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gigantesques, c'était celui qui souriait le plus à son ambition, et c'était aussi celui dont le succès eût été le plus avantageux à la France. Voyant que les Anglais différaient l'évacuation stipulée au traité d'Amiens, et qu'ils continuaient de tenir garnison à Alexandrie, il céda à son impatience de connaître la situation du pays, et les dispositions des habitans depuis les derniers évé

nemens.

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Le premier Consul chargea de cette mission délicate le colonel de dragons Sebastiani, d'une ancienne famille corse alliée à la sienne; jeune et brave officier que ses qualités militaires, son esprit cultivé et ses formes agréables rendaient très - propre à la remplir.

Le but avoué de sa mission était premièrement de requérir, du général commandant les forces anglaises, la prompte évacuation en exécution du traité ; et secondement, d'annoncer aux pachas du Caire, au gouvernement de Syrie, et à toutes les autorités ottomanes de ces parages, que la paix étant

conclue entre la république française et la Sublime Porte, le grand Consul les faisait assurer de sa bienveillance, et qu'il allait envoyer près d'eux, et dans les différentes places, des commissaires français pour rétablir les anciennes relations d'amitié et de

commerce.

Le colonel Sebastiani s'embarqua à Toulon le 16 septembre 1802, sur la frégate la Cornélie, et fut de retour à Génes dans les premiers jours de janvier 1803. Après un voyage de quatre mois, il rendit compte de sa mission dans un rapport très-intéressant, journal exact de son voyage, dans lequel aucune circonstance relative à l'objet secret de son investigation n'avait été omise. Voici quelle était la substance de cette pièce remarquable, dont la publication fixa l'attention de tous les cabinets de l'Europe.

Le'colonel Sebastiani avait d'abord touché à Tripoli, où sa médiation, acceptée par le contre-amiral baron de Cederstrom et le pa

cha, , pour la rançon de 150 esclaves suédois, avait établi la nature de sa mission ostensi

ble. Parvenu à Alexandrie le 16 octobre, il avait fait connaître au général Stuart l'ordre qui lui avait été donné de demander, au nom de son gouvernement, «<l'évacuation de » la place, si les Anglais l'occupaient encore, >> et la pleine exécution du traité d'Amiens.» Le général anglais, qui d'abord avait répondu d'une manière vague et dilatoire, pressé de fixer un terme, déclara « qu'il n'avait aucun >> ordre de quitter Alexandrie, et qu'il >> comptait même y passer l'hiver. »

Cette espèce de sommation, le caractère que déployait l'envoyé français, ses communications avec les principales autorités, les égards que lui témoignèrent le pacha d'Alexandrie, le commandant de l'escadre ottomane et les cheiks, alarmèrent avec raison les Anglais, surtout quand ils le virent parcourir librement les environs det la ville, visiter la coupuré entre le lac Madié et le lac Maréotis, reconnaître les forts, et recueillir toutes sortes de renseignemens.

Le colonel Sebastiani se rendant ensuite d'Alexandrie au Caire, sous l'escorte de

deux officiers turcs et de six soldats français, vit les ruines du fort d'Aboukir, et ces plages encore fumantes de tant de sang inutilement répandu. Partout où il s'arrêta, à Rosette, à Faoué, à Rahmanié, à Menouf, il reçut des commandans et des cheiks le meilleur accueil, et des protestations de dévoûment au premier Consul. A son entrée au Caire, où il s'était fait annoncer, il fut salué par de nombreuses salves d'artillerie ; une escorte de 500 hommes de cavalerie et d'infanterie, que le pacha envoya au-devant de lui, sous le commandement des principaux officiers de sa maison, le conduisit au palais : il offrit au pacha, au nom du premier Consul, sa médiation pour faire cesser les hostilités entre les ottomans et les beys; elle ne fut point acceptée par le pacha, dont les troupes venaient d'être battues en différentes rencontres par les mamelucks. Celui-ci répondit, en témoignant sa reconnaissance pour les soins du premier Consul : « qu'il » avait ordre de faire une guerre d'extermi>> nation aux beys, et de n'entrer en aucun >> arrangement avec eux. »

Il fut permis à l'envoyé français et aux of ficiers de sa suite, parmi lesquels se trouvait M. Jaubert, justement renommé pour sa connaissance des langues et de la politique de l'Orient, de voir les principaux cheiks, et les personnages les plus considérables; de visiter les fortifications et les environs de la ville: la même garde d'honneur eut ordre de les accompagner, et les murmures des soldats turcs ne purent les empêcher de continuer leurs observations. Cette réception solennelle ne pouvait manquer d'exciter les soupçons et la jalousie des anglais; le bruit se répandit au Caire qu'une flotte française de trois cents voiles avait été signalée sur les côtes de la Natolie; on fit insulter l'escorte du colonel Sebastiani, on essaya de soulever contre lui les Albanais. Sa fermeté déjoua ces intrigues; le pacha porta la confiance. jusqu'à lui communiquer une lettre du général Stuart qui, ayant recueilli un ancien ordre du jour du général Bonaparte pendant qu'il commandait l'armée d'Orient, mettait cette pièce sous les yeux du pacha comme un

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