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l'Isère une proclamation, où il représentait, suivant sa coutume, la France très malheureuse sous le Gouvernement de Louis XVIII, et l'appelant à grands cris pour changer sa destinée.

Comme dans sa marche de Grenoble à Lyon, sa voiture allant toujours au pas, était environnée d'une foule de paysans criant des chansons qui exprimaient leur sot enthousiasme, le cidevant Empereur, extrêmement flatté, leur adressa ces paroles: «< Ah! je retrouve ici les sentimens qui, il y a vingt ans, me firent saluer la France du nom de la grande Nation. Oui, vous êtes encore la grande Nation, et vous le serez toujours. » La flatterie était aussi un de ses moyens.

"

Ce ne fut que le 6 mars, dans l'après dîner, qu'un bruit sourd annonça les premières nouvelles que Buonaparte était débarqué sur les côtes de Provence. Cette nouvelle parut quelque temps douteuse, à cause des croiseurs répandus sur les parages entre l'île d'Elbe et la France. Lorsqu'on en eut acquis la plus grande certitude, par les lettres qui arrivèrent en foule, on se rassura en songeant au petit nombre de troupes qui l'accompagnait, et personne ne douta qu'on apprendrait bientôt son entière défaite, sa prise ou sa mort. On était loin de s'attendre à la défection des généraux et des soldats, accoutumé que l'on était à regarder le militaire français comme

incapable de manquer jamais à l'honneur. La Cour de France prit les mesures les plus sages et les plus fermes pour s'opposer à l'invasion. Monsieur, comte d'Artois, partit en poste pour se rendre à Lyon, dans la nuit du 5 au 6 mars, avec M. le duc d'Orléans et le comte de Damas. Le duc de Berri se vit obligé de rester auprès du roi. M. le Duc d'Angoulême et madame la duchesse son auguste épouse étaient partis pour Bordeaux depuis quelques jours, et ils y furent reçus avec enthousiasme.

Le 6, une ordonnance du roi fut placardée dans tout Paris, insérée le même jour dans le Moniteur et dans les autres journaux. En voici le texte. « L'article XII de la Charte constitutionnelle nous charge spécialement de faire les réglemens et ordonnances nécessaires pour la sûreté de l'Etat; elle serait essentiellement compromise, si nous ne prenions pas des mesures promptes pour réprimer l'entreprise qui vient d'être formée sur un des points de notre royaume, et arrêter l'effet des complots et attentats tendant à exciter la guerre civile et détruire le gouver

nement.

« A ces causes,....... nous avons ordonné... ce qui suit:

« ART. 1. Napoléon Buonaparte est déclaré traître et rebelle pour s'être introduit à main ar

mée dans le département du Var. Il est enjoint à tous les Gouverneurs, commandans de la force armée, gardes nationales, autorités civiles, et même aux simples citoyens, de lui courir sus, de l'arrêter et de le traduire incontinent devant un conseil de guerre, qui, après avoir reconnu l'identité, provoquera contre lui l'application des peines prononcées par loi.

la

II. Seront punis des mêmes peines et comme coupables des mêmes crimes:

« Les militaires et les employés de tout grade qui auraient accompagné ou suivi ledit Buonaparte dans son invasion du territoire. français, à moins que dans le délai de huit jours, à compter de la publication de la présente ordonnance, ils ne viennent faire leur soumission entre les mains de nos gouverneurs, commandans de divisions militaires, généraux ou administrations civiles.

« III. Seront pareillement poursuivis et punis comme fauteurs et complices de rébellion et d'attentats tendant à changer la forme du Gouvernement et provoquer la guerre civile, tous administrateurs civils et militaires, chefs et employés dans lesdites administrations, payeurs et percepteurs de deniers publics, même les simples citoyens qui prêteraient di

rectement ou indirectement aide et assistance

à Buonaparte.

<< IV. Seront punis des mêmes peines, conformément à l'article 102 du Code pénal, ceux qui, par des discours tenus dans des lieux ou réunions publics, par des placards affichés ou par des écrits imprimés, auraient pris part ou engagé les citoyens à prendre part à la révolte, ou à s'abstenir de la repousser...... >>

Signé, LOUIS.

A la nouvelle alarmante qui menaçait la tranquillité publique et le repos du monde, tous les ambassadeurs des puissances étrangères, accrédités à la cour de France, se rendirent auprès de S. M., ayant à leur tête M. le baron de Saint-Vincent, leur doyen, et ils témoignèrent au roi toute la part qu'ils prenaient à l'événement inattendu qui trouble la tranquillité du royaume. Ils réclamèrent l'honneur d'être auprès de sa personne dans toutes les occasions où ils pourraient, en l'environnant, donner une preuve de leur profond respect pour un roi qui a déjà pénétré l'Europe de ce sentiment, et par ses malheurs, et par ses hautes vertus, et par un généreux exercice du pouvoir, si bien récompensé par l'amour

de son peuple. Ils finirent par lui offrir tous les secours que S. M. désirerait; les ambassadeurs d'Angleterre et de Prusse supplièrent S. M. d'accepter, en attendant une armée plus considérable, cent mille hommes stationnés dans la Belgique. Mais Louis, qui avait toute confiance dans le peuple français, et qui était loin de soupçonner les troupes de manquer à leur serment, remercia les ministres des puissances alliées des offres généreuses qu'ils lui avaient faites au nom de leurs souverains. Que ce bon roi aurait été charmé d'être toujours dans le cas de ne les point accepter!

Le corps municipal de la ville de Paris, assemblé extraordinairement, le 7 mars, arrêta à l'unanimité cette adresse, rédigée par l'excellent patriote M. Bellart, ancien avocat:

SIRE,

« Depuis le retour de Votre Majesté, la France commençait à respirer; la liberté publique et particulière assurée par une charte solennelle, le crédit renaissant, nos ports rouverts au commerce, les bras rendus à l'agriculture, l'harmonic établie entre tous les corps de l'Etat, la certitude de la paix donnée à l'Europe, tout garantissait à notre pays le bonheur qu'il n'a connu que sous vos ancêtres.

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