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monter à la chambre du baronnet, et de ve→ nir à l'instant même lui en donner des nou→ velles. Le domestique obéit; mais, à sa place, ce fut Alfred qui rentra. La tante Estelle, en revoyant celui qu'elle croyait trépassé, jeta un troisième cri, et défaillit une troisième fois.

A son retour à la vie, elle apprit que son neveu, ne voulant pas qu'un infâme meurtrier comme Mylord survécût à sa victime, avait résolu de faire justice sur l'heure, et que le coup de pistolet qu'on avait entendu avait eu résultat de purger la société de l'assassin

pour du Docteur. La tante Estelle se radoucit en

pensant que son chat était vengé; elle pensa que ses mânes n'en demandaient pas davantage.

En conséquence, elle tendit la main à son neveu, en signe de réconciliation : le baronnet la baisa respectueusement; et, pour qu'un spectacle de mort n'affligeât pas plus longtemps sa tante Estelle, il plaça le corps du dé

funt sur un coussin de velours et ordonna au domestique de le porter soigneusement dans sa chambre.

Huit jours après, le Docteur, empaillé par le naturaliste du roi et couché sur son coussin, dormait du sommeil du juste, sous un magnifique globe de cristal; et Mylord s'installait sur une peau de tigre dans l'atelier de Jadin, qui l'avait troqué contre un paysage que lui marchandait depuis long-temps le baron Alfred de R.

Ce fut là qu'il passa les deux années les plus triomphantes de sa vie, se battant journalièrement avec les premières réputations de la barrière, et pelotant dans ses momens perdus avec le singe de Flers, à qui il enleva la mâchoire gauche, et avec l'ours de Decamps, à qui il coupa l'oreille droite.

Mylord, arrivé au comble de sa réputation, couvert de cicatrices, et ayant déjà passé l'âge mûr, comptait sur une vieillesse aussi tran

quille que sa jeunesse avait été agitée, lorsque, pour son malheur, l'idée me vint de faire le voyage que nous allons mettre sous les yeux de nos lecteurs, et de m'associer pour ce voyage une société de deux peintres, dont Jadin, par ses vieilles relations d'amitié avec moi, et plus encore par son beau et large talent, était naturellement appelé à faire partie.

Il résulta de cette détermination que le 15 octobre 1834, à deux heures de l'aprèsmidi, sans qu'on lui demandât la permission de l'emmener, et sans qu'on le prévînt où il allait, Mylord fut transporté dans la chaise de poste qui enlevait son maître et moi loin de la capitale.

Et maintenant que nos lecteurs connaissent à peu près toute la caravane, qu'ils nous permettent de revenir au voyage dont cette digression importante nous avait momentanément éloignés.

II

Fontainebleau.

On comprend qu'avec le plan d'exploration que nous avions formé, le voyage commençait pour nous à la barrière. En effet, il est assez curieux, lorsqu'on marche vers un pays, de le voir venir, en quelque sorte, au devant de soi; de reconnaître où deux peuples commen

cent à se mélanger, arrivent à se fondre, et finissent par se séparer. Les Gaulois et les Romains ont franchi les Alpes chacun de leur côté, les uns pour aller prendre le Capitole, les autres pour venir fonder Lyon; depuis, les Français et les Italiens ont suivi la route frayée par leurs ancêtres : les premiers sont venus avec les Médicis apporter leurs arts immortels; les seconds sont allés avec Napoléon imposer à Rome leur royauté d'un jour; si bien

que chaque peuple a laissé aux deux versans des montagnes qui les séparent l'un de l'autre une trace qui va s'effaçant au fur et à mesure qu'elle s'enfonce au cœur du pays opposé, mais que des yeux exercés reconnaissent toujours et partout. On ne s'étonnera donc pas que, rencontrant à quinze lieues de Paris la civilisation de Léon X et de Jules II, nous y fassions notre première halte.

Au réste, Fontainebleau est si près de nous, qu'il n'y aurait rien d'étonnant que nous

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