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l'armée prussienne en fit un sur sa gauche pour couvrir Namur. Mais ces deux armées étaient liées par une position formidable, cachée par un rideau, et hérissée de canons: circonstance ignorée par Buonaparte, qui s'avisa de croire et d'annoncer que les deux armées étaient séparées.

Le 18, sans avoir fait reconnaître la position intermédiaire qu'il croyait dégarnie, il place son armée entière commandée par les généraux d'Erlon, Reille, Vandamme et Girard, devant l'espace qui semblait isoler les deux armées alliées; la fait avancer sans aucune précaution, et tout-à-coup les alliées démasquent plusieurs centaines de pièces de canon chargées à mitraille qui tirent presque à bout portant; la cavalerie anglaise et des corps d'infanterie commandés par le général Blücher, enveloppent par les flancs et les derrières les troupes de Buonaparte. Le général prussien Bulow, dont Buonaparte s'était obstiné à révoquer l'existence en doute, tourna, vers le soir, l'aîle droite de l'armée française. En peu d'heures, tous les corps réunis de l'armée dite française, presque toute la garde impériale comprise, furent massacrés ou faits prisonniers. On cite le dévouement sublime de la garde impériale: A l'instant où le feu d'une batterie ennemie venait de faire faire un pas rétrogade à une partie de nos troupes,

la garde impériale placée au centre, qui jusqu'alors était accourue au pas de charge, s'arrêta un moment, mit l'arme au bras et s'avança sous le feu de l'ennemi. Une décharge épouvantable dirigée contre ces braves, en mitrailla la moitié, l'autre continua sa marche. Les généraux anglais pénétrés d'admiration pour la valeur de ces guerriers, députèrent vers eux pour les engager à se rendre, protestant qu'ils les regardaient comme les premiers soldats de l'Europe. Le général Cambronne qui les commandait, répondit par ces mots: La garde impériale meurt et ne se rend pas. La garde impériale cessa bientôt d'exister. Nos regrets seraient plus vifs, si elle avait combattu pour une meilleure cause.

Lorsqu'au bout de plusieurs jours on procéda à couvrir de terre les milliers de cadavres dont était couvert le champ de bataille de MontSaint-Jean, on trouva au milieu des morts une grande quantité de blessés, qui, de faim ou de rage, avaient mordu des cadavres d'hommes ou de chevaux: « Quand je dis de Quand je dis de rage, dit l'auteur d'une lettre écrite de Mons, c'est qu'en effet il y avait des blessés mourans qui criaient encore vive l'Empereur! lorsqu'on les ramassait. N'est-ce pas comme s'ils avaient crié: Vive l'homme qui nous a conduits dans cette bou

cherie! qui nous a laissés derrière lui, sans s'in quiéter si nous étions morts ou mourans ; vive l'homme sans pitié, sans entrailles, qui nous a laissés expirer lentement sur le champ de bataille, sans nous recommander aux soins ni à l'humanité de personne, tandis que les blessés

des autres armées ont été recueillis avec tant de précaution et de sollicitude! »

Buonaparte, suivant sa couture, voyant tout perdu, et la peur lui grossissant encore le désastre, se hâta de fuir, en se jetant du côté de Philippeville, d'où il se mit en chemin pour Paris; sans s'informer davantage des malheureux Français que son ineptie venait de sacrifier. Il rentra dans la capitale dans la nuit du 20 au 21 juin, fidèle à son usage de s'envelopper des ombres de la nuit dans des momens critiques.

Il avait fui si précipitamment, qu'il abandonna ses propres équipages. Lorsque les Anglais ou les Prussiens s'en saisirent, la voiture dont il se servait ordinairement tomba entre leurs mains; la portière était ouverte, comme si elle venait d'être abandonnée à l'instant; on s'empara du portefeuille de cet homme abhorré, dont les papiers ont été imprimés à Bruxelles: on prit aussi d'autres voitures, dans lesquelles on trouva une grande quantité d'argent et d'or monnoyé, outre l'argenterie, la vaisselle plate,

et d'autres objets de valeur. M. le lieutenant de Pless, Prussien, eut en partage l'écrin, fruit de la victoire du 15°. régiment d'infanterie. On trouva encore dans la voiture de l'usurpateur, un superbe habit militaire, ainsi que plusieurs cartes, plans et livres. On a remarqué que c'était pour la cinquième fois qu'il avait abandonné ses armées. (1) On assure que cette dernière fois, mortifié dans son orgueil et déchiré de désespoir, il resta quarante heures sans manger et sans parler.

La victoire de Marengo le fit parvenir au trône des Français, et la perte de la bataille de Mont-Saint-Jean le fit rentrer dans la poussière.

Mais tout était-il désespéré, au point qu'il fût dans la nécessité cruelle de fuir jusqu'à Paris? Ne devait-il pas plutôt chercher à rallier son armée, et s'arrêter à Avesnes ou à Laon, pour donner le temps à quelques corps de le rejoindre. Il pouvait encore se voir à la tête de forces considérables.

Une terreur panique s'étendit du chefsuprême aux soldats; on se précipita dans le plus grand désordre sur la ligne de communication; les soldats, les canonniers se pressaient pour y arri

(1) En Egypte, en Espagne, à Moscou, à Leipsic, à Mont-Saint-Jean.

ver; la vieille garde qui était en réserve, en fut assaillie, et fut elle-même entraînée.

Dans un instant, l'armée ne fut plus qu'une masse confuse, toutes les armes étaient mêlées, et il devenait impossible de rallier un seul corps. Par un effet de l'imprévoyance de ce grand général, on n'avait fait aucune disposition en cas de revers; il n'y avait point de lieu disposé pour une retraite. Les Anglais et les Prussiens qui s'aperçurent de cette étonnante confusion, firent déboucher des colonnes de cavalerie, le désordre augmenta, l'obscurité de la nuit l'obscurité de la nuit augmenta le désordre. Les escadrons mêmes de service, rangés à côté de Buonaparte, furent culbutés et désorganisés par ces flots tumultueux; et il n'y eut plus d'autre chose à faire que de suivre le torrent. Les parcs de réserve, les bagages qui n'avaient point repassé la Sambre, et tout ce qui était sur le champ de bataille, resta au pouvoir du vainqueur. Les voitures du quartiergénéral étaient restées dans leur position ordinaire, aucun mouvement rétrogade n'ayant été jugé nécessaire. Dans le cours de la nuit, elles tombèrent entre les mains des vainqueurs.

Les Français combattirent avec une bravoure et uné fureur dont il y a peu d'exemples; mais lorsqu'une fois la déroute eut commencée, elle fut la plus complète qu'on ait jamais vue. Des

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