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Saint-Cloud; ils oubliaient que c'était au nom de la république française que Buonaparte avait établi le despotisme le plus insolent dont l'espèce humaine ait jamais supporté le joug; ils oubliaient que Buonaparte avait entrepris d'étouffer tous les sentimens qui unissaient les citoyens à la patrie, d'éteindre toutes les lumières de la civilisation, de paralyser tous les moyens de l'enseignement; ils oubliaient que Buonaparte avait proscrit les idées libérales et philosophiques sous le nom d'idéologie; qu'il faisait consacrer les principes les plus destructeurs du despotisme dans des livres avoués par ses ministres; qu'il promettait la féodalité à ses sbirres, et qu'il donnait des peuples à ses satrapes; ils oubliaient que le ciel et l'enfer sont plus près de se rapprocher que les deux idées extrêmes de toute la série des idées humaines, Buonaparte et la liberté; ils oubliaient que ce doux nom de liberté, si cruellement proscrit sous le règne de fer de l'usurpateur, n'avait frappé nos oreilles après douze ans d'abattement et de désespoir, que depuis l'avènement fortuné de Louis XVIII. Eh! malheureux! qui vous parlerait de liberté si Louis XVIII n'eût rapporté la liberté avec la paix? Louis XVIII veut la liberté ; et c'est lui qui vous la donne. Le brigand qui lui a volé son trône pour quelques jours n'a pas même eu l'adresse perfide de vous tromper quelques jours encore; il n'a pas eu le talent funeste de vous ménager un regret. Vous voyez par la liberté qu'il vous offre dans sa faiblesse, et au milieu des terreurs qui l'assiègent, celle que vous devez attendre de lui si jamais la trahison pouvait parvenir à assurer son épouvantable puissance. Cet homme, qui est obligé de convenir qu'il n'exerce qu'une dictature

imposée par quelques soldats; il ose vous prescrire une constitution, et cette constitution, qui le croirait ? n'est qu'un acte additionnel à des constitutions qu'il a détruites formellement lors de l'établissement de l'Empire, après les avoir violées pendant quatre ans: et cet acte additionnel, servile copie du contrat qu'il a déchiré à la face du monde, n'est d'ailleurs qu'un cadre effronté où il est parvenu à faire entrer deux ou trois institutions féodales qui livrent la France à son indigne pairie! Les pairs de Buonaparte, grands dieux! et ils sont héréditaires! et vous les connaissez d'avance! et vous avez des enfans!

Et vous, soldats, vous avez des amis, des parens, une patrie, une mère, peut-être, et vous ne les sacrifierez point à la fatale gloire d'un étranger, qui n'est grand que par vos sacrifices, et dont la pourpre impériale s'est lentement teinte de votre sang. Vous êtes Français, soldats, et la trahison vous indigne. Une noble rougeur couvre vos fronts au nom d'Elchingen et de La Bédoyère. J'ai vu de saintes larmes rouler dans vos yeux au souvenir du Roi. Vous justifierez l'armée française devant l'histoire qui l'attend.

Disons en peu de mots quelle est la situation actuelle de la France entière à l'égard de Buonaparte: Les royalistes n'en voudront jamais; Les républicains n'en veulent plus; L'armée regrette d'en avoir voulu ;

Les buonapartistes n'osent plus avouer qu'ils en veulent.

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Louis XVIII a-t-il été imposé par l'étranger au 30 mars 1814, et la France doit-elle repousser aujourd'hui les secours de l'étranger pour secouer le joug de la tyrannie?

Par l'auteur de Buonaparte au 4 mai.

Comme de certaines choses qui sont atroces dans l'intention peuvent paraître risibles à force d'absurdité, il faut dévouer, en passant, à la dérision publique, ce paradoxe ou stupide ou impudent qui est devenu, par je ne sais quel artifice, le préjugé de beaucoup d'honnêtes gens trop crédules: Louis XVIII est un Roi imposé par l'étranger.

Remarquez cependant que les mêmes hommes qui colportent ce bas mensonge, disaient, il y a quelques mois, que l'étranger n'avait pas pensé à rétablir Louis XVIII, et qu'ils disaient alors la vérité pour la première fois. Non réellement, l'Europe ne promettait point Louis XVIII, et la France ne l'attendait plus. Elle était trop accoutumée à sa servitude, et trop avilie pour cela; cette cause si juste, si malheureuse et si touchante, n'intéressait plus qu'un petit nombre de cœurs généreusement obstinés, qui s'étaient attachés à l'infortune de leurs rois à mesure qu'elle devenait plus irrémédiable, parce que c'est le propre des âmes vertueuses de ne rien aimer autant que la vertu opprimée. Qu'arrive-t-il? je m'en rapporte aux esprits droits et sincères; cet homme, auquel il manque les qualités les

plus communes du dernier des hommés, un peu de droiture et surtout un peu de sens, cet homme attire sur le pays qu'il a soumis une guerre épouvantable, d'autant plus épouvantable, qu'elle est la guerre légitime des peuples insultés contre leur agresseur, et qu'elle a le droit affreux des représailles. Cette guerre, servie par une Providence vengeresse, dont la main ne peut se méconnaître, finit par éclater sur vous, et cependant elle ne vous anéantit point. Vous n'êtes pas contraints, comme les habitans de Moscou, à incendier vos maisons, à égorger vos filles, comme ceux de Sarragosse, pour les soustraire à la brutalité de l'ennemi, à vous nourrir de la chair humaine, de la chair encore palpitante de vos frères. L'Europe en armes arrive sous vos murailles, et vous exhorte à être heureux. Je prends Dieu à témoin qu'elle ne vous demanda pas autre chose! Que dites-vous alors, et bien librement sans doute, il vous en souvient? Aucune pensée ne fut gênée, aucune affection ne fut froissée, aucune opinion ne fut combattue par une autre force que celle de la raison et du sentiment. Vous criâtes vive le Roi, comme vous auriez crié vive l'Empereur; et ce magnanime Alexandre vous répondit: Ce que vous voudrez, même NapoLéon; car il ménageait jusqu'à vos penchans les plus inexplicables et les plus honteux. Vous répétiez vive le Roi, et vous le répétiez avec un élan, avec une ivresse qui se communiquaient à cette grande famille, étrangère sans doute, mais protectrice, dont vous receviez la liberté. Ce ne sont pas eux qui ont ramené le Roi, vous le savez trop bien; mais, libres pour la première fois, vous avez demandé le Roi quand vous avez pu le rappeler, et vous l'avez demandé à ceux qui pouvaiens

vous le rendre. Quand Napoléon laisse dire que Louis XVIII est un roi imposé par l'étranger, Napoléon se joue de gaieté de cœur de la bassesse des libellistes qui le servent, et de la crédulité d'un peuple qu'il méprise. Napoléon sait bien que c'est Napoléon qui amena les étrangers en France, et que c'est le peuple, représenté librement par tous les corps légitimes et constitutionnels, qui ramena le Roi. Napoléon sait bien qu'on ne fut point obligé de convoquer d'autres autorités que ses autorités, de créer d'autres maréchaux que ses maréchaux, de dissoudre et de renouveler son Sénat pour prononcer sa déchéance et pour provoquer son abdication. Napoléon sait bien, puisqu'il en est convenu, que son ambition était devenue odieuse à la Francc comme à toutes les nations, et qu'on n'attendait partout que la protection de quelques baïonnettes pour secouer le joug glorieusement insolent dont il accablait le monde. Napoléon ne croyait pas qu'on l'aimât, et pouvait-il le croire? Ah! je m'en rapporte à lui, à ceux qui l'entourent, à ceux qui le connaissent, à ceux qui l'admirent sans l'aimer, à ceux qui croient l'aimer parce qu'ils l'admirent, à la nation tout entière ! Nous avions besoin d'être libres de pensée, et nous l'avons été par la conquête! et nous avons proclamé ce que nous sentions, et nous avons obtenu ce que nous voulions, sous les drapeaux de ces hommes du Nord, avec une plénitude de liberté dont nous n'avions jamais joui sous les aigles de cet homme de la Méditerranée ; et nous avons rejeté ce Gouvernement qui nous accablait depuis quinze ans et nous avons imploré de tous nos vœux le seul Gouvernement qui pût nous sauver de Buonaparte et des Jacobins,

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