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tion. L'Angleterre seule, qui n'était point partie contractante au traité de Lunéville, affecta de prendre de l'ombrage de cette prétention du gouvernement français à régler les destinées de ses voisins, et revendiqua pour les cantons suisses l'indépendance qui leur avait été garantie. On a vu dans le chapitre précédent, que le ministère anglais ne s'était pas borné à la démarche officielle d'une note remiseà ce sujet au ministre de France M. Otto, et que la mission de M. Moore, auprès de la diète de Schweitz, avait mis à découvert l'in→ tention de soutenir le parti des insurgés, et par là, de rallumer la guerre générale.

La paix d'Amiens avait été arrachée à l'Angleterre M. Pitt, qui la considéra comme un malheur inévitable, feignit de la vouloir, et se garda de la souscrire. Nous avons dit précédemment comment il rompit lui-même son ministère, appela à sa place M. Addington, et le soutint de toute son influence dans l'œuvre difficile de cette pacification: mais si la force des circonstances parut avoir fait fléchir son opinion, si la raison d'état le porta

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jusques à combattre dans le parlement les partisans de son propre système, il n'en resta pas moins invariable dans ses vues, pour armer l'Europe contre les résultats de la révolution française, et dans ses sentimens d'aversion personnelle contre le premier Consul. Ce profond politique voyait, avec une secrète satisfaction, les anciens ministres ses collègues et ses plus fidèles amis, les Windham, les Grenville, critiquer amèrement cette paix qu'ils disaient honteuse, inutile, et uniquement profitable à la France. Ce nouveau parti d'opposition, le plus puissant qui se fût jamais élevé dans le parlement, nourrissait l'esprit de jalousie et de rivalité nationales. Les attaques, les prédictions de ces partisans de la guerre éternelle, étaient de plus en plus justifiées par l'état prospère de la France et par le rapide développement de son ambitieuse influence. Ales entendre, les hostilités n'avaient pas même été suspendues, et les acquisitions successives de Bonaparte par l'abus de la paix, égalaient ses conquêtes par la guerre; on lui laissait le

loisir de consolider la puissance colossale de la France, de resserrer les liens sociaux, d'af fermir les institutions en les appuyant sur la morale publique et religieuse : la restitution des riches colonies de la Martinique, de Tabago, de Sainte-Lucie, la soumission de la Guadeloupe, bientôt peut-être la réduction de Saint-Domingue, allaient rouvrir à la fois. les canaux du commerce français si longtemps comprimé ; il s'élançait vers les DeuxIndes, avec toute la vigueur de l'industrie née de la révolution : la marine française allait s'élever du milieu de ses ruines; les arsenaux s'approvisionnaient, les anciens chantiers reprenaient leur activité; d'immenses travaux allaient, non-seulement rendre au port délaissé d'Anvers son ancienne importance commerciale, mais en faire le point de réunion des forces navales de l'Europe septentrionale, le plus redoutable à l'Angleterre, et le plus formidable boulevard de la France considérée comme puissance maritime.

Dédaignant les ménagemens politiques dont un illustre ennemi, M. Pitt, venait de

lui donner l'exemple, le jeune conquérant se serait accusé de faiblesse et de timidité s'il n'eût précipité ses mesures pour ravir à la fois tous les avantages qu'il trouvait justement acquis s'ils pouvaient ressortir de sa situation présente. Ce fut ainsi que, se livrant à sa destinée, que, disait-il, il lui fallait remplir, il donna des lois à toute l'Italie.

Le vœu des habitans de ces belles contrées qui se croyaient cette fois affranchies des liens de souverainetés étrangères, était de se former en corps de nation sous la protection de la France : le premier Consul résista à cette tendance; il craignit que cette réunion, alors très-facile, n'en fît un état voisin trop puissant; et sous diverses formes, sous divers prétextes, il étendit sa domination sur ces provinces divisées.

Ainsi, la Lombardie, sous l'apparence d'une république, fut tenue dans une étroite dépendance et gouvernée militairement. La Toscane conserva le gouvernement monarchique, et reçut un nouveau souverain véritable feudataire. Le Piémont, après les dé

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membremens qu'il avait subis, ne pouvant ni soutenir son indépendance comme république, ni suffire aux dépenses d'une monarchie, fut réuni au territoire français.

La Hollande, encore tributaire, n'avait obtenu sous le nom de république batave qu'une émancipation illusoire.

Les débris de l'empire germanique étaient arbitrairement répartis par l'intervention de la France et de la Russie entre quelques princes dont on récompensait les défections ou la docilité.

Après avoir renversé toutes les barrières politiques, le premier Consul s'occupa d'aplanir les obstacles qu'il avait franchis; il effaçait les anciennes limites, en ouvrant, à l'exemple des Romains, de nouvelles routes militaires; celles du Simplon, du Montcenis, du mont Genèvre, enlaçaient l'Italie, et réunissaient par des trajets courts, et faciles en toutes saisons à travers le chaos des Alpes, les bassins du Rhône et de l'Éridan.

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Les belles routes de la Belgique, presque détruites pendant les premières campagnes

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