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plus saint des devoirs, celui de la fidélité envers la patrie. Nous avons été les premiers trompés par le prestige de sa gloire. Celui qui se disait le père des soldats, a su, pendant long-temps, captiver son attachement, en partageant ses travaux, ses dangers, ses privations, et en affectant cet adroit mélange de grandeur et de popularité qui flatte le coeur du soldat et donne une nouvelle impulsion à son courage. Mais en se disant le père de ses troupes, il n'en était effectivement que le bourreau. Il s'est servi du puissant motif de l'honneur, pour mettre en horreur le nom français.

<<< Si le cœur de nos vieux soldats bat encore aux noms si beaux d'Austerlitz, d'Iéna et de Friedland, c'est, n'en doutez pas, par le regret que de si nobles faits n'aient pas contribué au bonheur de la patrie autant qu'à son illustration. Cette gloire est le fruit de notre vaillance; mais elle ne pourra jamais nous rattacher à la destinée de celui qui en a fait un si dangereux usage. La gloire n'est véritable et solide que quand elle a un but utile, grand et généreux. Toute autre gloire n'est que forfanterie, cupidité militaire, et ne peut s'allier avec des sentimens français.

<«< Nous avions tous voué une espèce de culte à celui qui nous avait mené au combat;

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mais trompés par lui, abandonnés à des hasards plus forts que le courage même, épuisés par un tyran qui regardait les hommes comme une matière première de son ambition, nous avons dû nous détacher de lui, nos liens sont rompus......

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Citoyens et guerriers, n'ayons tous qu'une seule volonté, tous qu'un seul et même but, celui du bonheur et du repos de la patrie. Que les soldats aient l'âme des citoyens, et les citoyens l'âme des soldats. Nos causes sont pareilles, nos opinions doivent l'être. L'esprit de séparation entre le civil et le militaire ne peut qu'être funeste à l'Etat. Il n'y a qu'une seule patrie, qu'il n'y ait pour l'aimer qu'une seule classe de Français!

« Nous avons un bon roi, un roi sage et paternel; nous avons une constitution, fruit de ses lumières et de l'expérience des révolutions. Jurons tous de la maintenir, de la suivre, de défendre ce palladium de la félicité publique.

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Peut-être que si cette protestation de ce brave militaire était parvenue à propos à Bordeaux, elle 'eût éclairé les troupes de ligne qui étaient en garnison dans cette ville. Si le fait n'était attesté de manière à ne pouvoir le révoquer en doute, on se refuserait à ajouter

à

foi à ce qui s'y est passé pendant le séjour de S. A. R. madame la duchesse d'Angoulême. Cette princesse si belle, si intéressante, fille de Louis XVI, y déploya un caractère héroïque, dont la douceur angélique de son caractère ne la faisait pas présumer capable. Voyant l'esprit de révolte, en faveur de Buonaparte, gagner la garnison d'une ville toute dévouée au roi, son oncle, elle la passa en revue, en parcourant les rangs à cheval, souriant à ces vieux guerriers, et s'efforçant de leur faire entendre la voix de l'honneur. Mais leur air froid et leur silence n'apprirent que trop cette princesse leur funeste résolution. Elle se rendit au château Trompette, où était caserné le 8°. léger, et les voyant tous sous les armes, elle leur demanda s'ils voulaient passer la rivière pour attaquer le général Clausel. Renouvelant la scène qui venait d'avoir lieu à Lyon entre Mgr. le comte d'Artois et un autre régiment, mais la rendant plus extraordinaire à l'égard d'une princesse faite pour toucher tous les cœurs, ils répondirent qu'ils ne voulaient pas marcher. Si d'autres troupes, ajouta madame la duchesse d'Angoulême, attaquent le général Clausel, restercz-vous neutres? ils répliquèrent, brusquement, non. La princesse désespéréc ne put retenir ses larmes, et s'écria:

« Vous avez donc dessein de me trahir et de me livrer à mes ennemis? ils répondirent, toujours du même ton, non; mais nous ne voulons pas la guerre civile, et nous vous demandons que vous quittiez la France. » Tous les de la garnison imitèrent cette

autres corps

'étonnante conduite.

Des enfans donnèrent une leçon, dont il serait à souhaiter qu'eussent profité bien des grandes personnes, qui se croyaient très-raisonnables, et qui l'étaient très-peu. Dans une des communes rurales de l'Entre-deux-Mers, de jeunes enfans environnèrent la voiture de LL. AA. RR. L'un d'eux chargé de porter la parole, s'exprima en ces termes : « Monsei gneur et Madame, on nous avait fait un compliment, mais je l'ai oublié. Voici celui que nous avons fait nous-mêmes: Nous jurons d'être encore meilleurs Français que nos pères. »

Madame la duchesse d'Angoulême, avant de quitter Bordeaux, le 2 avril, adressa à ses habitans cette proclamation : « Braves Bordelais, votre fidélité n'est connue, votre dévouement sans bornes ne vous laisse entrevoir aueun danger, mais mon attachement pour vous m'ordonne de les prévenir. Mon séjour plus long-temps prolongé dans votre ville pourrait

aggraver votre position et faire peser sur vous le poids de la vengeance. Je n'ai pas le courage de voir des Français malheureux ; je vous quitte, braves Bordelais, pénétrée des sentimens que vous m'avez fait exprimer; je vous donne l'assurance qu'ils seront fidèlement transmis au roi. Bientôt, avec l'aide de Dieu, et dans des circonstances plus heureuses, je vous en témoignerai ma reconnaissance et celle du prince que vous chérissez. »

Signé, MARIE-THÉRÈSE-CHARLOTTE. Cette princesse très-mécontente de l'infidélité et de la dureté des troupes, s'embarqua, le 2 avril, dans le petit port de Pouillac, sur une corvette anglaise, qui fit voile pour la Grande-Bretagne.

Pendant son séjour en Angleterre, madame la duchesse d'Angoulême fit une proclamation aux Français, le 26 juin, rapportée dans les journaux anglais; elle est ainsi conçue: « Si la voix de votre roi légitime n'a pas encore pénétré jusqu'à vous, je vais aujourd'hui vous la faire entendre. C'est en son nom, c'est en vertu des pouvoirs qu'il m'a confiés que je m'adresse à vous. Français fidèles, joignez-vous à la fille de vos rois; elle ne vous apporte point la guerre; elle ne vous parle que le langage de la paix et de l'union. Elle gémit des calamités

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