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SÉNAT DE BELGIQUE.

RAPPORT

Falt par M. le baron D'ANETHAN, au nom de la Commission de la Justice, chargée d'examiner le Projet de Lol,

« Messieurs,

du système auquel on veut en substituer un nouveau, et l'utilité des modifications à introduire.

» Le régime hypothécaire se lie à toutes » les branches de la législation; il inté- Ces vices principaux, quant à la trans»resse le commerce et l'industrie comme mission des biens immobiliers et au ré› l'agriculture, les capitaux comme les gime hypothécaire, quels sont-ils? Per» biens-fonds, l'Etat comme les particu- sonne ne les ignore: ce sont l'incertitude » liers. » sur le droit de propriété, l'absence de C'est en ces termes que l'importance sécurité pour les prêts hypothécaires. Or, de la question qui vous est aujourd'hui | il suffit de les signaler pour reconnaitre soumise est appréciée dans les documents l'urgence de les faire disparaître en adoprelatifs au régime hypothécaire publiés tant un système de nature à sauvegarder en France, en 1844. Ainsi, questions de ces deux graves intérêts. législation, questions intéressant le commerce, l'industrie et l'agriculture, questions de crédit, questions de propriété, tel est le vaste champ que vous avez à parcourir. Ce n'est pas sans crainte que votre commission a abordé l'examen de ces difficiles problèmes, ce n'est pas sans crainte qu'elle a touché à ce code civil, qu'elle a consenti à ôter une pierre de ce monument législatif qui, seul, aurait suffi pour immortaliser un règne. Mais, si votre commission ne se dissimule pas les inconvénients, les dangers même qu'il peut y avoir dans le passage d'une législation à une autre, elle pense, d'un autre côté, que, si ces considérations commandent une grande prudence, elles ne doivent pas arrêter le législateur, lorsqu'un examen approfondi lui a fait reconnaître les vices

Consolider la propriété au moment où elle est audacieusement attaquée, affermir, rassurer le crédit au moment où d'absurdes théories l'ébranlent en traitant le capital en quelque sorte en ennemi, c'est une œuvre prudente, sage, opportune; c'est de plus un bon exemple à ajouter à ceux que la Belgique peut être fière d'avoir déjà donnés au monde.

Ces considérations ont suffi à votre commission pour la convaincre qu'il était convenable d'aborder la réforme hypothécaire, et elle a de suite passé à l'examen de la loi, se réservant de s'expliquer sur tous les principes, au fur et à mesure de la discussion des articles auxquels ils se rattachent.

ARTICLE PREMIER.— Adopté sans discus

sion.

(1) Cette commission était composée de MM. le chevalier WYNS de Raucour, président; SAVART, baron D'UDEKEN, D'Hoop, de SchieTERE; le baron D'ÀNETHAN, rapporteur.

Dispositions préliminaires.

DE LA TRANSMISSION DES DROITS RÉELS.

ARTICLE PREMIER.

espèce de publicité exigera-t-on? A l'égard de quels faits, de quelles dispositions, cette publicité sera-t-elle exigée?

Les registres des conservateurs des hypothèques ont paru à tout le monde fournir le meilleur moyen de rendre publiques les mutations de propriété. — Mais la transcription de l'acte entier sera-t-elle lé-requise? ou la mention de l'acte avec certaines indications suffira-t-elle? Tel est le point à décider.

D'après la législation actuelle, la propriété s'acquiert et se transmet par succession, par donations entré-vifs ou testamentaires, et par l'effet des obligations. Telle est la règle générale tracée dans l'article 711 du code civil. Cette règle, contraire aux principes de l'ancienne gislation, cette règle qui abrogeait les sages prescriptions de la loi de brumaire an VII, fut dès son apparition l'objet de vives critiques. Et comment pouvait-il en être autrement? En n'exigeant aucune publicité pour la transmission de la propriété, on mettait en péril les droits des tiers, et les droits des acquéreurs eux-mêmes, qui n'avaient aucun moyen certain de reconnattre s'ils traitaient avec le véritable propriétaire.

Aussi, à peine le législateur a-t-il consacré cette innovation, qu'il semble reculer devant ses conséquences. Il soumet à la transcription les actes portant donation de biens susceptibles d'hypothèque (article 939, code civil), et les dispositions par actes entre-vifs ou testamentaires à charge de restitution (art. 1069 du code civil). On le voit hésiter de nouveau en portant l'article 1583, dans lequel il indique qu'il doit exister, quant à la transmission de la propriété, une différence de position entre le vendeur et les tiers; et enfin, dans l'article 834 du code de procédure civile, il exige la transcription de l'acte translatif de propriété pour mettre, après un délai de quinzaine, l'acquéreur à l'abri de toute charge hypothécaire non inscrite. Personne ne mettra en doute la nécessité de modifier ces dispositions incohérentes, et de les modifier en rendant générales les garanties dont quelques actes seulement sont maintenant entourés.

La commission qui a élaboré le projet de loi avait adopté ce dernier mode : elle voulait qu'on remit au conservateur la copie authentique du titre qui devait rester déposée à son bureau, et chargeait ce fonctionnaire d'inscrire sur les registres la date du titre, la mention du notaire on du tribunal, la désignation des parties et l'indication cadastrale des immeubles.

De cette manière, elle voulait éviter les écritures longues et dispendieuses que nécessitent les transcriptions; elle croyait trouver une garantie suffisante dans le dépòt des actes, et considérait toute erreur comme à peu près impossible dans l'opé ration toute matérielle imposée au conservateur.

La commission de la chambre, et la chambre ensuite ne se sont pas rangées i cet avis; il leur a paru essentiel d'exiger la transcription en entier du titre sur les registres du conservateur, et votre commission partage cette opinion. Remarquez, en effet, que d'après les auteurs di projet, la réalisation des actes de matation et de concession des droits réels étail attachée à l'annotation faite par le conser vateur (Exposé des motifs, p. 17), € qu'ainsi la moindre erreur de celui-a pouvait avoir les conséquences les plus graves. Le dépôt de l'acte pouvait mettre sur la trace de l'erreur, mais non la répt Ici se présentent deux questions: Quelle rer. La transcription seule peut don

offrir une garantie sérieuse; quant au travail et à la difficulté des recherches qui résulteront du mode adopté, il faut attendre l'expérience pour se prononcer, et, dans tous les cas, des mesures, prises par voie administrative, suffiront pour faire disparaître la plupart des inconvénients.

La transcription étant reconnue nécessaire, il ne peut être question d'exiger les indications cadastrales, que le projet primitif enjoignait au conservateur de consigner sur ses registres; nous examinerons, à l'art. 82, de quelle utilité peuvent être, en cette matière, des renseignements empruntés aux registres et plans cadas

traux.

Abordons maintenant la seconde question. A l'égard de quels faits, de quelles dispositions, la publicité sera-t-elle exigée ?

Il ne s'agit d'abord que des droits réels immobiliers, sauf une addition en ce qui concerne les baux.

Les meubles n'ayant pas de suite par hypothèque (art. 2119, code civ.), et en fait de meubles la possession valant titre (art. 2279, code civ.), la transcription aurait été, sous un rapport, inutile, et sous un autre, contraire au principe admis pour établir la propriété des meubles. On | devait également se borner aux droits réels, c'est-à-dire aux droits dans la chose, aux droits qui lui demeurent inhérents, en quelque main qu'elle passe (jus in re), puisque le but de la loi est uniquement de consolider et de rendre en quelque sorte palpable ce jus in re, c'est-à-dire le droit de propriété.

L'art. 1er ordonne la transcription de tous actes entre-vifs, à titre gratuit ou onéreux, translatifs ou déclaratifs de droits réels immobiliers.

Le projet n'étend pas, et avec raison, l'obligation de la transcription aux transmissions par succession et par testament. On ne peut faire dépendre d'une formalité quelconque la transmission à l'héritier des droits de propriété du défunt. Il faut bien qu'après la mort de celui-ci les droits reposent sur la tête de quelqu'un. Que deviendrait le principe fondamental de la saisine, si une formalité était exigée et que l'héritier ne la remplit pas? Les

mêmes motifs s'opposent à la transcription des testaments, en ce qui concerne les légataires qui ne sont pas tenus à demander la délivrance de leurs legs; quant aux autres légataires, et notamment quant aux légataires particuliers, des jurisconsultes ont proposé de soumettre à la transcription les legs qui leur sont faits, en se fondant sur ce que l'héritier de droit, ou le légataire universel, pourrait présenter, comme leur appartenant ou comme exempt de toute charge réelle, un immeuble de la succession, qui aurait été l'objet d'un legs particulier ou dont le testament aurait diminué la valeur. On ne peut se dissimuler la gravité de ces considérations; toutefois, votre commission ne les a pas jugées suffisantes pour soumettre les testaments à la transcription. C'est d'abord une chose grave que cette publicité donnée à un acte de dernière volonté; c'est ensuite une chose rigoureuse, si pas injuste, d'enlever à un légataire un droit à cause de l'inaccomplissement d'une formalité, qu'il n'a pas été à même de remplir si on lui a laissé ignorer la disposition faite en sa faveur. Dans les actes entre-vifs, où l'acquéreur intervient, il doit s'imputer son inaction, mais il n'en est pas de même dans les testaments dont les légataires peuvent ne pas connaître l'existence. Il ne faut pas favoriser la fraude et la collusion que pourrait commettre, au détriment du légataire, l'héritier d'accord avec des tiers. Les intérêts de ceux-ci ne courent, du reste, pas grand péril, même sous la législation actuelle, car, outre les précautions qu'ils peuvent prendre pour s'assurer de la nonexistence d'un testament, la jurisprudence incline à préférer les droits concédés de bonne foi aux tiers par l'héritier apparent à ceux de l'héritier valable. Votre commission pense donc qu'il est inutile d'organiser, pour les transmissions de biens par décès, un système nouveau qui assujettirait les successions les plus minimes à des formalités onéreuses.

Quant aux actes entre-vifs, aucune contestation ne s'est élevée en ce qui concerne les actes proprement dits, translatifs de propriété; mais on s'est démandé s'il fallait aussi soumettre à la transcription les jugements et les actes seulement déclara

tifs de propriété, tels que les partages. | l'acte qui le contient ne sera censé avoir

Par une fiction de la loi civile, chaque cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les objets compris dans son lot, ou à lui échus sur licitation (art. 883, code civil). Le maintien de celte fiction, que personne n'attaque, semble au premier coup d'œil rendre inutile la transcription de l'acte de partage. Quel est en effet le but de la transcription? De rendre publique la mutation de propriété, et de permettre aux tiers de faire maintenir les actes posés par l'ancien propriétaire avant la transcription. Or, en matière de partage, il ne peut pas, dit-on, en être ainsi, puisque le partage devant rétroagir, la transcription n'empêche pas les actes antérieurs de pouvoir être invalidés.

Telle est l'objection; quelques réflexions suffisent pour faire voir qu'elle n'est pas fondée, et pour le prouver il convient d'examiner les différentes hypothèses qui peuvent se présenter.

Relativement aux faits qui se sont passés avant le partage, aucune modification n'est proposée. Le tiers qui aura contracté avec un des cohéritiers, subira les conséquences du partage ultérieur qu'il pourra provoquer, ou auquel il pourra intervenir pour sauvegarder ses droits.

Quand le partage est terminé, il doit être transcrit pour pouvoir être opposé aux tiers; telle est la prescription nouvelle. Si cette formalité est accomplie, pas de difficulté, chaque cohéritier est définitivement et publiquement propriétaire de son lot; le tiers ne pourra, dans aucun cas, venir l'inquiéter du chef d'une aliénation ou d'une hypothèque qu'aurait consentie, postérieurement à la transcription de l'acte de partage, un des cohéritiers à l'égard d'un des immeubles non compris dans son lot. Si, au contraire, l'acte de partage n'est pas transcrit, il est relativement aux tiers comme s'il n'existait pas pour eux, les biens de la succession sont restés indivis. Toutefois les cohéritiers ayant toujours le droit de provoquer un partage, conservent aussi et par le même motif le droit de faire transcrire un partage consommé; cette transcription lui donnera seule une existence réelle et complète, par conséquent

été fait qu'à la date de la transcription. C'est en cela que consiste l'utile innovation de la loi. Ainsi, si l'acquéreur de droits successifs ou d'immeubles n'a pas fait faire la notification et la transcription de son titre d'acquisition, s'il n'a pas formé d'opposition au partage, il devra évidemment respecter le partage fait, car il ne peut pas être dans une position meilleure que si le partage avait été réellement fait après son acquisition. — Si au contraire il s'est mis en règle, il sera recevable i attaquer le partage comme il l'aurait pu, aux termes de l'art. 882, si le partage avait réellement été fait à la date de la transcription.

Si l'on n'exigeait pas la transcription du partage; en d'autres termes, si on permettait d'invoquer contre les tiers un partage non transcrit, ceux-ci pourraient être lésés. N'est-il pas possible en effet qu'ils aient contracté dans la persuasion que l'indivision existait encore, persuasion que devait faire naître chez eux la nontranscription de l'acte de partage?

Pour les jugements passés en force de chose jugée il ne peut exister aucun doute en ce qui concerne ceux qui tiennent lieu de convention et ceux d'adjudication; ce sont en effet les titres qui constatent la mutation.

Votre commission pense qu'il convient de mentionner ces jugements dans l'article 1er, pour deux motifs : 1° pare qu'il ne faut laisser planer aucune incertitude sur la nécessité de cette transcription; 2° parce que si le mot actes comprenait aussi les jugements, il résulterait de l'article, que les jugements, même déclaratifs, devraient être transcrits pour : pouvoir être opposés aux tiers, ce qui ne doit pas être, comme nous allons l'établir.

Nous avons vu que les partages doivent être transcrits; nous en avons dit les motifs : ces motifs s'appliquent-ils également aux jugements déclaratifs? Votre commission ne le pense pas. Quel est le sens de ces mots, que certains actes ne peavent être opposés aux tiers avant d'avoir été transcrits? Ces mots signifient que, jusque-là, ces actes sont sans valeur quant aux tiers; qu'ils sont pour les tiers comme

n'existant pas, relativement à tous les contrats passés jusqu'à cette époque. Nous avons vu les effets de cette non-transcription à l'égard des partages qui peuvent être annulés à la demande des tiers, si ceux-ci ont éprouvé une lésion par suite de l'ignorance dans laquelle les a laissés l'absence de publicité. La loi fait avec raison une différence, quant aux droits des tiers, entre les actes passés avant et ceux passés après le partage; elle peut donc établir le partage public, ou plutôt le partage transcrit, comme point de départ, pour fixer cette différence de position; mais il ne peut en être de même pour les jugements. Un jugement passé en force de chose jugée n'est plus susceptible de modifications; peu importe l'époque à laquelle il est transcrit, tant qu'il subsiste, il doit être exécuté; les tiers mêmes, qui, dans l'ignorance de la décision, auraient contracté, ne pourraient évidemment pas demander la réformation du jugement; ils devront le subir avec toutes ses conséquences, c'est-à-dire avec l'annulation de tous les actes faits en vertu d'un prétendu droit dont le jugement a déclaré la non-existence. Il serait donc impossible de dire qu'un jugement est comme non avenu, quant aux actes antérieurs à la transcription, puisque cette formalité, une fois remplie, le jugement doit nécessairement rétroagir sur tous les actes passés, quelle qu'en soit l'époque, par celui dont le droit est déclaré par justice n'avoir jamais valablement existé. Il suit de ce qui précède, qu'on ne peut pas exiger la transcription des jugements déclaratifs aux mêmes fins que la transcription des actes déclaratifs ; mais il n'en est pas moins utile d'entourer ces jugements de la plus grande publicité. Votre commission indiquera à l'art. 3 comment, d'après elle, cette publicité doit être organisée.

La commission propose de rédiger comme suit le deuxième paragraphe de l'art. 1or:

« Il en sera de même des jugements » tenant lieu de conventions ou de ti»» tres, pour la transmission de ces droits, » des actes, etc., » comme au projet.

L'addition proposée fera droit aux jusLes observations faites à la chambre des

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représentants; elle établira l'obligation de la transcription pour les jugements tenant lieu de contrat, ainsi que pour les jugements d'adjudication, jugements qui constituent le titre de l'adjudicataire; de cette manière enfin sera réalisée cette pensée exprimée dans l'Exposé des motifs, p. 12: « que si l'on admet la transcription dans un registre public comme signe de la propriété dans le chef des individus que ce re❘gistre désigne, il importe de soumettre à la même formalité tous les actes de mutation, quelle qu'en soit la nature. »

Le projet primitif dispensait de la transcription les servitudes apparentes, cette exception n'a pas été maintenue.

Des autorités respectables se sont montrees opposées non-seulement à la transcription des servitudes apparentes, mais même à la transcription de toutes servitudes réelles. On prétendait que cette obligation gênerait les rapports de voisinage, compromettrait des droits acquis, serait même nuisible à l'agriculture, en subordonnant à une formalité certains droits dont la conservation est impérieusement commandée par l'intérêt agricole.

Ces motifs n'ont pas paru suffisants à votre commission, pour s'écarter, en ce qui concerne les servitudes, de la règle générale ordonnant la transcription.

La loi veut introduire une utile publicité; elle veut qu'on puisse acquérir en pleine sécurité; cette sécurité n'existerait pas, si des servitudes, tenues cachées jusqu'au moment du contrat, venaient plus tard à se révéler, et devaient être respectées.

Quant aux intérêts pour lesquels on manifeste des craintes, il suffit de faire remarquer qu'ils sont garantis par des servitudes établies par la loi, et pour le maintien desquelles la transcription n'est évidemment pas exigée.

Votre commission pense qu'il convient même de soumettre à la transcription les servitudes apparentes; cette formalité pourra, il est vrai, être parfois inutile; mais elle aura une incontestable utilité, dans le cas où le droit de servitude aura été accordé, sans être encore établi en fait, sans être manifesté, au moment de l'aliénation, par des ouvrages apparents. Tout ce que nous avons dit jusqu'à pré

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