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A la fin du règne de Louis XV l'Europe croyait avoir une balance, les couronnes une garantie, la civilisation un boulevart: le trône de Pologne existait.

» Une coalition impie se forma. Un triumvirat de rois osa se confier son ambition, en désigner la victime, marquer cha-` que part dans la proie commune; et la Pologne, d'abord démembrée, disparut entièrement, quelques lustres après, du nombre des couronnes européennes.

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Quels amers regrets n'a pas éprouvés, quels honteux reproches n'a pas essayés la France, dont la faiblesse souffrit" cet attentat politique, qui a amené depuis des résultats si grands, si remarquables!

Hé bien, messieurs, ma question est répondue par ces. reproches, par ces regrets.

La Pologne, avilie, partagée, détruite, opprimée, est une leçon terrible et vivante pour la France, menacée par les mêmes puissances qui se sont disputé les lambeaux de la monarchie polonaise.

» Les mânes des Poniatowski, les mânes du dernier roi des Polonais, si misérablement jeté loin du trône; les månes du dernier général des Polonais, si glorieusement enseveli sous' des lauriers, vous disent à quels ennemis nous avons à faire, et quels sont les moyens d'en obtenir la paix que nous voulons, et le repos que désire l'Europe!

» C'est de repousser loin de l'Empire cette ligue qui en menace les frontières.

» Si les armées coalisées pouvaient pénétrer ou s'établir en deçà des Pyrénées, des Alpes ou du Rhin, le jour de la paix ne pourrait luire pour la France; il ne peut se lever pour nous qu'autant que nous aurons éloigné et rejeté l'ennemi loin de notre territoire.

» C'est pour satisfaire à ce vou, à ce besoin, à ce devoir du monarque et du peuple, que des forces nouvelles sont nécessaires, et que l'empereur les demande avec confiance à la nation, qui les a offertes avec un empressement si généreux.

»En reportant l'appel qu'autorise le senatus-consulte aux classes précédemment libérées, et en remontant jusqu'à l'an 11,Sa Majesté cède à l'empire des circonstances autant qu'aux conseils de la justice, de la sagesse, de l'humanité.

» Les hommes qui viendront se ranger sous les aigles françaises réuniront la force au courage pour en soutenir l'honneur; et cependant la jeune conscription acquerra, dans le service des armées de réserve, la vigueur qui lui manque encore pour seconder les sentimens dont elle est animée, et dont les der

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nières levées ont donné sur le champ de bataille des preuves qui ont étonné nos vieilles phalanges.

» Les gardes nationales, dont l'armement a honorablement prévenu le danger, rentreront dans leurs foyers; les pères de famille qui les composent seront rendus à leurs professions, à leurs travaux.

» Sénateurs, les paroles qui partiront de cette enceinte pour appeler aux armes les descendans de ces mêmes Francs qui, à tant d'époques glorieuses, ont repoussé les barbares de la terre des braves, de la patrie des arts, du centre de la civilisation; ces paroles seront répétées par tous les pères, par toutes les mères, par toutes les épouses, par tous les frères, dont les enfans, les époux, les frères, paient en ce moment leur dette à la patrie. Combien la France n'en compte-elle pas ! Combien j'en sais moi-même qui, les yeux encore mouillés des pleurs répandus sur des pertes douloureuses, le cœur encore ému de crainte pour ceux que la Providence a conservés à leur amour, ne songent qu'à envoyer à leur secours les braves qui leur restent encore !

» Nobles enfans de notre chère France, généreux défenseurs de notre glorieuse patrie, qui fermez vers le Rhin, vers les Pyrénées, l'entrée de la France aux Anglais, aux Russes et à leurs alliés, vous ne serez pas délaissés sans assistance dans la sainte et honorable lutte à laquelle vous vous êtes dévoués! Encore quelque temps, et des bataillons nombreux d'hommes puissans en force et en courage iront vous aider à ressaisir la victoire, et à délivrer la terre française!

» C'est ainsi, messieurs, qu'environné de toute la, force, de toute la puissance de la nation, l'empereur, modéré, comme à l'époque où il accordait à l'Autriche la paix de Léoben et de Campo-Formio, dans l'espoir de signer celle de l'Europe à Rastadt; généreux comme à l'époque où il élevait des trônes et les dotait de ses conquêtes, après les victoires d'Iéna et d'Austerlitz, pourra préparer la paix avec sagesse, en balancer les conditions avec justice, et la signer avec honneur, » (1)

Le projet de senatus-consulte fut renvoyé, selon l'usage, à une commission spéciale. Après deux jours elle fit son rapport par l'organe de M. Dejean, qui conclut à l'adoption on reproduisant les

(1) Dans cette même séance, et immédiatement après le conseiller d'état Regnault, le conseiller d'état Molé exposa les motifs d'un senatus-consulte relatif à la nomination par l'empereur du président du Corps législatif. (Voyez ci-après la SESSION.)

motifs exposés par l'orateur du gouvernement. En conséquence, le 15 novembre 1813, le Sénat décréta :

«< Considérant que l'ennemi a envahi les frontières de l'Empire du » cóté des Pyrénées et du nord, que celles du Rhin et d'au-delà des >> Alpes sont menacées; après avoir entendu, etc.;

» Trois cent mille conscrits, pris dans les classes des années 11, » 12, 13, 14, 1806, 1807 et années suivantes, jusques et com» pris 1814, sont mis à la disposition du ministre de la guerre (1).— Il sera formé des armées de réserve, qui seront placées à Bor» deaux, Metz, Turin et Utrecht, et dans les autres points où » elles pourront être nécessaires pour garantir l'inviolabilité du ter» ritoire de l'Empire. Les conscrits mariés antérieurement à la publication du présent senatus-consulte seront dispensés de con» courir à la formation du contingent. >>

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XII.

SESSION DE 1813. (Seconde de cette année.)-SÉNAT

SENAT. chancelier.

ET CORPS LÉGISLATIF.

Séance du 12 novembre 1813, présidée par le prince archiMOTIFS de deux projets de senatus-consulte relatifs au Corps législatif, exposés par M. le comte Molé, conseiller

d'état.

K

Monseigneur, sénateurs, l'empereur nous a ordonné de vous présenter un projet de senatus-consulte portant que les députés au Corps législatif de la quatrième série exerceront leurs fonctions pendant tout le temps que durera la session qui s'ouvrira le 2 décembre prochain.

» La même mesure vous fut proposée au commencement de cette année, et vous l'adoptâtes par le senatus-consulte du 9 janvier dernier.

avec

» Les raisons qui vous déterminèrent alors le feront encore plus de force aujourd'hui. L'époque de la convocation du Corps législatif est trop rapprochée pour qu'il soit possible de pourvoir au remplacement des députés sortans, et les motifs de celte convocation sont trop impérieux pour qu'elle puisse être différée. Il est donc indispensable de proroger, comme vous

(1) De l'an 11 de la République à l'année 1814, treize années; ainsi les plus anciens conscrits qui étaient rappelés avaient trente-trois

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l'avez déjà fait, dans leurs fonctions les membres composant la quatrième série.

>> Nous sommes encore chargés, messieurs, de vous présenter un autre projet de senatus-consulte. L'article porte que l'empereur nomme à la présidence du Corps législatif.

» Jusqu'ici Sa Majesté choisissait entre les cinq candidats que le Corps législatif lui avait présentés.

» Mais il peut arriver que les hommes portés sur cette liste, quelque honorables et distingués qu'ils soient par leurs lumières, n'aient jamais été connus de l'empereur.

>> Comme une des prérogatives du Corps législatif est de pouvoir parvenir directement jusqu'au souverain par l'organe de son président, il a paru, pour que ces communications pussent être plus utiles à la chose, et spécialement au Corps législatif, qu'il était convenable que le président se trouvât déjà personnellement connu de l'empereur. De cette manière le Corps législatif et chacun de ses membres seront assurés de trouver dans son président un intermédiaire, un guide et un appui.

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Il est d'ailleurs dans le palais des étiquettes, des formes qu'il est convenable de connaître, et qui, faute d'être bien connues, peuvent donner lieu à des méprises, à des lenteurs, que les Corps interprètent toujours mal. Tout cela est évité par la mesure que nous proposons.

"A toutes ces considérations pourrait être aussi jointe celle de l'économie.

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» On avait été d'abord tenté de dire que le Corps législatif serait toujours présidé par un grand dignitaire, un grand officier de l'Empire ou un ministre d'état; mais l'avis du conseil privé a été que cette limitation avait l'inconvénient de priver les membres du Corps législatif de l'avantage d'être nommés à la présidence.

» L'article 2 porte que le Sénat et le Conseil d'état assisteront en corps aux séances impériales du Corps législatif par lettres closes. Jusqu'à cette époque le Sénat n'y a assisté que par une députation, et plusieurs fois ses membres ont manifesté le désir d'y assister en corps.

» Ce sera donc un beau spectacle que de voir réunies dans une seule séance, pour entendre les paroles émanées du trône, toutes les grandes autorités de l'Etat.

» Aucune objection raisonnable ne peut être faite contre celte proposition, puisque dans ces séances solennelles, consacrées à la prestation du serment des nouveaux membres, il re peut y avoir, ni discussion ni délibération, et qu'on y est seulement appelé pour entendre le discours émané du trône. »

M. le comte Chaptal, au nom d'une commission nommée le 12 novembre pour examiner ces deux projets de senatus-consulte, les appuya des mêmes considérations dans un rapport fait le 15, et ce même jour le Sénat décréta :

1o. « Les députés au Corps législatif de la quatrième série exer>> ceront leurs fonctions pendant tout le temps de la duréc de la ses>>sion qui s'ouvrira le 2 décembre 1813. »

20. « L'empereur nomme à la présidence du Corps législatif. » Le Sénat et le Conseil d'état assistent en corps aux séances impé»riales du Corps législatif en vertu de lettres closes. »

En conséquence de ce dernier senatus-consulte, Napoléon, par un décret du 23 novembre, nomma président du Corps législatif le duc de Massa, Régnier, ex-grand juge ministre de la justice.

Le Corps législatif avait été convoqué pour le 2 décembre par un décret daté de Gotha, le 25 octobre précédent. Un autre décret daté des Tuileries, le 29 novembre, remit l'ouverture de la session au 19 décembre.

DISCOURS prononcé par l'empereur à l'ouverture de la session, le dimanche 19 décembre 1815.

« Sénateurs, conseillers d'état, députés des départemens au Corps législatif, d'éclatantes victoires ont illustré les armes françaises dans cette campagne; des défections sans exemple ont rendu ces victoires inutiles: tout a tourné contre nous. La France même serait en danger sans l'énergie et l'union des Français.

» Dans ces grandes circonstances, ma première pensée a été de vous appeler près de moi. Mon cœur a besoin de la présence et de l'affection de mes sujets.

» Je n'ai jamais été séduit par la prospérité. L'adversité me trouverait au-dessus de ses atteintes.

» J'ai plusieurs fois donné la paix aux nations lorsqu'elles avaient tout perdu. D'une part de mes conquêtes j'ai élevé des trônes pour des rois qui m'ont abandonné.

» J'avais conçu et exécuté de grands desseins pour la prospérité et le bonheur du monde!.... Monarque et père, je sens ce que la paix ajoute à la sécurité des trônes et à celle des familles.

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