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le défi de guerre de l'Angleterre, qu'il évitait de peser sur des expressions dont le sens pouvait porter un caractère d'agression; qu'il se refusait enfin à croire que Sa Majesté britannique voulût violer la sainteté d'un traité sur lequel reposait la sûreté de toutes les nations.

Cette déclaration, faite par ordre du premier Consul, provoqua, le 7 avril, une nouvelle note dans laquelle le gouvernement français ne vit pas sans surprise qu'une demande indéterminée de satisfactions lui était adressée. Le vague de cette demande, exprimée sans motif et sans objet, ne laissait apercevoir distinctement que l'inconvenance de son expression.

On manifestait dans cette note l'intention de violer le traité d'Amiens, en refusant d'évacuer Malte. On semblait se flatter que le peuple français consentirait à donner satisfaction sur deux faits supposés, sur l'allégation desquels il avait peut-être le droit d'en demander lui-même.

En remettant cet office, lord Withworth demanda qu'un arrangement fût fait immédiatement sur les bases qui viennent d'être exposées; et il fit en même temps entendre que, dans le cas contraire, il craignait de se voir obligé, par les ordres de son gouvernement, de quitter incessamment sa résidence, et de mettre fin à sa mission.

Que pouvait répondre le gouvernement de la

république à d'aussi brusques, à d'aussi étranges ouvertures! Il n'y avait qu'un grand amour de la paix qui pût l'emporter sur l'indignation.

Pour s'arrêter à une décision froide et calme, qui laissât à la raison et à la justice le temps de l'emporter, sur les passions, il fallait se pénétrer profondément de l'idée que les nombreuses victimes des discordes des gouvernemens n'ont aucune part aux insultes qui les aigrissent; que ces milliers de braves citoyens qui, dans les voeux de leur héroïque dévouement versent leur sang uniquement pour leur patrie, n'ont jamais le désir d'offenser un peuple voisin et puissant; qu'ils ne prennent aucun intérêt à des démarches d'orgueil, et à de vaines prétentions de suprématie. Il ne fallait pas seulement se pénétrer de cette idée, il fallait s'en laisser maîtriser à tous les instans.

Son excellence lord Withworth convint d'écrire à sa cour que le premier Consul ne pouvait consentir à la violation d'un traité solennel, mais qu'il voulait la paix ; que si le gouvernement d'Angleterre désirait qu'une convention fût faite pour des arrangemens étrangers au traité d'Amiens, il ne s'y refuserait pas, et que les motifs de cette convention pourraient être tirés des griefs réciproques.

Ces vues étaient justes et modérées. Il était difficile de proposer une négociation sur des bases plus libérales. Il n'est pas hors de propos d'observer ici que

c'était six semaines après le message où une négociation difficile, d'un intérêt grave, et d'une issue incertaine, mais prochaine, avait été signalée, que les ministres des deux gouvernemens n'avaient pu encore arriver à ouvrir une véritable négociation.

Lord Withworth reçut de nouveaux ordres; il présenta successivement deux projets de convention.

Par le premier, il était proposé que Malte restât sous la souveraineté du roi d'Angleterre ; et cette clause adoptée, Sa Majesté britannique offrait de reconnaître tout ce qui avait été fait en Europe depuis le traité d'Amiens.

Sa Majesté le roi d'Angleterre promettait encore de prendre des mesures pour que les hommes qui, sur les différens points de l'Angleterre, ourdissent des trames contre la France, fussent efficacement réprimés.

Le soussigné eut l'honneur d'observer à son excellence lord Withworth que ce premier projet de convention était une violation palpable du traité d'Amiens, et renversait la base de négociation que son excellence s'était chargée de présenter à sa cour; que quantà la reconnaissance offerte par S. M. britannique, il n'y avait réellement point d'objets auxquels elle pût s'appliquer; qu'il n'y avait pas de changement en Europe depuis le traité d'Amiens, si ce n'est l'organisation de l'empire, à laquelle le roi d'Angleterre avait concouru par son vou, comme électeur d'Ha

novre, et qui n'était elle-même qu'une suite nécessaire du traité de Lunéville, antérieur de beaucoup au traité d'Amiens.

Que les événemens relatifs à l'existence politique du Piémont, du royaume d'Étrurie, et des républiques italienne et ligurienne, avaient leur date avant le traité d'Amiens; que dans la négociation de ce traité, la France avait désiré que l'Angleterre reconnût ces trois puissances; mais que comme on n'avait pu s'accorder ni sur ce point, ni sur les affaires de l'Inde, en ce qui concernait la destruction de quelques états principaux, et les inappréciables acquisitions faites par l'Angleterre dans cette contrée, on en était resté à considérer la discussion de ces objets comme ne tenant pas à l'exécution des articles préli minaires, et à l'objet fondamental de la pacification des deux états. Le soussigné observa enfin que le gouvernement français ne demandait sur ce point aucune approbation ni reconnaissance à Sa Majesté britannique.

Le soussigné ajouta que, quant à la république batave, elle avait été reconnue par le roi d'Angleterre, puisqu'il avait traité avec elle, et que par les traités existans entre cette république et la France, l'arrièregarde des troupes françaises devait évacuer ce pays à la nouvelle de l'entière exécution du traité d'Amiens.

Quant aux criminels réfugiés à Londres et à

Jersey, où ils se livraient à tous leurs penchans per vers, et où, loin d'être réprimés, ils étaient traités et pensionnés par l'Angleterre, le gouvernement français concevait que dans la situation actuelle des négociations, il ne devait y attacher aucune impor

tance.

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Son excellence lord Withworth proposa un second projet. L'Angleterre demandait que le gouvernement civil de Malte, étant laissé au grand-maître, les garnisons britanniques continuassent d'occuper les fortifications de l'île. Cette proposition était impraticable et inouïe. Comme celle du premier projet, elle était contraire au traité d'Amiens, et conséquemment aux bases de négociation offertes par le premier Consul; elle avait, de plus, l'inconvénient irremédiable de mettre un ordre de chevaliers, appartenant à toutes les puissances de l'Europe, sous l'autorité et la tutelle arbitraire d'une seule puissance; elle était enfin par elle-même une offense à l'honneur et à la religion d'un ordre lié par tous ses élémens à l'honneur et à la religion de l'Europe entière.

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Ainsi, dans tous les pas de cette négociation, le gouvernement de la république était obligé de voir que le gouvernement anglais n'avait qu'une seule vo-1 lonté, qu'un seul objet en vue, celui de pas remplir les stipulations du traité d'Amiens, et de conserver Malte, par la seule raison que. Malte était à sa con

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