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avons vu en Allemagne. Quarante mille de ces infortunés sont arrivés en quinze jours à Francfort, venant de Leipsick, sans avoir encore été pansés, sans avoir avec eux un seul officier de santé. La satisfaction de revoir leur patrie eût suffi pour opérer la guérison d'un grand nombe d'entre eux; mais d'un côté Buonaparte qui, dans ses bulletins périodiques, annonçait constamment des victoires, ne voulait pas qu'on fût instruit dans l'intérieur du véritable état des choses, ni que l'on connût le nombre des victimes de son ambition. De l'autre, il entrait dans le systême de rapacité du Gouvernement de se décharger sur l'Allemagne des frais immenses de l'entretien des hôpitaux : ainsi l'on retenait ces infortunés à la porte de la France, à huit lieues de leur patrie, sans leur en permettre l'entrée on a même fait plus, on a fait rétrograder des bateaux de blessés qu'on avait conduits de Francfort à Mayence, et on a menacé de tirer sur ceux qui se présenteraient. Qu'en est-il résulté ? ces malheureux, faute de local, étaient entassés dans des hôpitaux, qu'il fallait souvent construire pour les recevoir; leur grand nombre, l'état de putréfaction de leurs blessures et le chagrin d'être sur un sol étranger, en moissonnèrent une grande partie; et, pour prix des soins qu'on leur donnait, ils

causèrent en Allemagne une épidémie qui enleva beaucoup de monde.

Pendant ce temps, continue le journaliste de Francfort, leur bourreau ne daigna pas même faire témoigner sa reconnaissance aux médecins et chirurgiens du pays, qui tous les jours exposaient leur vie pour le soulagement de ses sujets, et dont plusieurs ont péri victimes de leur zèle !

D'après les listes de logemens militaires de Dresde', en comptant chaque homme pour un jour, on a logé dans cette ville, jusqu'à la fin de juillet 1814, neuf millions de soldats.

Depuis le 19 novembre 1806, époque de l'entrée des Français dans Hambourg, jusqu'au 20 janvier 1815, les pertes en numéraire qu'a faites cette ville, surchargée de garnison étrangère, sont évaluées à six cents millions de francs.

Il résulte d'un calcul fait avec exactitude, que, du 27 nivose an 13, au mois d'avril 1813, on a levé en France, ostensiblement, plus d'un million six cent mille conscrits.

Les journaux allemands rapportent l'aperçu suivant sur la perte d'hommes qu'ont causée les guerres de Buonaparte depuis 1802. 1°. La guerre de Saint-Domingue de 1801 à 1806, a enlevé, soldats et matelots français, soixante

mille hommes; habitans blancs de l'île, au moins cinquante mille hommes; nègres, cinquante mille. 2°. La guerre maritime d'Angleterre de 1802 à 1814 a coûté aux deux parties et à leurs alliés au moins deux cent mille hommes. 3o. L'invasion en Egypte a fait périr plus de soixante mille hommes. 4°. La guerre de l'hiver de 1805 à 1806, qui fut courte, mais très-sanglante, enleva aux puissances belligérantes cent cinquante mille hommes. 5°. Celle de Calabre, de 1805 à 1807, cinq cent mille hommes. 6°. La guerre du Nord, de 1806 à 1807, trois cent mille hommes. 7o. La guerre d'Espagne, la plus meurtrière de toutes, de 1807 à 1813, deux cent mille quatre cents hommes. (Ce n'est pas porter trop haut la perte immense que cette même guerre a occasionnée tant aux Français et à leurs alliés, qu'aux Anglais, aux Espagnols, aux Portugais, soit dans les combats et les siéges, soit par les maladies contagieuses, les assassinats et autres désastres, que de l'évaluer à deux millions cent mille hommes). 8°. La guerre d'Allemagne et de Pologne, en 1809, trois cent mille hommes. 9°. La campagne de 1812, cinq cent mille Français et alliés, trois cent mille Russes, dans les combats, les hôpitaux, les villes et les villages brûlés; deux cent mille Polonais, Allemands,

Français, victimes des maladies contagieuses résultant de la mauvaise nourriture et de la faim. 10°. La campagne de 1813, quatre cent cinquante mille hommes: total, cinq millions huit cent soixante mille hommes: ce calcul ne peut embrasser un grand nombre de morts prématurées causées par les suites de la guerre, l'effroi, le désespoir, etc.

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Tant de malheurs, tant de carnage devaient enfin ouvrir les yeux de l'Europe, et il accéléra lui-même le réveil des peuples et des souverains il attira dans un piège perfide le roi d'Espagne et son auguste famille, et les retint prisonniers en France, tandis qu'il s'efforçait de s'emparer de leurs Etats; il envahit l'Italie, en chassa le souverain pontife, pour prix de la couronne impériale qu'il était venu lui mettre sur la tête à Paris; il le priva même de la liberté, et nous avons vu plus haut qu'il poussa l'outrage jusqu'à le frapper. L'expédition insensée de la Russie, les horreurs qu'il y commit, la destruction de presque toute son armée, qui périt de froid et de faim dans les déserts de ces contrées immenses, commença la ruine de ce colosse élevé sur des monceaux de cendres et de cadavres; sa campagne de 1813, offensive en Saxe au lieu d'être défensive sur le Rhin, acheva de l'ébranler, et mit un terme à sa fortune

comme à sa réputation militaire, ainsi que l'observe M. Daniel de Pernay, ancien capitaine de cavalerie. Tous les rois sentirent qu'ils devaient se réunir, pour achever de les délivrer d'un fléau, que le ciel semblait avoir suscité dans sa colère.

Les bons Français formaient des vœux ardens pour accélérer la délivrance de leur patrie. Les départemens de l'Ouest et de la Vendée, habités par ce peuple généreux qui n'avait courbé la tête qu'en frémissant sous le joug de fer de la tyrannie, n'attendaient que le signal pour courir aux armes et arborer l'étendard des lys.

Depuis long-temps, écrivait-on d'Angers, le 13 avril 1814, nous supportions avec impatience le joug de Buonaparte. Sa tyrannie avait lassé tout ce que nous avions de résignation. Les armes étaient prêtes; cinquante mille bras étaient sur le point de se lever. Les officiers étaient nommés; l'heure de l'affranchissement allait sonner, lorsque nous avons appris que la Capitale venait de recevoir dans son sein un des descendans de Saint-Louis et de Henri IV. A cette nouvelle, toute notre ville a été dans l'ivresse de la joie. Ainsi vive le Roi! Vivent les Descendans de Henri IV! Vivent les augustes Souverains auteurs de tant de bienfaits! »

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