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velées partout, les mers rendues libres, et notre médiation pacifique s'exerçant dans toutes les affaires de l'Europe telle était alors la position diplomatique de la France, position de protection, d'influence et de modération.

La révolution de 1789 détruisit tout cela; mais, en compensation, elle donna à la France ses limites naturelles.

DEUXIÈME PARTIE.

CHAPITRE PREMIER.

CAMPAGNE DE 1792.

L'idée des frontières naturelles n'avait été pendant huit siècles que l'idée politique des rois, la pensée traditionnelle de quelques hommes d'État, poursuivie tantôt avec énergie, tantôt avec défaillance, idée puissante et invétérée, mais réalisée avec tant de lenteur qu'elle semblait condamnée à rester éternellement à l'état de théorie. Avec la révolution de 1789, avec la nécessité de vaincre la coalition de presque tous les États de l'Europe, cette idée toute gauloise devient tout à coup et sans préparation l'idée de la foule et la pensée nationale; elle s'identifie avec l'idée de l'indépen

dance et du salut du pays; elle est poursuivie avec une rude énergie, une conviction brutale, sans être arrêtée par des intérêts et des traditions dynastiques, sans souci des errements, des lenteurs, des entraves de la vieille diplomatie. « Rester sur la défensive partout où la France a ses limites naturelles, prendre l'offensive partout où elle ne les a pas, tel est le résumé des instructions données par la Convention aux généraux de la République.

Ce plan fut primitivement l'œuvre d'un homme qui, avec des talents de premier ordre, avait une ambition peu scrupuleuse, des opinions variant avec les événements, et qui, après avoir sauvė la France, a fini par la trahir et par mourir dans l'exil. Cet homme était Dumouriez, alors ministre des affaires étrangères. Nourri des idées de Vauban, il avait fait une étude approfondie de nos frontières, mais il ne devait s'en servir que dans l'intérêt de ses passions, et si, en 1792, il disait dans le conseil de Louis XVI: « la France ne peut avoir de sécurité durable qu'avec la barrière du Rhin,» il écrivait aux coalisés en 1797 : « la fameuse barrière du Rhin n'est bonne que sur la carte. »

Quoi qu'il en soit, dès que la guerre eut été déclarée, il exposa son plan et proposa de faire entrer

sur-le-champ l'armée du Nord dans les Pays-Bas, tout disposés à accueillir l'invasion française; en même temps l'armée du Rhin aurait fermé la porte de Bâle en occupant le canton de Porentruy, et elle aurait pénétré dans les Électorats ecclésiastiques, où elle devait trouver tant de sympathies; enfin, l'armée des Alpes devait envahir, pour ne plus les quitter, la Savoie et le comté de Nice. Ce plan, communiqué aux grands seigneurs qui étaient encore à la tête de l'armée, Lafayette, Biron, Custine, Montesquiou, fut adopté par eux avec chaleur : il était complétement dans les idées de l'ancienne monarchie, et fut principalement approuvé par l'un de ses plus illustres serviteurs, le vieux maréchal de Beauvau, qui eut une trèsgrande part aux opérations militaires de cette époque. Mais ce plan, mis d'abord à exécution sur la frontière du Nord, hâtivement et isolément, ne produisit que des échecs. Dumouriez quitta le ministère; les journées du 20 juin et du 10 août mirent l'anarchie dans le pays, désorganisèrent nos armées et les forcèrent à l'immobilité; enfin, la coalition prit l'offensive et résolut de marcher droit sur Paris en perçant la frontière tant redoutée de Vauban.

1 Il mourut en juin 1793.

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