Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

nommé Aventin, averti, disent les légendaires, par une révélation d'en haut, et probablement touché de la figure et de la résignation du jeune esclave, paya aux Barbares tout ce qu'ils demandaient pour sa rançon et le prit dans son couvent. Ayant ainsi em brassé la vie monastique, Fidolus s'y distingua te!lement qu'il fut mis au nombre des saints'. Ce sont des Vies de saints qui ont fourni la plupart des détails qui précèdent. Les hommes qui les composèrent, il y a treize siècles, afin d'exalter les vertus religieuses, n'eussent pas travaillé pour un autre intérêt; et il se trouve qu'aujourd'hui leurs pieuses légendes sont les seuls documents capables de constater, aux yeux de la science, l'état du monde romain, tourmenté et désolé par ses conquérants.

[blocks in formation]

Le petit-fils de Sidonius Apollinaris n'avait pas attendu à Clermont l'arrivée du roi Theoderik. Au bruit de la marche des Franks, il avait quitté la ville en grande hâte et s'était réfugié à Bourges, sur les terres de son patron Hildebert. Obligé par crainte

1. Vila S. Fidoli (saint Fal), apud Script. rer. gallic. et francic., t. III, p. 407.

des habitants à tenir sa fuite secrète, Arcadius partit seul, abandonnant à la merci des événements Placidina, sa mère, et Alcyma, sœur de son père : toutes deux, après l'occupation du pays, furent dépouillées de leurs biens et condamnées à l'exil'. Depuis lors Arcadius devint l'agent de confiance de Hildebert. Instrument passif des volontés du roi barbare, il les exécutait sans discussion et sans scrupule. I 'une de ses ambassades eut pour résultat un crime fameux dans notre histoire, mais dont le récit, vague et mal détaillé chez les écrivains modernes, a besoin, si l'on peut parler ainsi, d'être restitué d'après les textes: c'est le meurtre des enfants de Chlodomir.

Depuis la mort de ce roi, qui avait péri dans une guerre contre les Burgondes, son héritage était demeuré vacant et paraissait réservé à ses trois fils, Theodewald, Gonther et Chlodoald. La reine Chlothilde, leur aïeule, les gardait auprès d'elle, et attendait que l'un d'entre eux parvînt à l'âge d'homme pour le présenter aux Franks du royaume de Chlodomir, et le faire élever sur un bouclier, suivant la coutume nationale. Chlothilde, qui avait aimé autrefois Chlodomir plus que ses autres fils, conservait pour ses enfants l'affection la plus tendre, ne les quittant jamais et les menant avec elle dans les voyages qu'elle faisait. Un jour qu'elle était venue à Paris pour y demeurer quelque temps, Hildebert, voyant ses neveux en sa puissance, envoya secrète

1. Placidina vero mater ejus, et Alchima, soror patris ejus, comprehensæ, apud Cadurcum urbem, rebus ablatis, exsilio condemnatæ sunt. (Greg. Turon. Hist. Franc., lib. III, cap. XII, apud Script. rer. gallic. et francic., t. II, p. 192.)

ment à Chlother, qui résidait à Soissons, un message conçu en ces termes : « Notre mère garde auprès << d'elle les enfants de notre frère et veut qu'ils aient «son royaume; viens donc promptement à Paris, afin « que nous prenions ensemble conseil sur ce qu'il « faut faire d'eux; savoir s'ils auront les cheveux cou« pés pour être comme le reste du peuple, ou si nou? « les tuerons, et partagerons entre nous le royaume « de notre frère1. »

Chlother ne se fit pas attendre et vint trouver Hildebert dans l'ancien palais romain qu'il habitait sur a rive méridionale de la Seine. Des agents affidés répandirent dans la ville que le but de l'entrevue des deux rois était de mettre les trois enfants en possession de l'héritage de leur père. Après avoir conféré ensemble et pris leur parti, les rois députèrent vers Chlothilde un messager chargé de dire en leur nom ces paroles : « Envoie-nous les enfants pour que << nous les élevions à la royauté. » La reine, ne se doutant point qu'il y eût là-dessous quelque artifice, fut toute joyeuse; et après avoir donné aux trois enfants à boire et à manger, elle les fit partir en leur disant: « Je croirai n'avoir pas perdu mon fils, si je vous « vois régner à sa place. » Theodewald, Gonther et Chlodoald, le premier âgé de dix ans, et les deux autres plus jeunes que lui, arrivèrent au palais de leur oncle, accompagnés de leurs gouverneurs, qu'on appelait alors nourriciers, et de quelques esclaves. I's

...

1. « Utrum incisa cæsarie ut reliqua plebs habeantur, an certe a his interfectis, regnum germani nostri inter nosmetipsos æqualitate « habita dividatur.» (Greg. Turon. Hist. Franc., lib. III, cap. xvIII, apud Script. rer. gallic. et francic., t. II, p. 196.)

7.

furent aussitôt saisis et enlevés aux gens de leur suite, qu'on enferma séparément1.

Alors le roi Hildebert, appelant son confident Arcadius, lui dit d'aller trouver la reine afin d'apprendre d'elle ce qu'on devait faire des enfants; et, pour joindre à cette demande l'éloquence des signes, que les Barbares aimaient à employer, il lui ordonna de prendre avec lui une paire de ciseaux et une épée. Le Romain obéit; et dès qu'il fut en présence de la veuve de Chlodowig, il lui présenta les ciseaux et l'épée nue, en disant : « Très-glorieuse reine, nos << seigneurs tes fils te font demander conseil sur ce « qu'on doit faire de ces enfants: veux-tu qu'ils vivent << la chevelure coupée, ou veux-tu qu'ils soient égor«gés? » Stupéfaite de ces paroles et de l'envoi qui donnait au message quelque chose de plus sinistre, Chlothilde, hors d'elle-même, sans trop savoir ce qu'elle disait, répondit : « Si l'on ne veut pas qu'ils << deviennent rois, j'aime mieux les voir morts que « tondus. » L'ambassadeur intelligent se retira aussitôt, sans attendre d'autres paroles, et porta cette réponse aux deux rois, leur disant : « Vous avez « l'aveu de la reine pour achever l'œuvre com<< mencée2. »

Les deux rois entrèrent dans le lieu où les enfants étaient gardés, et aussitôt Chlother, saisissant l'aîné par le bras, le jeta par terre et lui enfonça un couteau sous l'aisselle. Aux cris de douleur qu'il jetait, son

1. Greg. Turon. Hist. Franc., lib. III, cap. XVIII, apud. Script. rer. gallic. et francic., t. II, p. 196.

2. « Favente regina, opus eceptum perficite... » (Ibid.)

...

frère Gonther courut à Hildebert, et s'attachant à lui de toutes ses forces : « Mon père, dit-il, mon bon « père, viens à mon secours : fais que je ne sois pas << tué comme mon frère. » En dépit de ses résolutions, le roi Hildebert fut ému, les larmes lui vinrent aux yeux; il dit à son complice: « Mon cher frère, je « t'en prie, accorde-moi la vie de cet enfant : je te << donnerai tout ce que tu voudras; je te demande << seulement de ne pas le tuer. » Mais Chlother, saisi d'une espèce de rage à la vue du sang, accabla son frère d'injures : « Repousse-le loin de toi, cria-t-il, « ou tu vas mourir à sa place : c'est toi qui m'as mis « dans cette affaire, et voilà que tu manques de pa« role1. » Hildebert eut peur : il se débarrassa de l'enfant, et le poussa vers Chlother, qui l'atteignit d'un coup de couteau entre les côtes. Il paraît qu'au moment où se terminait cette horrible scène, des seigneurs franks, suivis d'une troupe de braves, forcèrent les portes, et, sans tenir compte, comme il arrivait souvent, de ce que diraient ou feraient les rois, enlevèrent le plus jeune des enfants, Chlodoald, et le mirent en sûreté hors du palais 2. Les nourriciers et les esclaves, qui n'excitaient pas le même intérêt, furent tous mis à mort, de crainte que l'envie ne leur prît de se dévouer pour venger leurs jeunes maîtres. Après ces meurtres, le roi Chlother, sans paraître aucunement troublé, monta à cheval et s'en

1. « Tu, inquit, es incestator hujus causæ, et tam velociter de fide resilis?» (Greg. Turon. Hist. Franc., lib. III, cap. XVIII, apud Script. rer. gallic. et francic., t. II, p. 196, 197.)

2. Tertium vero Chilodovaldum comprehendere non potuerunt, quia per auxilium virorum fortium liberatus est. (Ibid.)

« ZurückWeiter »