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régimens entiers jetaient leurs armes. En un mot, toute l'armée fut désorganisée, et se dispersa. Ils laissèrent plus de trente mille hommes sur le champ de bataille, sans compter les blessés. La plus grande partie de la garde impériale resta au nombre des morts: leurs prisonniers montaient au moins à vingt mille. Qui ne frémirait d'indignation en apprenant que cetaffreux désastre fut l'ouvrage de Buonaparte, de cet homme rempli d'un amour-propre si funeste, et que ses partisans ne cessaient de représenter comme le plus habile général qui ait jamais paru dans le monde !

Dans la chaleur de cette bataille, un des aidesde-camp du général duc de Wellington, le colonel sir Alexandre Gordon, ayant représenté à ce général qu'il s'exposait beaucoup en restant plus long-temps aussi avancé sous le feu terrible que faisait l'ennemi : « J'ai besoin, lui répondit mylord-duc, d'observer encore une fois les positions de l'ennemi; » et il continua ses observations, avec son télescope, pendant deux ou trois minutes. Au moment qu'il détournait son cheval pour se retirer, un peu en arrière, le colonel Gordon qui l'accompagnait, est tué à ses côtés, et un autre aide-de-camp, le colonel Canning, qui avait mis la main sur la selle du duc

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pour recevoir ses ordres, eut la main fracassée d'une balle au moment qu'il la retirait.

Les chefs s'exposaient comme les derniers des soldats, et se trouvaient dans la mêlée avec les troupes françaises: le feld-maréchal prince Blücher fut pendant quelques momens au pouvoir des troupes de Buonaparte.

Le prince royal d'Orange emporté par son ardeur, se trouva aussi entre les mains des Français. Le 7°. bataillon s'empressa de courir à son secours et le délivra. Le prince arracha de sa boutonnière la décoration qu'il portait, et la jeta au milieu du bataillon, en disant: « Mes enfans, vous l'avez tous méritée.» Les soldats attachèrent aussi, tôt cette décoration à leur drapeau, en criant: Vive le Prince héréditaire! et jurèrent de défendre jusqu'à la mort cette marque d'honneur.

Le duc régnant de Brunswick,frère de la princesse de Galle, fut tué dans la bataille du 16, à la tête de son corps.

Les Anglais perdirent beaucoup de monde dans les deux actions qui précédèrent la bataille de Mont-Saint-Jean et dans celle-ci leur perte fut immense; on l'a fait monter à quinze mille hommes, c'est-à-dire au quart de leur armée. Celle des Prussiens ne fut guère moins considérable. Le nombre des officiers anglais et hano.

vriens tués, blessés ou égarés, monta à 635. Leur 44. régiment, fut presqu'entièrement détruit. Il était fort de six cents hommes au commencement de l'action, et il sortit du champ de bataille avec un seul adjudant, un lieutenant, et à-peu-près cinquante hommes.

Le commandement des débris du 95°. fut dévolu au volontaire Keller, tous les officiers de ce régiment ayant été tués ou blessés.

Les généraux, les officiers et les simples soldats qui s'étaient distingués à cette mémorable bataille reçurent de leurs souverains des récompenses dignes de leur courage. L'empereur de Russie fit remettre au lord-duc de Wellington et au feld-maréchal prince Blücher, l'ordre de Sainte-Anne de première classe, accompagné d'un cadeau de la valeur d'un million de francs.

La nation anglaise ne fut pas moins magnifique à l'égard du lord-duc de Wellington et des militaires qui se distinguèrent sous ce généralissime: elle lui fit présent de 200,000 livres sterling, votées par le parlement; et le chancelier de l'échiquier proposa, dans la séance du parlement, du 23 juin, d'accorder à l'armée qui servit sous les ordres du duc de Wellington, en Portugal, en Espagne et en France, dans les campagnes de 1807 à 1814, la somme de 800,000

livres sterling (19,200,000 francs), pour les pri ses qu'elle a faites dans douze affaires générales et cinq grands sièges.

Non moins généreux, et doué d'une vertu magnanime, un Français qui était alors à Gand, envoya 400,000 francs à Bruxelles pour le soulagement des soldats français blessés à la bataille de Mont-Saint-Jean. On n'eut pas de peine à percer le voile dont voulait s'envelopper ce bienfaiteur anonyme; on reconnut avec la plus vive reconnaissance la main charitable et paternelle de Louis XVIII, qui poussait la bonté jusqu'à venir au secours de ces sujets rebelles, qui venaient même de combattre pour l'exclure du trône.

Ce monarque, qui ne peut être apprécié par des cœurs pervers, avait fait parvenir, le 30 mai, à lord Wellington, une somme de 500,000 francs, avec prière de mettre à l'ordre du jour dans son armée que chaque soldat des troupes alliées qui ramènerait un Français prisonnier, toucherait à l'instant une pièce de vingt francs.

Soldats ingrats, apprenez que ce bon prince, lorsque vous reveniez de Russie, accablés de souffrances et de misère, daigna envoyer audevant de vous jusqu'en Prusse, M. le maréchalde-camp Proteau, chargé de vous secourir et

'de vous consoler. Je vous le demande, militaires français, comment avez-vous reconnu les procédés généreux de votre roi?

Après la journée de Mont-Saint-Jean, le feldmaréchal Blücher adressa à ses soldats une proclamation, dont la plupart des journaux n'ont donné qu'un extrait, en voici le texte entier :

<< Braves officiers et soldats de l'armée du Bas-Rhin, vous avez fait de grandes choses. Brave compagnons d'armes, vous avez livré deux batailles en trois jours: la première a été malheureuse, et cependant votre courage n'a point été abattu. Vous aviez à lutter contre des privations, mais vous les avez supportées avec constance. Inébranlables dans les revers, après la perte d'une bataille sanglante, vous avez marché avec fermeté pour en livrer une nouvelle, vous reposant sur le Dieu des batailles et pleins de confiance dans vos chefs, ainsi que de persévérance dans vos efforts contre des ennemis présomptueux, parjures et enivrés de leur victoire. C'est dans ces sentimens que vous vous êtes mis en marche pour soutenir les braves Anglais qui soutenaient la lutte la plus pénible avec une fermeté sans exemple. Mais l'heure qui devait décider cette grande querelle a sonné, et a fait connaître qui devait donner la loi. Le destin balançait encore, quand vous avez ap

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