forme de suite en conférence particulière. La séance étant rendue publique, M. le président annonce qu'il vient d'être arrêté,

qu'il serait fait un message à S. M. l'empereur pour lui exprimer les sentimens du corps législatif sur l'objet des communications qui lui ont été faites, et que ce message sera porté par une députation de vingt membres.

La séance est lévée.

TRIBUNAT.

Présidence de M. Fabre (de l'Aude.)

Séance extraordinaire du 15 pluviose.

Après la lecture du procès-verbal de la séance du 2, dont la rédaction est adoptée, MM. les conseillers d'état Regnault (de Saint Jean d'Angely) Treilhard et Bérenger, sont introduits. M. Regnaud (de Saint Jean d'Angely) orateur.

Messieurs,-Le gouvernement anglais en publiant incom plètement un commencement de négociation avec la France, a violé le droit des nations, et imposé à S. M. l'empereur, l'o bligation de faire connaître à la France et à l'Europe les faits dans toute leur exactitude.

L'Europe et la France verront à quels nouveaux sacrifices de toute idée d'amour-propre, de tout sentiment de vaine gloire un noble cœur plein de fierté, et jaloux de sa rénommée a pu se résoudre pour épargner le sang des hommes, et le sang de son peuple plus cher à son amour.

Elles verront ce que le premier guerrier de son siècle a tenté pour rendre plutôt à la paix et au repos la génération actuelle, dont la tranquillité et le bonheur sont désormais le plus cher de ses vœux, et doivent constituer l'unique gloire qu'il veuille joindre à la gloire, déjà acquise, de ses triomphes militaires.

Ces sentimens, Messieurs, expliquent à la fois les pensées et les actions de S. M.

Et si on se demande comment un homme doué du caractère le plus fort, qui s'est montré plus entreprenant et plus audacieux que les personnages les plus audacieux et les plus entreprenans dont les historiens nous aient transmis le souvenir; comment un homme dans la force d'une jeunesse ardente, peut, en désirant la paix, triompher à la fois de ses souvenirs et de ses espérances; comment le général de 500 mille braves peut commander à la plus noble comme à la plus tirannique des passions, celle de la renommée; comment il peut renoncer à la gloire qu'il peut acquérir encore dans cette carrière des armes où il n'a rencontré que des triomphes, il faut répondre: cet homme a besoin du repos et du bonheur du monde.

Si on se demande comment un jeune monarque, poursuivi sans cesse par de lâches ennemis, attaqué par de vils diffamateurs, menacé par des assasins fait taire ses ressentimens personnels et se décide à présenter le rameau d'olivier au cabinet

qui salarie les diffamateurs et gage les assassins, il faut répondre ce monarque est audessus des passions du commun des hommes.

Si on se rapelle comment la Grande Bretagne bravant la morale publique et le droit des nations a ravalé ses ambassadeurs, dégradé ses militaires les plus distingués, par les plus avilissantes fonctions, par les missions les plus honteuses; si on la considère employant les trésors du commerce, conquis au mépris du droit des gens et de toutes ses lois, à payer des créateurs de machines infernales, à organiser des conspirations dont les traces sont encore au milieu de nous, et qui ont excité des cris d'indignation qui retentissent encore en Europe; si on se retrace un tel tableau, et qu'on se demande comment te chef de la grande nation, le vengeur de tant d'outrages et de crimes désignés par la France et l'Europe, étouffe dans son eœur le fiel et la haine qui domineraient une âme ordinaire, il faut répondre: l'homme à qui la grande nation a donné la couronne n'aspire désormais qu'au titre de père des Français.

Napoléon était à peine monté sur le trône, il sortait à peine de cette métropole, où ce que la religion a de plus auguste avait consacré ce que le vœu du peuple a de plus solennel, lorsque son cœur encore ému des acclamations publiques, lui inspira d'écrire à George III, la lettre que je suis chargé de vous communiquer.

L'Empereur venait de faire à la France le serment sacré que l'Eternel avait reçu, de vivre pour le bonheur et la gloire du peuple; et pour commencer à remplir ce saint engagement, il recueillit, il traça, il addressa au roi d'Angleterre l'expres sion de tous les sentimens généreux, modérés, et si je puis le dire religieux, qui peuvent être conçus et professés par une grande âme; et certes, cette dépêche immortelle, ne sera pas un des moins glorieux monumeus du règne de sa majesté : elle ne sera pas le moins sûr de ses titres à la reconnoissance et à l'amour de la France: elle ne sera pas le gage le moins certain de l'estime des philantropes sages, qui, quoiqu'en disent quelques hommes obscurs ou pervers qui les mécon naissent ou les calomuient, sont encore si nombreux au sein de l'Europe éclairée.

Mais en cette occurrence l'humanité du monarque n'a-t-elle pas trompé sa sagesse. Sa raison a-t-elle pu partager longtemps les espérances de sa bonté? Avait-il oublié comment et sur quels motifs imposteurs les pactes les plus saints avaient été violés? Avait-il oublié que quand les léopards déchirèrent le traité d'Amiens nulle aggression n'avait provoqué leur injuste fureur? Avait-il oublié, comment on représentait, le 7 Mars, au parlement d'Angleterre, comme pleins de vaisseaux armés et d'approvisionnemens menaçans, nos ports alors silencieux, nos arsenaux alors pacifiques?

Non, Messieurs, de tels souvenirs sont ineffaçables; mais

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