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pêche, sont robustes et courageux. Le costume des femmes se compose d'un chapeau de paille noire, d'un corset blanc, et d'une jupe courte, rouge ou bleue. On ne peut pas dire qu'elles soient jolies, mais elles sont sages et bonnes ménagères. La vie de ces Insulaires est ordinairement frugale, et leur commerce se réduit à peu de chose. L'île renferme deux villes : PortoFerrajo et Porto-Longone, et quelques bourgades et villages.

Quelle différence de cette souveraineté si bornée, à celle dont avait joui Buonaparte composée de quarante millions d'âmes! Mais il n'était que trop vrai qu'il ne méritait ni l'une ni l'autre.

Ce ne fut que le 26 mai que le reste de la vieille Garde qui s'était associée au sort du fameux exilé, arriva à l'île d'Elbe. Elle avait traversé la France, faisant autant admirer l'excès de son attachement pour Buonaparte, que la complai sance des Puissances Alliées. Ces soldats traversèrent le Mont-Cénis, passèrent à deux lieues de Turin, et vinrent s'embarquer à Savonne. Le jour de leur arrivée dans l'île, fut un jour de fête pour les militaires et pour les habitans. Buonaparte ne tarda pas à se livrer à la sion qu'il avait d'élever des édifices, des mo

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numens, non pour faire jouir ses contemporains de plus de commodités ou d'agrémens, on se tromperait beaucoup, si on lui prêtait des intentions aussi louables; il ne voyait, par-là, qu'un moyen de plus d'illustrer son nom, et de redoubler sa gloire dans la postérité. Le monde aurait été trop heureux, s'il n'avait pas eu encore l'ambition des conquêtes!

Quoi qu'il en soit il embellit la ville capitale de ses petits états, il fit applanir et border d'arbres transportés d'Italic, des chemins dans l'île d'Elbe, renverser des rochers qui nuisaient à ses plans, élever des casernes, de vastes écuries, un palais, bâtir de jolies maisons de campagne, et former, comme par enchantement, des jardins dans des lieux autrefois arides, fertilisés par des terres fécondes apportées à grands frais. On le voyait au milieu des ouvriers, présider à leurs travaux, et les encourager par des récompenses. Il est étonnant combien d'ouvrages furent entrepris et achevés en moins de dix mois.

Etait-ce là son unique occupation? Eclairaitil son esprit par la lecture des philosophes anciens et modernes qui lui auraient donné des leçons d'humanité, tout en lui apprenant qu'un tyran est un monstre odieux, et qu'un roi ne règne que pour faire le bonheur de ses peuples? Songeait-il à écrire les Mémoires de sa vie, ainsi

qu'il l'avait promis en partant de Fontainebleau, et où la vérité, peut-être même le remords, l'aurait forcé de condamner la plupart de ses actions? Non, il était ïncapable de se conduire d'une manière si estimable; il ne songeait qu'à se rendre encore plus criminel qu'il l'avait été ; il roulait dans sa tête les projets les plus ambitieux, et mettait en œuvre de sourdes intrigues pour les effectuer un jour, sans prévoir que leur exécution était impossible, et qu'il allait courir à sa perte. Mais l'ambition et la vanité sont des guides bien dangereux.

Il commença par faire partager ses sentimens à Joachim Murat, qui régnait à Naples par la gráce de Napoléon; il lui représenta que le congrès assemblé à Vienne, ne le laisserait pas occuper paisiblement un trône que réclamait Ferdinand IV, le légitime possesseur, et que les anciennes dynasties des rois pouvaient se flatter d'obtenir la préférence, depuis que lui, Buonaparte, n'était plus en état de leur faire la guerre avec un succès assuré. Il ajouta que la conduite du congrès avait mécontenté l'Allemagne, et principalement l'Italie, en dépouillant des souverains pour favoriser l'injustice des autres, et en augmentant les forces des grands états aux dépens de ceux que recommandait seule leur faiblesse; il lui rappela ce qui venait de se passer

au sujet de la Pologne, de la Saxe, des répu bliques de Venise et de Gênes, etc. Il lui fit dire qu'il était facile de soulever l'Italie, de s'en assujétir plusieurs provinces, en la flattant de l'espoir chimérique de la liberté, de l'indépendance, ce leurre avec lequel on séduit les peuples. Il lui fit envisager qu'en combinant ses mouvemens avec la révolution qu'il allait exciter en France, ils parviendraient l'un et l'autre à s'affermir sur le trône, malgré toutes les forces que les monarques réunis au congrès pourraient mettre sur pied. C'est ainsi que la passion aveugle ceux qui prennent des illusions pour des réalités. Ces négociations étaient traitées dans le plus grand secret, et les' soeurs de Buonaparte, qui paraissaient venir dans l'île d'Elbe, pour passer quelques jours avec leur illustre frère, en étaient les principaux agens.

La conspiration ourdie en France, ne se tramait pas avec moins de précaution et de secret. Elle commença à se former dès le mois d'août 1814. Les chefs avaient joué les premiers rôles sous le gouvernement de Buonaparte; et au moyen de l'argent que savait leur faire passer le souverain de l'ile d'Elbe, qu'il avait emprunté, dit-on, des Gênois, ils se procuraient des affidés qui les servaient avec zèle, sans connaître néanmoins tous les principaux auteurs de la conspi

ration. Ils eurent la perfide adresse de faire diriger vers le midi de la France, les vieux régimens qui étaient les plus attachés à Buonaparte, sous lequel ils avaient combattu avec gloire pendant un grand nombre d'années. Ils répandaient sourdement mille faussetés tendantes à calomnier le sage gouvernement de Louis XVIII, qui se proposait, disaient-ils mystérieusement, de faire rentrer les émigrés dans leurs biens, de rétablir les dîmes, les corvées: ces mensonges passaient de bouche en bouche; et ceux qui n'approfondissent rien, qui croient tout sans la moindre preuve, preuve, les regardaient comme des vérités incontestables; quoique le roi eût souvent protesté qu'il maintiendrait l'irrévocabilité des ventes des biens nationaux, et qu'il ne changerait rien aux principales et bonnes lois faites pendant son absence.

Les chefs de la conspiration, résidant à Paris, choisirent pour leur réunion mystérieuse un des quartiers le plus isolé de la capitale; ce fut chez un riche manufacturier du faubourg SaintAntoine, que se tenaient de temps en temps leurs assemblées nocturnes. On y soupait, et les convives portaient la santé du Père la Violette, mot de ralliement qui leur servait à se reconnaître. Dans d'autres occasions, où se réunissaient plusieurs militaires, les initiés laissaient entre

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