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M. Pitt, de M. Dundas et de lord Grenville, fut le premier signal non d'un changement de principes, mais d'un changement de système, par rapport à la France. Quelques semaines après la signature du traité de Lunéville, lord Hawkesbury, qui avait remplacé lord Grenville dans la charge de premier secrétaire d'état, saisit une occasion de faire connaître à M. Otto, les dispositions du nouveau ministère, en révoquant les ordres qui avaient été donnés contre les pêcheurs, par le ministère précédent. Cette satisfaction provoquée par une note officielle qui jusques alors était restée sans réponse, retint l'agent français qui avait reçu l'ordre. de quitter l'Angleterre, amena des explications, et peu de jours après la note sui

vante.

« Le soussigné a reçu l'ordre du roi, de >> communiquer au gouvernement français >> les dispositions de sa majesté, d'entamer >> immédiatement des négociations pour le » rétablissement de la paix, et de déclarer, >> que sa majesté est prête à envoyer à Paris,

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>> ou dans tout autre endroit qui pourra être » convenu entre les deux gouvernemens, >> un ministre pleinement autorisé à donner >> toutes les explications nécessaires, et à >> négocier et conclure, au nom de sa ma»jesté, un traité entre ce pays - ci et la >> France.

»Londres, le 21 mars 1801.

» Signé HAWKESBURY ».

Une démarche aussi franche fut d'abord accueillie avec empressement; mais ces accens de paix retentirent dans les deux pays, au milieu des apprêts de guerre les plus actifs; ce fut au moment où l'Espagne ouvrait à son alliée les frontières du Portugal, où la Prusse menaçait le Hanovre, où l'Angleterre portait la guerre dans la Baltique. Le premier Consul fit répondre, le 2 avril, par son plénipotentiaire, qu'il persistait dans son amour constant pour la paix, et qu'il éprouvait une vive satisfaction, en voyant que le cabinet britannique se montrait enfin disposé à mettre un terme au fléau qui désolait

l'Europe depuis tant d'années; mais, ajoutait-il, «< au milieu de ces apprêts de

guerre

» et de ces nouveaux motifs d'exaspération, > comment espérer quelque heureux résultat » d'une négociation d'apparat, commencée >> sans être d'accord sur les premières bases; ne » serait-il pas plus naturel de faire précéder >> toute négociation par une suspension d'hos-. >> tilités, en convenant des articles d'une >> trève générale >>.

Il était facile de prévoir que cette proposition, rejetée deux ans auparavant, ne ren-, contrerait pas moins d'obstacles dans des circonstances où son admission aurait consolidé la coalition des neutres, et paralysé les efforts de l'Angleterre pour la dissoudre. Le ministre anglais ne prit pas même le soin de la discuter, et le gouvernement français, loin d'y insister, adhéra à la seconde alternative, c'est-à-dire, à la communication immédiate pleine et confidentielle, touchant les termes et les préliminaires de la paix (selon les propres expressions de lord Hawkesbury).

Jamais d'aussi grands intérêts ne furent

mis en présence; pour bien juger de leur complication, et de la difficulté qu'éprouvèrent les deux gouvernemens à poser les premières bases, il faut se rappeler les conquêtes faites par l'une et l'autre puissance, depuis le commencement de la guerre, ou sur leurs possessions respectives, ou sur celles de leurs alliés, afin de mieux apprécier la valeur des sacrifices exigés, et des compensations offertes par les parties contractantes.

Dans le nord, la France n'avait pas seulement porté sa frontière militaire jusques à la rive gauche du Rhin, et aux bouches de la Meuse, mais elle avait réellement incorporé, sans aucune opposition, ces riches et populeuses provinces. Ce n'était plus l'envahissement d'un territoire, dont la restitution pût être reclamée par l'ancien souverain, et devenir une des clauses de la pacification: la conquête de la Belgique était consommée; deux traités solennels avaient sanctionné la cession du Brabant autrichien, et de la Flandre maritime. La suppression et la dépossession des anciens électorats ecclésiasti

ques venaient d'être consenties par l'Empire. La nouvelle forme de la république de Hollande excluant le stathoudérat, élevait une forte barrière politique, une puissance auxiliaire nécessairement soumise à l'influence de ses redoutables voisins. Les états du roi de Sardaigne, dont l'Angleterre avait garanti l'intégrité, avaient passé en entier sous la domination de la France: la réunion de la Savoie et du comté de Nice, complément si naturel de la frontière des Alpes, était le moindre avantage qu'elle put retenir de ce côté. La Lombardie érigée en république, et la couronne de Toscane décernée à un prince espagnol, n'étaient plus des change, mens éphémères; la maison d'Autriche les avait reconnus, elle en avait accepté les dé dommagemens; elle avait scellé le tombeau de l'ancienne république de Venise. L'occupation militaire du royaume de Naples et des meilleurs ports de l'Adriatique, achevait de mettre l'Italie inférieure dans la dépendance du gouvernement français. Enfin, l'Égypte n'était point encore évacuée.

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