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connu que les lois conventionnelles ont gardé le silence. Le traité d'Amiens, ainsi que tous les autres traités, en réglant les objets auxquels il se rapporte spécialement, n'emporte ni ne suppose l'obli gation d'être indifférent à tous les autres points qui ne sont pas compris dans les stipulations : il reconnaît encore moins qu'ils puissent être abandonnés à la volonté et au caprice de la violence et du pouvoir. La justice de la cause devient seule un motif suffisant pour autoriser l'intervention de chacune des puissances de l'Europe dans les différends qui peuvent s'élever entre d'autres états; et ce n'est qu'à des considérations de prudence à régler l'exercice et l'étendue de cette intervention légitime. Ces principes ne peuvent être contestés; mais si la nouvelle et singulière prétention, mise en avant par le gouvernement français, d'ôter à Sa Majesté tout droit de s'immiscer dans les affaires des autres puissances, à moins qu'il ne s'agît particulièrement des stipulations du traité d'Amiens, pouvait être maintenue, ces puissances auraient au moins le droit de s'en prévaloir dans tous les cas où il surviendrait des différends entre les deux pays. Toute l'Europe a donc lieu d'être indignée des déclarations du gouvernement français, desquelles il résulte qu'en cas d'hostilités les puissances même qui n'ont pas concouru au traité d'Amiens, et qui n'ont pu retirer aucun avantage

des démarches de Sa Majesté en leur faveur, doivent néanmoins devenir victimes d'une guerre dont on fonde le prétexte sur ce même traité, et doivent être sacrifiés dans une querelle que, non-seulement elles n'ont pas occasionnée, mais qu'elles n'ont eu aucun moyen de prévenir.

Sa Majesté jugea que, dans les circonstances où se trouvait l'Europe, le parti le plus convenable était de ne pas se porter à des hostilités à l'occasion des vues ambitieuses et des actes d'agression de la France sur le continent. Toutefois la connaissance du caractère et des dispositions du gouvernement français, ne pouvait manquer de faire sentir à Sa Majesté la nécessité de redoubler de vigilance pour défendre les droits et la dignité de sa couronne, et pour protéger les intérêts de son peuple.

Tels étaient les sentimens qui animaient Sa Majesté, lorsqu'elle fut requise par le gouvernement français d'évacuer l'île de Malte. Sa Majesté, dès l'instant de la signature du traité définitif, avait montré la disposition empressée de donner un plein effet aux stipulations du traité d'Amiens, relatives à cette île. Aussitôt qu'elle apprit que l'élection d'un grand maître se faisait sous les auspices de l'empereur de Russie, et que les divers prieurés, réunis à Pétersbourg, étaient convenus de reconnaître, pour grand-maître de l'ordre de Saint-Jean, la per

sonne que la cour de Rome choisirait parmi ceux qu'ils avaient désignés, Sa Majesté proposa au gouvernement français, pour écarter toutes les difficultés qui pouvaient naître de l'exécution de ces arrangemens, de reconnaître cette élection comme valide; et lorsqu'au mois d'août le gouvernement français demanda que Sa Majesté permît l'envoi des troupes napolitaines dans l'île de Malte, comme une mesure préliminaire qui préviendrait tous les délais inutiles, Sa Majesté y consentit sans hésiter, et donna l'ordre d'admettre dans cette île les troupes napolitaines. Ainsi Sa Majesté s'était montrée disposée non-seulement à ne mettre aucun obstacle à l'exécution du traité, mais au contraire à la faciliter de tout son pouvoir. Sa Majesté ne peut cependant admettre qu'à aucune époque, depuis la conclusion du traité d'Amiens, le gouvernement, français ait eu le droit de la requérir, d'après les stipulations du traité, de retirer ses forces de l'île de Malte. Au moment où le gouvernemeut français faisait cette demande, quelques-unes des stipulations les plus importantes de l'arrangement relatif à Malte demeuraient sans exécution. L'élection d'un grand-maître n'avait pas été faite. Le dixième article avait réglé que l'indépendance de l'ile serait mise sous la garantie et la protection de la GrandeBretagne, de la France, de l'Autriche, de l'Es

pagne, de la Russie et de la Prusse. L'empereur d'Allemagne avait accédé à cette garantie, mais à condition que les autres puissances désignées dans cet article y donneraient également leur adhésion. L'empereur de Russie avait refusé la sienne, à moins que la langue de Malte ne fût supprimée; et le roi de Prusse n'avait fait aucune réponse à la proposition qui lui avait été faite d'accéder à l'arrangement. Et de plus, le principe fondamental, de l'existence duquel dépendait l'exécution des autres parties de cet article, avait été détruit par les changemens survenus dans la constitution de l'Ordre, depuis la conclusion du traité d'Amiens. C'était à l'Ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem que Sa Majesté s'était engagée à rendre l'ile de Malte par la première stipulation du dixième article. L'Ordre est censé se composer des langues qui subsistaient à l'époque où le traité fut conclu, où les trois langues de France venaient d'être abolies, où une langue de Malte venait d'être ajoutée à l'institution. L'Ordre était donc alors formé des langues suivantes : d'Ara

de Castille, d'Allemagne, de Bavière et de Russie. Depuis la conclusion du traité définitif l’Espagne a séparé de l'Ordre les langues d'Aragon et de Castille; une partie de la langue d'Italie a été supprimée par la réunion du Piémont et de Parme à la France. Il y a de fortes raisons pour croire

qu'on a eu en vue de séquestrer les propriétés de la langue de Bavière; et l'on a déclaré l'intention de retenir les langues de Russie sous la domination de l'empereur.

Dans ces circonstances, l'Ordre de Saint-Jean ne peut maintenant être considéré comme le même corps auquel il devait être rendu, conformément aux stipulations du traité ; et les fonds indispensables pour son entretien et pour le maintien de son indépendance ont été presque entièrement séquestrés. En supposant même que ces faits eussent été le résultat de circonstances que les parties contractantes n'eussent pas eu le pouvoir de prévenir, Sa Majesté aurait eu néanmoins le droit de différer l'évacuation de l'île jusqu'à ce qu'il eût été conclu un arrangement convenable, pour maintenir l'indépendance de l'ordre et de l'île de Malte. Mais, si ces changemens ont eu lieu en conséquence de quelques actes des parties contractantes elles-mêmes, si le gouvernement français semble avoir eu pour but de rendre l'Ordre, dont il avait stipulé l'indépendance, incapable de la maintenir, ce droit qu'a Sa Majesté de continuer à occuper l'île dans de telles circonstances peut difficilement être contesté. Il est hors de doute que les revenus des deux langues d'Espagne ont été retirés à l'Ordre par Sa Majesté catholique; la France a effectivement supprimé une par

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