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DE

LA RESTAURATION

DE LA BRANCHE AINÉE DES BOURBONS,

Je n'écris point un pamphlet. Assez de passions ont agité la société contemporaine. Les temps de l'histoire sont arrivés. La restauration de la maison de Bourbon s'est développée et s'est éteinte dans des proportions tellement symétriques, avec des conditions et des accidens si prévus d'avance, qu'on dirait un drame conçu et mené à fin d'après la règle. En 1814 et 1815, dans cette double épreuve du gouvernement des Bourbons, tout le monde a pu indiquer du doigt quelles causes le feraient vivre, et quelles causes le feraient mourir. N'accusons pas trop les caractères; ils retardent ou accélèrent un mouvement, ils ne le font pas. Son principe est plus haut; or, une restauration fondée sur l'idée du droit divin et

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de la légitimité absolue est une œuvre impossible.

L'histoire de la restauration peut être écrite aujourd'hui avec plus d'impartialité et de rectitude. En se séparant des passions vivaces et populaires qui dominent la révolution de juillet, il est plus facile, depuis qu'elle est accomplie, de juger les hommes, les partis, les capacités diverses, les services politiques. Nous avons pu apprécier les factions au pouvoir. Nous avons vu les royalistes fougueux, les hommes de 1815, renverser à plaisir la plus belle monarchie, et faire chasser à coups de fourches la dynastie de saint Louis et de Henri IV. Nous avons vu également les chefs de l'opposition libérale, ces grandes capacités, ces hommes austères, ces patriotes universels, prendre la direction de la politique et de l'administration du pays, et Dieu sait où ils l'ont conduit! Ensuite les partis, dans la naïveté de leurs victoires, ont fait beaucoup d'aveux. Sous MM. de Villèle et de Polignac, on a vu les ultra-royalistes mettre en action leurs doctrines sur le pouvoir royal, sur l'article 14, sur les coups d'Etat; et que n'ont pas avoué les ardens du parti libéral,

tout glorieux de leur conspiration permanente pendant quinze années contre la restauration! De plus, l'expérience a rendu douteux pour de bons esprits si des lois d'exception momentanées, légalement obtenues des chambres, ne sont pas quelquefois impérieuses, inévitables, pour rétablir l'ordre troublé. Et ce doute expliquera, s'il ne justifie point, la conduite des ministres de Louis XVIII jusqu'en 1821.

De là résultera peut-être pour beaucoup d'hommes impartiaux la conviction que les ministres qui en présence de l'étranger deux fois dans notre capitale, en lutte avec le parti de la cour et de l'émigration, avec les fautes et les exigences du libéralisme, ont conduit le pays à l'état de prospérité matérielle où il se trouvait dans les premières années de la restauration, n'ont pas démérité de la France. Les noms de MM. de Richelieu, Dessolle, Saint-Cyr, Decazes, Pasquier, Laferronays, Molé, Mortemart, et Martignac, resteront, avec des nuances diverses, comme les types de ces systèmes de capacité, d'ordre, de modération, qui pouvaient sauver la dynastie, la liberté et la prospérite publique. On n'ose

pas le dire aujourd'hui tout haut, parce que des retentissemens de biographies et des jugemens d'esprit de parti restent encore, mais le temps arrive où toute justice sera rendue.

Qu'on ne cherche point dans cette histoire un libelle. La tempête a emporté une vieille et glorieuse dynastie; ce serait honte de l'insulter. Je ne prétends point à la vie malheureuse de quelques productions éphémères qui s'alimentent du scandale. Notre génération, parce qu'elle est forte, doit être généreuse. Grand Dieu! qui, dans cette tourmente de quarante années, n'a point commis de fautes! Qui a pu traverser des temps si agités sans déposer quelque empreinte de la fragilité humaine!

La restauration s'est accomplie en 1814; mais les tentatives faites pour l'amener remontent à l'origine même de la révolution. On ne pourra bien saisir l'esprit et le caractère de ce mouvement, qu'en suivant le fil de la grande intrigue, qui, depuis le 13 juillet 1789, a remué la France et l'Europe; car, chose étonnante, dans toutes les phases de sa fortune, la maison des Bourbons est demeuréc avec ses grandeurs, ses préjugés et ses chimères!

Faut-il donc s'étonner si elle s'est brisée

contre les faits, et si la vieille couronne de saint Louis a disparu dans la tempête. Ce que les courtisans ont appelé la perpétuité monarchique est le plus invincible obstacle à toute conciliation. Qu'est-ce donc qu'une famille qui veut rester avec le caractère de huit siècles en présence d'une jeune et forte civilisation!

Puisse cet exemple profiter même aux hommes de la révolution! Pusise cette terrible chute d'une dynastie, arrêter les tentatives de tout gouvernement exclusif dans ses idées, et qui se croirait fort parce qu'il heurterait des opinions qui ne sont pas les siennes! La restauration s'est long-temps maintenue à travers les vices de son origine, parce que jusques à ses derniers excès, elle fut modérée et conciliante. Si l'incapacité entraîne jamais l'impérieuse révolution de juillet dans les saturnales des représailles ; si nos petits hommes politiques font les affaires du pays avec les préjugés et la mauvaise humeur de leurs jours de disgrâce, qui sait ce que l'avenir réserve alors à notre génération!

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