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n'ai toutefois pas l'intention de vous immobiliser sur ces points pendant fort longtemps. Voici, au contraire, quels sont mes projets :

« Votre Excellence se rend évidemment compte de tous les avantages que nous assurerait la possession d'une quelconque de ces forteresses qui deviendrait pour nous une place d'armes. S'il est possible de s'emparer d'une de ces places (dans lesquelles il n'y a, d'ailleurs, que des conscrits), soit grâce à la connivence des habitants, soit d'assaut, il importe de tenter cette entreprise, dussions-nous sacrifier pour cela un millier d'hommes et même davantage. Partout où une entreprise de ce genre serait impossible, il sera utile d'alarmer de nuit la garnison pour arriver à connaître ce qu'elle vaut. Il suffit, à cet effet, de quelques vieux soldats d'infanterie.

<«< Si l'on ne peut pas parvenir à prendre Metz, Thionville et Luxembourg, si les commandants de ces places sont décidés à faire bonne contenance, il conviendra, en attendant l'arrivée du général von Kleist, de charger le général von Röder de bloquer avec sa cavalerie Luxembourg et Thionville, de confier la même mission devant Metz à la cavalerie de Langeron. Votre Excellence marchera alors avec son corps d'armée droit par Saint-Mihiel vers la Meuse, après avoir fait préalablement tâter Longwy.

« J'ignore ce que vous possédez en fait de munitions pour les obus de 10 livres; toutefois si, en bombardant une de ces places avec ces pièces, vous pensiez amener une capitulation, vous auriez assurément à recourir à ce moyen, tout en ménageant cependant vos munitions, dont vous aurez besoin quand nous livrerons bataille.

« Je me rends à Nancy, pour me tenir en communication avec la grande armée, et laisse Votre Excellence libre de donner, conformément aux présentes instructions, des ordres à son corps d'armée.

<«< Si vous jugiez à propos d'affecter encore pendant quelque temps des troupes d'infanterie au blocus de l'une des places, vous pourriez parfaitement le faire et ne vous porter dans ce cas sur Saint-Mihiel qu'avec une partie de votre corps.

« Prière de me faire connaitre l'époque de votre arrivée à Saint-Mihiel et la situation d'effectif des troupes qui marcheront avec vous. J'envoie à Votre Excellence des ordres destinés au

général von Röder et au général russe Borosdin, afin que vous puissiez en faire éventuellement usage.

«< Au quartier général de Saint-Avold, 15 janvier 1814. »

A cette dépêche étaient joints les ordres auxquels le feld-maréchal vient, à plusieurs reprises, de faire allusion et qui réglaient dans leur ensemble les mouvements du Ier corps pour les journées des 16, 17 et 18 janvier.

Mouvements des corps de l'armée de Silésie le 18 janvier. En attendant l'exécution de ces nouveaux ordres reçus le 15 au soir, on n'avait fait pendant la journée du 15 qu'une reconnaissance sommaire de Metz, et comme la brigade Pirch était arrivée, dans le cours de cette journée, devant Thionville, la brigade Horn avait pu commencer son mouvement sur Sierck.

Quant à Henckel, qui, au moment de quitter Trèves pour marcher sur Thionville, avait reçu de Blücher l'ordre formel de coopérer à l'entreprise que le général von Horn allait tenter contre Luxembourg, il était déjà, le 15 au soir, à Grewemachern.

Le corps d'armée de Kleist continuait à marcher vers le Rhin, en deux colonnes, l'une par Giessen, Wetzlar, Weilburg et Leinburg, l'autre par Herborn, Hadamar et Ehrenbreitstein, tandis que sa cavalerie, sous les ordres du général von Röder, arrivait le 17 à Trèves.

Retraite de Marmont sur Mars-la-Tour. Ce fut également le 15 janvier qu'une brigade de cavalerie du corps Sacken vint rejoindre Biron à Nancy, et que Marmont dut, à la suite de la retraite précipitée de Ney et de Victor, se résoudre à quitter avec la cavalerie de Doumerc et les divisions Lagrange et Decouz, Metz, où il laissa le général Durutte avec deux des régiments de sa division et les conscrits qu'on avait rassemblés dans cette place. Il se replia sur Mars-la-Tour, sans être, d'ailleurs, le moins du monde inquiété par la cavalerie prussienne.

C'est en réalité pour cacher la faute du général Ricard que le duc de Raguse, dans la dépêche qu'il écrivit de Metz le 15 janvier à 11 heures 1/2 du soir au major général, cherche à rejeter sur Ney et Victor la responsabilité de son mouvement rétrograde. Il est, en effet, obligé de reconnaître dans cette même dépêche que le général Ricard, informé de l'entrée de l'ennemi à Nancy,

a cru devoir, à la nouvelle de sa marche sur Thiaucourt, abandonner Pont-à-Mousson. Il ajoute que Ricard a dû se replier, par suite du mouvement rétrograde des autres corps sur Toul et que ces mouvements le forcent à quitter lui-même la Moselle le 16 pour se rapprocher de la Meuse. Mais ce n'était là qu'une excuse peu plausible, qu'une preuve de plus de la mésintelligence qui régnait entre les trois maréchaux, puisque le 16 à 8 heures du matin le maréchal faisait écrire par son chef d'état-major, le général Meynadier, au général Ricard: « Le maréchal trouve votre mouvement de Pont-à-Mousson sur Thiaucourt bien précipité. Son Excellence aurait voulu que vous gardassiez ce point, et au moins qu'en le quittant, vous en eussiez fait sauter le pont. » Enfin, dans une autre dépêche, il lui donne l'ordre de s'arrêter, « parce que lui-même s'arrêtera à Gravelotte, et qu'il serait resté à Metz si Ricard n'avait pas évacué Pont-à-Mousson. »

Ney et Victor ont assurément commis une lourde faute en laissant subsister les ponts de Frouard et de Bouxières-aux-Dames. Mais la destruction du pont de Pont-à-Mousson était d'autant plus nécessaire que Pont-à-Mousson était précisément le point qui permettait à Blücher de se déployer sans retard sur le plateau et de manoeuvrer par la rive gauche de la Moselle sur la Haute-Marne.

Ccnsidérations sur les opérations de Blücher. - Si l'on ne peut qu'approuver la résolution prise par Blücher, dès qu'il eût connaissance de la retraite des maréchaux et de l'abandon de la ligne de la Moselle, si l'on comprend que, se mettant en route pour prendre vigoureusement l'offensive avec le gros de ses forces, il ait tenu à s'assurer ses derrières et à couvrir sa droite en chargeant York de masquer momentanément les places de la Moselle, on ne parvient pas en revanche à découvrir les raisons pour lesquelles il détacha du Ier corps prussien deux brigades d'infanterie et la colonne de Henckel pour les envoyer vers Thionville et plus à droite encore, vers Luxembourg. Blücher savait cependant fort bien que la cavalerie de Röder allait arriver le 17 à Trèves et pourrait de là surveiller Luxembourg. Il aurait pu, en outre, faire rabattre de ce côté Saint-Priest, qui, avec le 8e corps, avait pris, d'Andernach et de Remagen, sa direction sur Malmédy et Givet. Enfin, la cavalerie de Langeron, sous le général Borosdin, suivie de près par une bonne partie de l'infanterie de ce corps,

!

devait être, du 17 au 18 au plus tard, devant Metz. Ces détachements, ces expéditions excentriques sont d'autant plus inexplicables que Blücher ne cherchait pas des avantages partiels, des succès insignifiants, qu'il était obsédé par l'idée fixe de joindre l'ennemi au plus vite et avec le plus de monde possible. C'était donc de sa part commettre une double faute1 que d'obliger York à envoyer près de la moitié de son corps aussi loin de la ligne qu'il aurait à suivre pour rejoindre le gros de l'armée; c'était lui imposer volontairement des retards inutiles et le mettre presque dans l'impossibilité de concentrer son corps et de marcher avec toutes ses forces réunies dès qu'il aurait été relevé sous Metz par les renforts qui s'approchaient. L'entêtement mis par Blücher à vouloir se rendre, presque sans coup férir, maître des places de Lorraine ne peut s'expliquer que d'une seule façon : le feld-maréchal espérait que les commandants de ces forteresses se laisseraient intimider, ouvriraient à York les portes des villes fortes qu'ils étaient chargés de défendre et suivraient le déplorable exemple donné tout récemment par les officiers auxquels l'Empereur avait confié les places de Hollande et qui, presque tous, avaient capitulé à la première sommation de Bülow et de ses lieutenants.

Malgré le mécontentement, assez naturel d'ailleurs, qu'il éprouva à la réception d'un ordre qui le chargeait d'une mission. aussi ingrate que difficile, York prit immédiatement les mesures nécessaires pour se conformer aux dispositions nouvelles que

1 Clausewitz, dans sa Critique stratégique de la campagne de 1814, a luimême condamné cette opération en disant : « Comme le plan entier de la campagne consistait à amener le plus rapidement possible une grande bataille décisive, la prise de quelques forteresses ne pouvait constituer en tous cas qu'un objectif absolument secondaire, dont on devait s'occuper seulement après avoir porté ce coup, ou bien dans le cas, improbable d'ailleurs, où la guerre aurait pris un caractère traînant. Il importait donc d'employer le moins de troupes possible pour paralyser l'action des places occupées par les Français. Il suffisait, par suite, surtout dans le principe et jusqu'à l'arrivée des réserves, de s'occuper uniquement de celles qui étaient situées sur les routes même ou à proximité des routes par lesquelles on marchait, d'observer simplement celles d'entre elles qui étaient peu importantes et de n'investir que celles qui avaient une valeur réelle.

« On pouvait ranger parmi les premières, Erfurt, Würzburg, les places d'Alsace et Strasbourg; parmi les deuxièmes, Mayence, Landau, Sarrelouis, Thionville, Metz, Luxembourg, Longwy et éventuellement Verdun, et 65,000 hommes suffisaient amplement à cet e.Tet. »

Blücher avait arrêtées le 15 au soir. Aux termes de ces dispositions, une des brigades d'infanterie du Ier corps devait investir Metz, de Colombey par Magny-sur-Seille jusqu'à Montigny-lesMetz. La cavalerie de l'avant-garde devait fournir les troupes d'investissement de Saint-Julien à Montigny; l'autre brigade restait en soutien, et la cavalerie de réserve était destinée à suivre le mouvement de retraite de l'ennemi sur Verdun.

Le 17, la brigade d'infanterie, gardée jusque-là en soutien, avait ordre de passer la Moselle à Ancy et de compléter l'investissement de Metz. Le blocus de Thionville et de Luxembourg devait être également chose faite à la date du 17, jour où le corps Sacken, dont les quartiers s'étendaient de Château-Salins à Nancy, ferait occuper cette dernière ville par une brigade d'infanterie et aurait à pousser de l'infanterie à Pont-à-Mousson et à faire suivre l'ennemi par sa cavalerie tant dans la direction de Commercy que dans celle de Bar-le-Duc. Blücher insistait, en outre, sur les mouvements de la cavalerie de Borosdin et de l'infanterie d'Olsufiew, dont la division, déjà arrivée à Sarrebrück, devait atteindre le 19 la ligne Château-Salins-Nancy.

16 janvier. Mouvement des troupes d'York autour de Metz. — York transféra par suite son quartier général le 16 de Longeville à Boulay pendant que ses troupes exécutaient autour de Metz les mouvements prescrits. Toutefois la cavalerie de réserve du général von Jürgass ne réussit pas à passer la Moselle, en face d'Ancy, à Jouy-aux-Arches: le dégel, survenu depuis la veille au soir, avait grossi la rivière, qui charriait de gros glaçons, et le général, manquant absolument de moyens pour exécuter son passage au point indiqué, obligé de remonter la Moselle jusqu'à Pont-à-Mousson, ne put arriver que jusqu'à Champey. Il en fut de même pour la brigade Pirch, qui ne put passer à Thionville, et pour le général von Horn, qui, ne voulant pas remonter jusqu'à Trèves pour reprendre le chemin de Luxemhourg, se vit pour la même raison obligé de rester à Sierck. Henckel, il est vrai, était arrivé à Betzdorf, et un de ses partis, sous les ordres du capitaine von Osten, avec un escadron, battait l'estrade au nord de Luxembourg, entre Mersch et Arlon.

Henckel envoie des partis sur Arlon. Henckel profita de

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