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Il étoit près de sept heures: Buonaparte, qui étoit resté sur le plateau, contemploit avec un regard féroce le hideux spectacle d'une aussi effroyable boucherie. Plusieurs fois on lui fit dire de divers points que l'affaire étoit mauvaise, que les troupes paroissoient ébranlées : En avant! répondoit-il, en avant!

Un général le fit prévenir qu'il se trouvoit dans une position à ne pouvoir tenir, parce qu'il étoit écrasé par une batterie; il lui demandoit en même temps ce qu'il avoit à faire pour se soustraire au feu meurtrier de cette batterie: S'en emparer, répondit-il; et il tourna le dos à l'aide-de-camp. Rien n'ayant pu le faire changer de résolution, Buonaparte forma une quatrième colonne d'attaque, presque entièrement composée de la garde, et se dirigea au pas de charge sur le Mont-Saint-Jean. Ces vieux guerriers abordèrent le plateau avec l'intrépidité qu'on devoit en attendre toute l'armée reprend vigueur; le combat se rallume sur toute la ligne. La garde charge à diverses reprises, mais elle est constamment repoussée : des masses énormes d'infanterie, soutenues par une immense cavalerie, à laquelle nous ne pouvions plus en opposer, puisque la nôtre étoit entièrement détruite, fondent sur eux avec fureur, et les entourent de tous côtés, les somment de se rendre : La garde ne se rend pas,

elle meurt, répondent-ils. Alors on ne leur fait plus de quartier presque tous tombent, en se battant en désespérés, sous le tranchant des sabres et des baïonnettes.

Pendant que les choses se passoient ainsi vers le centre, les colonnes prussiennes, arrivées sur notre droite, continuoient à s'avancer et à presser avec impétuosité sur le peu de troupes françaises qui se trouvoient sur ce point. Une épouvante générale se répandit dans l'armée, qui se débanda sur tous les points et se déborda

comme un torrent.

Les cannoniers abandonnent leurs pièces, les soldats du train coupent les traits de leurs chevaux; l'infanterie, la cavalerie, toutes les armes, mêlées et confondues, ne présentent plus qu'une masse informe que rien ne peut arrêter et qui se sauve vers la route et à travers champs. Une foule d'équipages suivent le mouvement avec précipitation, s'y jettent tous ensemble, et l'encombrent au point que l'on ne peut plus y circuler.

L'ennemi, qui s'aperçoit du bouleversement de notre armée, détache sur-le-champ une nombreuse cavalerie pour la poursuivre. • Pendant que des escadrons lancés sur la route tombent à l'improviste sur les ambulances, qui n'ont pas le temps d'être prévenues, et s'en emparent, des colonnes formidables

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s'avancent sur nos flancs. Les équipages de la maison de Buonaparte, arrêtés aux environs de la ferme où il avoit logé, sont pris par les Prussiens, ainsi qu'une multitude d'autres bagages. Tous les canons, ainsi que les caissons, tombèrent au pouvoir de l'ennemi.

En moins d'une demi-heure tout le matériel avoit disparu, ainsi que Buonaparte, qui, pour la cinquième fois, déserta et abandonna son armée!... Ainsi finit cette tragédie sanglante, qui a sacrifié cinquante mille Français. La perte des alliés, dans les journées des 15, 16, 17 et 18, peut monter à quarante mille hommes. L'armée anglaise a fait une perte considérable en officiers supérieurs. Plusieurs princes ont été blessés, »

20 JUIN.Lettre particulière du prince Blucher, datée de Gosselies: « Je me suis remis de ma chute, mais j'ai encore perdu un cheval; je ne crois pas que de sitôt, ou jamais, je pourrai livrer une bataille. Notre victoire es: la plus complète qui ait été jamais gagnée. Napoléon s'est échappé pendant l'obscurité de la nuit, en abandonnant son chapeau et son épée. Je les envoie au roi. J'ai pris son grand manteau de couronnement parsemé d'abeilles d'or, et sa voiture de gala. Je possède aussi le télescope avec lequel il nous a examinés le jour de la bataille. Nos troupes se

sont emparées de ses bijoux et de tout ce qu'il possédoit de précieux. Il ne lui est pas resté la moindre chose de ses équipages. Tel soldat a 20 et 24,000 francs. Napoléon s'était jeté, dans sa voiture pour se sauver, lorsqu'il fut surpris par nos troupes. Il en sortit précipitamment, et se jeta sur un cheval, sans épée, et en laissant tomber son chapeau. Les suites de cette journée sont incalculables; la perte de Napoléon est assurée. » Les gazettes de Londres disent qu'on a trouvé dans la voiture de Buonaparte la liste des espions et agens qu'il avoit dans les pays étrangers; et dans une autre voiture, un service complet en or.

30 JUIN. Extrait de la gazette de Berlin. Aujourd'hui le lieutenant de Pless est arrivé avec les diamans de Napoléon', que le 15° régiment de ligne a pris le 18 à Génappe. Le régiment, gorgé de richesses, résolut de mettre ce trésor aux pieds de S. M., à laquelle il fut présenté à Hanau; mais le roi ordonna de le transporter à Berlin. Il renferme des diamais bruts de la plus grande valeur.

21.

Arrivée à Paris de Napoléon avec son frère Joseph. Son intention est de demander 500 mille hommes, et deux cent millions. Mais la perte de la bataille du 18 ayant compromis le salut de la patrie, le retour du général, déserteur pour la cinquième fois de son

armée, augmentoit les craintes publiques: la plus grande agitation se manifestoit parmi le petit nombre des représentans dignes de ce nom; l'indignation et le courage dictoient les plus vigoureuses résolutions.

Deux députés s'étoient présentés officieusement à l'Elysée, et y avoit révélé le secret des chambres. Napoléon leur répondit : « Je suis en mesure de leur résister. «Non, sire reprit l'un d'eux, l'opinion est pour elles : »' « l'opinion! répliqua-t-il, je sais que tôt ou tard elle me renversera; mais j'ai encore toute ma puissance, et j'en userai. » Les députés, de retour dans l'assemblée, firent part de leur message et des intentions de Napoléon. La séance s'ouvrit, les ministres furent mandés : leur lenteur à paroître étoit un crime; la chambre leur prescrivit par un second message sa volonté : ils obéirent. Ils parurent dans la salle, accompagnés de Lucien Buonaparte, commissaire de Napoléon, qui requit en son nom un comité général ; il se forma. On y lut un message de Napoléon qui, ne dissimulant plus les pertes du 18, recommandoit aux représentans l'union, il annonçoit la formation d'une commission formée du duc de Vicence (Caulaincourt), du duc d'Otrante (Fouché), et du comte Carnot, pour traiter de la paix avec les coalisés. M. H. L. parut à la tribune.

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