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à coup

station, et se porte sur la plus prochaine sommité, il découvre un nouvel horizon; les mêmes objets se reproduisent sous d'autres formes, et sous des rapports différens: de même aussi, l'historien est fréquemment surpris par des événemens qui changent tout l'horizon politique. Négligera-t-il de s'y arrêter, et de faire remarquer ces nouvelles causes, dont il devra plus tard développer les effets? ou devra-t-il ralentir sa marche déjà si embarrassée par cette multiplicité d'incidens? Laissons ces questions à résoudre aux écrivains plus heureux et plus habiles qui viendront après nous; à leurs yeux seulement nos actions auront mûri pour l'histoire, et nos écrits pour une critique exempte de passions. Pour nous, qui ne pouvons offrir à nos contemporains que des Essais trop imparfaits, nous les continuerons avec la même liberté, la même impartialité; et pour qu'ils puissent dans l'avenir, sinon répandre une assez vive lumière, du moins servir de fil dans le labyrinthe, nous rechercherons tour à tour les

eauses de la guerre dans la politique, et les effets politiques dans les événemens de la guerre.

Nous nous attachons à n'omettre aucune des considérations générales qui nous paraissent liées aux événemens les plus importans; mais c'est toujours à regret que nous nous refusons la satisfaction de citer tous les faits d'armes, toutes les actions glorieuses heureusement consignées dans d'autres annales, dont le plan et l'étendue admettent ces détails intéressans. Nous croyons, ainsi que nous l'avons annoncé, avoir maintenant acquitté la moitié de nos engagemens : si nos lecteurs considèrent le grand nombre de faits dignes de mémoire, qu'offre la période historique objet de nos travaux, ils verront avec indulgence nos efforts pour en resserrer le tableau.

Celui du nouvel état politique de l'Europe, à l'avénement d'Alexandre Ier au trône de Russie, mérite surtout de fixer leur attention. On a vu dans les derniers siècles, et depuis que les alliances multipliées entre les

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maisons souveraines avaient si fort compliqué leurs intérêts, la mort d'un monarque allumer une guerre générale. Les funérailles du roi d'Espagne, Charles II, inondèrent l'Europe du sang d'un million de soldats, et ternirent l'éclat du règne de Louis XIV. Celles de l'empereur Charles VI ne furent pas moins sanglantes; mais ces événemens, les plus considérables de l'histoire moderne, avaient été prévus de longue main Charles II, vivant encore, voyait régler sa succession par les cabinets de Paris et de Londres. Marie-Thérèse comptait parmi les souverains qui prétendaient la dépouiller de son légitime héritage, ceux-là même qui l'avaient garanti par les traités les plus solennels. L'intérêt des peuples qui payèrent si cher le délire de l'ambition de leurs princes, n'était pour rien dans ces grandes querelles; le danger de la monarchie universelle ne fut qu'un prétexte pour nourrir les haines contre la France et exciter les rivalités; la prépondérance alternative de deux grandes puissances auxquelles

aucune autre ne pouvait s'égaler, était une plus solide garantie contre l'envahissement des états du second ordre, que le système variable des contrepoids que chacun voulait établir à son profit; c'était peut-être le principe le plus conservateur de cet équilibre si vanté, et totalement rompu par l'accroissement des richesses et la domination maritime de l'Angleterre.

Aussi, l'issue de la guerre de la neutralité avait-elle pour les peuples une bien autre importance que les conquêtes de quelques provinces, les changemens de gouvernement ou d'administration, les cessions et rétrocessions de territoire, objets d'une véritable guerre civile entre les meinbres de la grande famille du continent européen. Sans la mort de l'empereur de Russie, le bombardement de Copenhague, soutenu avec tant d'énergie par les braves Danois, n'eût fait qu'irriter les esprits. On assure que le soir même de sa mort, deux heures seulement avant d'être frappé, Paul I", qui ignorait encore le départ et la destination de l'escadré aux ordres

des amiraux Nelson et Hyde-Parker, donnait un libre essor à sa haine contre le cabinet de Londres; il refusait d'écouter aucune explication, renvoyait les dépêches sans les ouvrir, et préparait, de concert avec la Prusse et la France, les moyens de fermer tous les ports du continent. Ce système laissait peu de prise à l'agression; la coalition soutenue d'un côté par l'influence et la persévérance du premier Consul; et de l'autre, par l'emportement et l'obstination de l'empereur Paul, devenait de jour en jour plus formidable: l'Angleterre, menacée dans le principe de son existence, ne pouyant former aucune alliance, aurait peutêtre vainement prodigué ses intarissables ressources pour conjurer cet orage; sous le noble motif d'une cause évidemment juste, l'envie que fait naître la prospérité, le ressentiment de longues injures, inspiraient les plus fortes résolutions; on armait dans tous les chantiers, et bientôt les escadres de la Grande-Bretagne n'auraient pu suffire à combattre tant d'ennemis, à prévenir leur

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